«Je suis allée à l’école en France, je parle bien Français, toute ma vie est ici. Comment je vais faire moi ?», se lamente Fadoua El Alami, mère de deux enfants et en attente de naturalisation depuis 7 ans. En effet, la jeune femme est née au Maroc le 25 juillet 1986. Le 10 août de la même année, le bébé alors âgée de quelques semaines seulement, prend l’avion avec sa mère. Direction : Paris.
Rejets de dossiers successifs
Fadoua fait sa première demande de naturalisation en 2004, mais «on m’a dit que le regroupement familial n’avait pas été fait, s’appuyant sur le fait que j’avais fait mon vaccin à Casablanca», se souvient-elle. Après insistance, la jeune femme obtient un titre de séjour de cinq ans. Une fois ce titre expiré, elle refait la demande de naturalisation. Mais une fois de plus la sous-préfecture de Nantua rejette son dossier. «On m’a dit que je ne travaillais pas et j’ai dû me contenter d'un titre de séjour d’un an». Un titre qu’elle renouvelle chaque année.
En 2011, Fadoua travaillait 50 heures par semaine et a eu le courage de refaire sa demande. Malheureusement, elle perd son job deux semaines avant son entretien à la préfecture qui rejette à nouveau sa demande. Cette fois, ce n’est pas seulement son récent chômage qui est en cause. La sous-préfecture de Nantua lui fera également comprendre, dans sa lettre, qu’elle a un casier judiciaire chargé, pour «vol simple, escroquerie et violences volontaires en 2004 et usage de stupéfiants en 2008» note la sous-préfecture dans sa lettre. Des faits que Fadoua ne reconnait pas. «Je leur ai présenté mon casier judiciaire qui était vierge et leur ai demandé ce qu’ils me reprochaient»,
La jeune femme saisit alors le président de l’époque Nicolas Sarkozy pour lui exposer sa cause. Elle reçoit ensuite une réponse du chef de cabinet du président qui lui assure que M. Sarkozy a saisi le préfet pour son cas. «Mais la sous-préfecture m’a écrit pour me demander pourquoi j’avais saisi le président et que le préfet est l’autorité habilité à résoudre mon problème», relève-t-elle. Et en vertu de l’article 44 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 modifié relatif aux décisions de naturalisation, la préfecture a rejeté son dossier et ne l’autorise pas à déposer une nouvelle demande qu’à partir du 31 mai 2013. Mais Fadoua n’a aucune garantie de la validation de son dossier.
La jeune mère ne peut pas avoir une carte de 10 ans. «Cela m’empêche de trouver un travail stable, [car] les employeurs sont réticents pour me recruter avec une carte de séjour valable seulement un an», déplore-t-elle. En dépit de sa situation, Fadoua doit payer les impôts et taxes. Actuellement, elle suit une formation d’aide-soignante qu’elle a débuté le 1er octobre dernier espérant trouver un emploi correct.
Ni Française, ni Marocaine
«En France ils ne me reconnaissent pas en tant que Française, au Maroc ils ne me considèrent pas réellement comme Marocaine. Dans quel pays va t-on me reconnaitre ?», s’alarme la jeune femme dépassée par la situation. Pour la petite histoire, Fadoua a voyagé au royaume pendant l’été dernier. Alors qu’elle voulait établir un extrait de naissance, «On m’a dit : ‘on ne peut vous le donner, vous n’êtes pas Marocaine’», raconte-t-elle. «Si mes parents meurent, aux yeux de la loi marocaine je n’ai pas droit à l’héritage. Je ne pourrai pas bénéficier des biens qui sont au Maroc au nom de ma mère», regrette t-elle. Pour «garantir l’avenir» de ses enfants, Fadoua vient d’acheter un appartement à Casablanca. «Au moins c’est à mon nom», dit-elle en guise de consolation.
SOS
En France, la situation se complique pour la jeune femme. Elle n’a aucune garantie concernant la validation de son dossier en mai 2013. Fadoua a choisi de contacter un avocat pour voir les choses avancer. Car après tout, elle a fait toute sa vie dans l’hexagone. «Mais l’avocat me demande plus de 2 500 euros. Je ne gagne que le Smig. Il faut nourrir mes enfants, payer mon logement et subvenir aux différents besoins», explique Fadoua, soulignant que même en économisant il lui sera difficile d’avoir une telle somme.
Ses amis lui ont donné l’idée de lancer une sorte de SOS sur Facebook afin de recevoir des dons qui lui permettront de se payer un avocat, ce qu’elle a fait mardi dernier. Elle attend encore les réactions.