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Grand Angle

Maroc : « Nous n’avons pas besoin d’électricité dans notre village ! »

La chaîne Arte a diffusé hier soir le documentaire fascinant «le Thé ou l’électricité» filmant l’arrivée de l’électricité dans un petit village perdu du Haut-Atlas. Cette arrivée n’est pas seulement synonyme de confort pour les villageois. Elle signifie aussi l'arrivée de la télévision, publicité et consommation.

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Sept mois après avoir été projeté et récompensé par le "Grand prix" et le "Prix du public" lors du Festival international du film documentaire d’Agadir en mai dernier, la chaîne Arte a diffusé hier soir à 23h30 (heure française) le documentaire "Le Thé ou l'électricité". Un film qui est plus que jamais d’actualité puisque le Maroc s’investit pour apporter l’électricité dans les régions les plus reculées du pays et lance, à côté, différents programmes, soucieux de l’environnement, pour produire une énergie durable et pas chère. Le tout dernier lancé est le programme marocain intégré Eolien/Hydro et Electrification Rurale.

Hibernatus

Sorti en janvier 2012, l’histoire du film se passe dans un petit village du nom d’Ifri, perdu au cœur du Haut-Atlas marocain à plus de 2000 mètres d’altitude. Le réalisateur belge Jérôme Le Maire y a passé trois ans. Il a filmé la venue de l’électricité dans ses petites maisons de terre et ce qu’elle apporte comme changement dans leur quotidien.

Le réalisateur a eu l’idée de faire un film sur ce village lors d’un voyage dans les montagnes marocaines. «En sillonnant les montagnes du Haut Atlas marocain qui sont en train d’être électrifiées, j’ai eu un choc. Un soir, dans une maison de terre d’un de ces petits villages reclus dans la vallée, en scrutant les visages tellement particuliers des berbères qui m’accueillaient et en les voyant hypnotisés par une télévision trônant au centre de la pièce, j’ai eu l’impression de revoir la scène d’«Hibernatus» où Louis de Funès (l’aïeul) se réveille effaré en plein XXème siècle !», écrit-il dans sa note d’intention sur le site du film.

«On n’a pas besoin d’électricité !»

Cependant, pour les villageois d’Ifri, l’électricité n’est pas la priorité. «Nous n’avons pas besoin d’électricité. En vérité, on a besoin que de la route », déclare un villageois aux employés de l’Office National de l’Electricité de Béni Mellal qui ont fait des kilomètres pour annoncer, ce qu’ils pensent être une une bonne nouvelle aux villageois. Néanmoins, ces derniers ne sont pas enthousiastes. «La route est indispensable», renchérit un autre villageois. Une route tant voulue pour que les enfants puissent aller à l’école sans emprunter un sentier caillouteux, pour que les gens malades où les femmes enceintes puissent se rendre à l’hôpital le plus proche ou pour enterrer un membre du village ne soit pas un parcours du combattant. Une route pour les relier, tout simplement au reste du monde.

Les montagnes transformées en société de consommation

Frustrés de voir que les autorités locales ne répondent pas à leur appel de construire une route, les villageois décident de la construire eux-mêmes, à la force de leurs mains et avec leurs propres moyens. Avec son équipe, Jérôme Le Maire se retrouve au plein milieu d’un dilemme : les enjeux de la construction de la route mais également l’arrivée de l’électricité dans le village, la construction des lignes électriques et le débarquement de la télévision dans les maisons. Certaines séquences du film montrent par exemple des enfants hypnotisés par la télévision, qui regardent la bouche ouverte, les publicités et les dessins animés dans le petit écran. Par ailleurs, le film souligne également que les villageois vont devoir s’endetter ou vendre des animaux de leurs bétails pour pouvoir installer leur compteur électrique et payer leur facture.

«On connecte ces gens avec un lien électrique et ce que je voulais montrer [dans le film] c’est qu’à partir du moment où vous rentrez dans ce lien, vous rentrez dans des rapports de force qui peuvent être extrêmement cruels et que notre modernité basée sur l’économie, le gain, l’avidité et la matérialité etc…peut être extrêmement cruel avec l’autre», explique le réalisateur dans une interview.

Le film parcourt actuellement le monde et est sélectionné dans plusieurs festivals. Il peut être regardé en entier sur le site d’Arte.

Bande annonce du film "le Thé ou l'électricité"

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