Plus d’un an après sa première condamnation par le tribunal d’Al Hoceïma pour avoir «insulté des fonctionnaires et des représentants de l’autorité dans l’exercice de leur fonction», en plus d’avoir «menacé» et «insulté» des institutions publiques, l’avocat Abdessadek El Bouchtaoui annonce avoir obtenu l’asile politique en France. A Al Hoceïma, où il a publiquement manifesté sa solidarité avec les détenus du Hirak du Rif, dont il a été l’avocat, il a également été poursuivi pour «incitation à commettre des délits» et «organisation de rassemblement non autorisé».
Ce jeudi, il confirme à Yabiladi avoir reçu une réponse positive à sa demande d’asile politique, de manière officielle le 13 février dernier, ce qui lui permet d’obtenir un permis de résidence pour dix ans en France. «J’avais soumis ma demande à la Suisse et conformément au traité de Dublin, le dossier a été transféré à la France, où j’ai formulé donc ma requête le 21 juillet 2018, en compagnie de ma famille», nous indique-t-il.
La continuité du combat pour la démocratie depuis l’extérieur
Pour cet avocat qui a fait partie de la défense des détenus du Hirak du Rif à Casablanca, dont Nasser Zefzafi, cette protection lui garantit «la libre circulation dans plusieurs pays». Ceci «[lui] permettra de continuer l’essentiel : le devoir de défendre les droits et les libertés, que ce soit dans le Rif ou dans toutes les autres régions du Maroc, jusqu’à la réalisation concrète de la liberté, de la dignité et de la justice sociale».
«La raison de mon départ du Maroc est que j’ai subi des pressions, des intimidations, et même des menaces de mort reçues à deux reprises.»
Me El Bouchtaoui considère que ces condamnations sont liées à ses «nombreuses déclarations à la presse pour éclairer l’opinion publique» et à travers lesquelles l’avocat relatait en détail le déroulement des longues séances d'audience. En février 2018, Abdessadek El Bouchtaoui a été condamné à en première instance à vingt mois de prison ferme et à une amende de 500 dirhams. Après avoir fait appel de ce jugement, il en a profité pour partir en Europe, la Cour d’appel l’a condamné à deux ans de prison ferme.
«Le Maroc n’a pas respecté ses engagements internationaux en la matière et mon rôle est de défendre les victimes de ce non-respect, dans le Rif et ailleurs au royaume. Ce qui m’est arrivé est déjà arrivé à des opposants exilés du pays, qui sont revenus après des décennies et il y en a même parmi eux qui ont occupé des postes de décision, car l’Etat avait dans le temps reconnu ses erreurs», décrit Abdessadek El Bouchtaoui. «J’espère que l’Etat reverra encore ses positions vis-à-vis de personnes envers lesquelles il a reproduit les mêmes erreurs en les contraignant à s’éloigner du pays», conclut-il.