Connu pour son écosystème fragile, le pourtour de la Méditerranée fait partie des zones les plus touchées par la sécheresse à travers le monde, encore plus dans un contexte global des dérèglements climatiques. Les régions d’Afrique et du Moyen-Orient sont encore plus concernées, notamment le Maroc, classé rouge parmi les pays à risque élevé et 27e sur les 164 pays analysés par le World Resources Institute (WRI). Dans cette étude, le centre de recherche indique qu’un pays confronté à un «stress hydrique extrême» utilise 80% ou plus de son approvisionnement disponible. Un pays classé parmi la zone à «stress hydrique élevé» signifie qu’il sollicite 40% à 80% de ses ressources.
Selon les données actualisées du centre de recherches basé à Washington (Etats-Unis), le phénomène est particulièrement extrême dans 25 pays, qui abritent au total un quart de la population mondiale. De Bahreïn, premier mondial, à la Syrie, 25e, beaucoup de ces pays principalement concernés se situent d’ailleurs dans la zone MENA, à l’image du Koweït (3e), du Liban (4e), d’Oman (5e), du Qatar (6e), des Emirats arabes unis (7e), de l’Arabie saoudite (8e), d’Israël (9e), ou encore de l’Egypte (10). De la région d’Afrique du Nord, la Tunisie (20e) figure également parmi les régions à risque extrême.
D’autres pays d’Europe et du reste de l’Afrique occupent aussi une place dans ce classement, comme le Botswana (13e), la Belgique (18e), la Grèce (19e), la Namibie (21e), ainsi que l’Afrique du Sud (22e).
La Maroc particulièrement concerné dans la zone MENA
Juste après le Mexique (26e), le Maroc (27e) est parmi les principaux 22 pays à risque élevé. Il devance ainsi l’Erythrée (28e), l’Espagne (29), l’Algérie (30e), le Pakistan (31e), le Pérou (32e), le Turkménistan (33e), l’Ouzbékistan (34e), la Thaïlande (35e), l’Andorre (36e), l’Albanie (37e) ou encore le Niger (38e). La Turquie (39), l’Afghanistan (40e), l’Italie (41e), le Kirghizistan (42e), le Portugal (43e), le Népal (44e), Djibouti (45e), la Mongolie (46e) et la Macédoine (47e) figurent dans cette même zone.
Par sa situation géographique au confluent des climats méditerranéen, sec et semi-aride, le Maroc fait partie en effet des régions les plus durement touchées par la sécheresse dans le monde. En 2020, une étude de l’Université Mohammed VI Polytechnique et du Massachusetts Institute of Technology (MIT) a déjà indiqué que le pays devrait se préparer à des hivers de moins en moins pluvieux. Deux ans plus tard, les données chiffrées ont montré que le royaume vivait la pire sécheresse de son histoire.
Selon le WRI, autant ces pays sont confrontés chaque année à un stress hydrique élevé, autant la quasi-totalité de leurs réserves d’eau disponibles – quoique limitées – sont sollicitées. Par conséquent, au moins 50% de la population mondiale, soit près de 4 milliards de personnes, est confronté à une sécheresse extrême pendant au moins un mois par an, avec un impact sur «la vie, l’emploi, la sécurité alimentaire et énergétique des personnes».
En effet, l’eau est une ressource naturelle «essentielle à la culture et à l’élevage du bétail, à la production d’électricité, au maintien de la santé humaine, à la promotion de sociétés équitables et à la réalisation des objectifs climatiques mondiaux». «Sans une meilleure gestion de l’eau, la croissance démographique, le développement économique et le changement climatique risquent d’aggraver le stress hydrique», alerte ainsi le centre de recherche.
Une reconfiguration de la gouvernance pour limiter les méfaits sur le développement
Les causes du stress hydrique croissant dans les pays et régions les plus touchés sont multiples, d’autant que «partout dans le monde, la demande en eau dépasse les ressources disponibles», note l’analyse, ajoutant que «la demande a plus que doublé depuis 1960». «L’augmentation de la demande en eau est souvent le résultat de la croissance démographique et d’industries telles que l’agriculture irriguée, l’élevage, la production d’énergie et l’industrie manufacturière», soulignent les auteurs, tout en mentionnant «le manque d’investissement dans les infrastructures hydrauliques, les politiques d’utilisation non durables de l’eau ou la variabilité accrue due au changement climatique».
Sans intervention dans ce sens, allant de pair avec une meilleure gouvernance de l’eau, «le stress hydrique continuera de s’aggraver, en particulier dans les zones où la population et l’économie connaissent une croissance rapide», note le WRI. Et d’affirmer que les régions les plus touchées par sont le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (MENA), où «83% de la population est exposée à un stress hydrique extrêmement élevé», de même que l’Asie du Sud, où 74% des habitants sont concernés.
Le WRI prévoit que d’ici 2050, un milliard de personnes de plus seraient confrontées à une sécheresse extrêmement élevée, malgré les efforts globaux pour limiter les conséquences des dérèglements climatiques, notamment l’augmentation de la température mondiale à 2,4 °C d’ici 2100, dans «un scénario optimiste».
Avec le développement de la population et des modes de vie, la demande mondiale en eau devrait par ailleurs augmenter de 20 à 25 % d’ici 2050, tandis que «le nombre de bassins versants confrontés à une forte variabilité d’une année à l’autre, ou à des approvisionnements en eau moins prévisibles, devrait augmenter de 19%». Dans la région MENA, cela signifiera que la totalité (100%) de la population vivra dans un stress hydrique extrêmement élevé d’ici 2050. En l’espèce, selon le WRI, les impacts pourraient dépasser les conséquences environnementales et économiques, notamment le poids de ce phénomène sur le PIB, pour revêtir une dimension de stabilité politique.