Mohammed et Dominique pourront finalement se dire «oui». Ce couple franco-marocain homosexuel avait, dans un premier temps, été interdit de mariage par le parquet de Chambéry, en Savoie, à cause d’une convention bilatérale signée en 1981 entre la France et le Maroc, interdisant cette possibilité. Mais la chambre civile du tribunal de grande instance de la ville en a décidé autrement ce vendredi 11 octobre.
Celle-ci a, en effet, donné «mainlevée de l'acte d'opposition du 12 septembre 2013 du ministère public au mariage», indique-t-on dans le jugement rendu ce matin et dont l'AFP a eu copie.
«Le plus beau jour de ma vie»
«C'est le plus beau jour de ma vie», a déclaré le Marocain Mohammed, cité par France 3 Alpes, à sa sortie du tribunal. «C'est une explosion de joie à l'intérieur de moi, je suis très heureux», a confié de son côté Dominique.
«Le jugement est rendu sur le fond et s'attache à dire que la loi sur le mariage pour tous a modifié l'ordre public international français, qui ne permettra plus aucune discrimination sur le mariage qu'elle soit fondée sur le sexe ou la nationalité. Le jugement s'applique à tous les homosexuels», a souligné l'avocat du couple, Me Didier Besson cité par l’AFP.
Conflits de lois
Initialement, Dominique et Mohamed devaient se marier le 14 septembre dernier, à Jacob-Bellecombette, près de Chambéry. Le parquet s'y était, toutefois, opposé «conformément aux instructions de la chancellerie qui nous a demandé de faire prévaloir l'accord international sur le code civil», rappelle-t-on.
Après la promulgation de la loi sur le mariage pour tous, une circulaire interdisant le mariage homosexuel aux ressortissants de 11 pays, dont le Maroc, avait été publiée, fin mai dernier. Celle-ci précisait également que les conventions bilatérales entre la France et ces pays avaient «une autorité supérieure à la loi» française. Aujourd’hui, la tendance semble avoir été renversée.
Le jugement de vendredi rappelle, en effet, que le code civil stipule désormais en France que «deux personnes de même sexe peuvent contracter mariage lorsque, pour au moins l'une d'elles, soit sa loi personnelle, soit la loi de l'Etat sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet».
«Cette règle de conflit de lois nouvelle limite, ce faisant, la portée de la règle traditionnelle (...) selon laquelle l'appréciation des conditions de fond du mariage est tributaire de la loi personnelle de chacun des époux», a estimé TGI de Chambéry. La loi Taubira «a implicitement mais nécessairement modifié l'ordre public international français, de sorte qu'une discrimination à l'accès au mariage fondée sur le sexe justifie l'éviction de l'article 5 de la convention franco-marocaine», souligne le tribunal.
Le parquet de Chambéry peut, cependant, toujours faire appel de ce jugement. Il fera savoir sa décision lundi.