Une cour d’appel américaine a confirmé, vendredi 16 août, une décision antérieure refusant de reconnaître la décision d’un tribunal marocain contre le philanthrope américain John Paul DeJoria.
Elle a en effet confirmé la décision du tribunal fédéral du district occidental du Texas, concluant que le milliardaire s’est vu refuser une procédure régulière au Maroc. Cela signifie que DeJoria n’aura pas à payer 123 millions de dollars à la partie marocaine après avoir été accusé de fraude et de mauvaise gestion.
La décision est fondée sur les conclusions du tribunal du Texas, qui a déclaré que l’entrepreneur américain avait droit à la non-reconnaissance de la décision rendue par le Maroc au titre de la loi de 2005 sur la reconnaissance du jugement monétaire des pays étrangers.
DeJoria avait fui le Maroc
Cette décision intervient après que le magnat américain et ses associés ont été poursuivis en justice par Lone Star, qui est désormais connue comme étant la société privée marocaine Maghreb Petroleum Exploration. Le conflit a commencé plusieurs années après que DeJoria eut décidé en 1999 de lancer un projet d'exploitation pétrolière à Talsint, au Maroc.
«En 1999, DeJoria et ses partenaires commerciaux ont fondé Lone Star Energy Corporation au Maroc avec l’aide du premier cousin du roi Mohammed VI», a rappelé la cour dans sa décision. «Les perspectives semblaient si bonnes que les médias marocains avaient annoncé que le pays disposerait bientôt d’une manne pétrolière» de grande qualité «qui permettrait au Maroc d’être autosuffisant pendant 30 ans», a-t-il ajouté.
Or ce projet prometteur n’a pas atteint ses objectifs. Le tribunal a indiqué que «DeJoria et son partenaire commercial ont été forcés de quitter le conseil d’administration de Lone Star et, craignant pour leur vie en raison d’une prétendue menace de mort, ont fui le Maroc pour ne jamais y revenir».
Un expert «manquant d’indépendance» ?
Un tribunal de commerce a entamé le procès intenté par Maghreb Petroleum et, après avoir sollicité l’avis d’un expert indépendant, DeJoria a été condamné à payer 969 832 062,22 dirhams. «Afin de récupérer ses gains sur les actifs de DeJoria aux États-Unis», Maghreb Petroleum a entamé une longue bataille dans le pays, tentant de convaincre un tribunal américain de reconnaître et d’exécuter son jugement.
En 2013, la société marocaine est venue aux États-Unis pour faire reconnaître le jugement, mais DeJoria a riposté, alléguant qu’il n’avait pas bénéficié d’un procès équitable au Maroc. L’homme d’affaires a également affirmé qu’il n’avait pas assisté aux audiences au Maroc parce qu’il aurait reçu des menaces de mort et qu’il craignait pour sa vie.
Ses réclamations ont d’abord été refusées. «Il n’a pas pu obtenir la non-reconnaissance en montrant qu’on lui avait refusé une procédure régulière ou [qu’il avait été soumis à] des tribunaux impartiaux dans son cas.» Mais en mettant à jour une «loi de reconnaissance» de 2005, il a pu défendre le droit de non-reconnaissance du jugement marocain au motif qu’il n’avait pas été soumis à une procédure régulière.
Il est retourné au tribunal de district du Texas pour les informer du changement de loi. Ce dernier a conclu que l’affaire avait été classée sans suite, estimant que «DeJoria n’était pas en mesure d’assister à la procédure marocaine, de faire appel à un conseil pour le représenter dans cette procédure et que, bien que le tribunal marocain se soit fondé sur l’opinion d’un expert pour déterminer le dommage, cet expert manquait d’indépendance». Cette décision a poussé Maghreb Petroleum Exploration à solliciter la cour d’appel, qui a confirmé la décision initiale du tribunal de district du Texas, autorisant la non-reconnaissance du jugement marocain.