Au Maroc, un acteur aurait été placé en garde à vue pendant 48 heures puis poursuivi par la police marocaine après s’être déplacé dans un commissariat pour porter plainte, suite à la campagne de lynchage visant la communauté LGBTQ+ du royaume.
Selon le journaliste et écrivain marocain Hicham Tahir, tout a commencé lorsque ce jeune marocain est allé porter plainte suite aux diffamations dont il a été victime à cause des lives diffusés sur le compte Instagram de l’influenceuse transsexuelle Sofia Taloni. «Il a été placé en garde à vue 48h et se retrouve aujourd’hui accusé de non-respect de l’état d’urgence, alors qu’il avait sur lui son attestation, et atteinte à un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions», rapporte le journaliste sur Twitter.
«Ce jeune est un artiste comédien, dont les œuvres parlent des droits humains et de diversité. Il parle du droit de vivre de chaque individu. La seule raison valable pour son arrestation est "son look", jugé "pas dans les normes"», dénonce-t-il. Et d’expliquer que «tout ce que le jeune homme en question demandait, c’est que justice soit faite, après avoir vu ses photos et vidéos circuler sur internet» et «après avoir lu des messages de haine le visant directement».
Hicham Tahir précise que «dans la vidéo dans laquelle il apparaissait, Sofia Taloni encourageait les jeunes de sa ville à le violer».
Un jeune a été porter plainte contre la diffamation dont il est victime, suite à l'affaire Sofia Taloni. Il a été placé en garde à vue 48h et risque la prison maintenant. Son procès aura lieu le 12 mai.#LGBTQuarantine #SofiaTaloni #Homophobie #Maroc 1/4 pic.twitter.com/zJcbC8zOpY
— Hicham Tahir (@HichamTahir) May 7, 2020
Harcelé et lynché «sur ordres de Sofia Taloni»
L’un des premiers à réagir à cette poursuite judiciaire, l’écrivain marocain Abdellah Taïa a dénoncé le fait que «la vague d'outing massif des LGBTQ+ au Maroc continue». «C'est le jeune acteur Abdelatif N. qui en fait les frais à présent. La terrifiante transgenre Sofia Taloni (à l'origine de cette tragédie) a poussé les internautes à le harceler, à le lyncher. Ils ont suivi parfaitement ses ordres», explique-t-il sur sa page Facebook. Et de préciser que la plainte a été déposée auprès d’un commissariat de police de Sidi Kacem, ville dont l’acteur est originaire.
«Au lieu de recevoir sa plainte et de le protéger, la police marocaine l'a accusé de non-respect du confinement et d'outrage à agent public. Comme c'est étrange. Absurde. Horrible... Si la police ne protège pas les plus fragiles, qui va le faire ?»
L’écrivain marocain, auteur de «L'Armée du salut» (Editions Seuil, 2006) a déclaré apporter son «soutien fort» à cet acteur. «Nous sommes avec toi. Amour et Salam à toi, à vous tou-te-s.»
Cette poursuite intervient alors que la police marocaine a affirmé, il y a presque deux semaines, que ses services «n'ont reçu récemment aucune plainte ou notification concernant des délits liés au ciblage de personnes, de la discrimination ou de la haine à leur encontre sur la base de la liberté individuelle». Et d’assurer que les services de la police judiciaire se sont autosaisis de l’affaire d’atteinte à la vie privée de citoyens et qu’une enquête préliminaire aurait été «ouverte». Aucune autre information n’a filtré après cette sortie médiatique quant aux résultats de cette enquête.
Plusieurs ONG marocaines et étrangères ont, depuis, appelé à «cesser le cyberharcèlement homophobe», exhortant les autorités marocaines à «faire respecter le droit à la vie privée» de tout citoyen.
Début avril, les homosexuels au Maroc ont fait l’objet d’une campagne les ciblant sur les réseaux sociaux, dans le sillage des live sur Instagram lancés par ledit transsexuel marocain. Etabli en Turquie, il avait invité ses fans, majoritairement des femmes, à installer des applications de rencontres pour «démasquer» des homosexuels à proximité, lançant ainsi une vraie chasse aux sorcières.