Certaines relations nouées virtuellement peuvent finir par un mariage. C’est ce qui est arrivé à Karla Piedrasanta, une Canadienne de 35 ans habitant de Mississauga à Toronto, et Abderahim Chakir, un Marocain de 40 ans. Le couple s’est rencontré pour la première fois sur internet en 2006. Ils ont été présentés par un collègue de Piedrasanta, qui n’est d’autre que le frère de Abderahim. La proposition de mariage est arrivée en novembre 2007 et l’union a été scellée en février 2008 au Maroc. La relation suivait son cours normal. Karla s’est même rendue au Maroc en 2011. C’est lors de cette visite qu’elle a conçu son fils, Amin, fruit de son amour avec Abderahim. Mais Amin, aujourd’hui âgé de 19 mois, n'a toujours pas rencontré son père.
Selon la femme, sous le coup de la déprime, les services de l’immigration refuse d’accorder le visa à son mari. Au début de leur histoire, leur fréquentation via internet et le mariage qui s’en est suivi avaient conduit les responsables à conclure qu’il s'agissait d’une union de convenance. La demande de validation du mariage a été donc rejetée fin 2008. En raison des retards au niveau du Tribunal de l'immigration, l’appel de Karla n'a été entendu qu’en 2011. Mars 2012, le tribunal va finalement statuer en sa faveur. «Nous étions tellement heureux que notre mariage soit finalement reconnu et nous étions sur le point de vivre ensemble», confie Karla sur Metronews.ca.
Du rêve au cauchemar
Mais le rêve se transformera vite en cauchemar, car le service des visas au Maroc a tenu à ce que le couple présente une nouvelle demande pour que Abderahim puisse avoir son visa pour le Canada. Déjà, une première requête avait été déposée en 2012 mais refusée. Cette fois, le service des visas a exigé des documents supplémentaires, des examens médicaux et des photos. «La demande du couple a eu lieu en mai 2012, après que des responsables ont «découvert qu’il - Abderahim - peut souffrir d’une situation sanitaire qui pourrait constituer un risque pour la santé et la sécurité des Canadiens ; et le rendrait inadmissible au Canada», expliquait Citoyenneté et Immigration Canada (CIC).
Selon un porte-parole du ministère, «le CIC avait informé Abderahim que lorsqu’il aura prouvé avoir reçu un traitement et que son état ne présentera plus de risque pour la population canadienne, le CIC réévaluera son dossier médical et son application». Pourtant, l’homme en question ne souffre d’aucune maladie qui pourrait constituer une menace pour la santé des canadiens. Il avait même effectué deux tests de tuberculose sur demande du bureau des visas. A chaque fois, ces examens se sont avérés négatifs. Abderahim a fait «toutes les prises de sang et des tests de salive. Il n’a pas la tuberculose», confirme sa femme sur Mississauga.com. «Nous faisons tout. Tout ce qu'ils ont demandé, nous leur avons tout donné tout de suite», a-t-elle ajouté, soulignant qu’elle n’a pas eu de retour des services de l’immigration depuis les derniers tests de tuberculose de Abderahim en novembre 2013.
Elever Amin seule, un vrai parcours de combattant
Le couple veut qu’Amin grandisse au Canada, où il aura de meilleures chances selon eux. Abderahim n’est pas seulement confronté à la question du visa, il souffre aussi de ne pas exercer son rôle de père et du fait que l’enfant ne le connaisse toujours pas. Une situation qui met Karla hors d’elle. «C’est émotionnellement et financièrement dévastateur», a-t-elle déploré. Cette femme qui travaille à temps plein comme agent-douanier pour une entreprise de messagerie tout en s'occupant d’Amin, espère pouvoir réunir sa petite famille. «Chaque année, nous espérons que nous serons ensemble. Nous faisons tout notre possible pour respecter le processus de demande. Mon mari est absent alors que notre fils grandit», regrette Karla.
Le père lui, est affecté par la situation. «Il s'agit d'un très long processus. Je me sens déprimé tout le temps. J'ai manqué beaucoup de grands moments avec ma femme et notre fils», regrette-t-il sur TheStar. Autre difficulté, les revenus mensuels de la mère paient à peine son logement et la garde de son fils. En effet, Piedrasanta consacre 739 dollars canadiens de ses 2 000 CAD mensuels pour le loyer et 720 CAD pour la garde d’Amin. En plus, la communication lui revient chère. «Je n'ai pas de - téléphone - fixe. La minute au Maroc me coûte 1 dollar sur mon téléphone portable en cas d’urgence», a-t-elle fait savoir. Malgré sa situation, elle parle avec Abderahim, un vendeur au détail tous les soirs par internet. Le couple «revit» d’une autre manière le début de son histoire.