Lors de son intervention filmée en marge d’une rencontre avec des jeunes de son parti, l’ex-secrétaire général du Parti de la Justice et du Développement a saisi cette occasion pour aborder plusieurs sujets. Hormis les explications sur la retraite confortable de 90 000 dirhams dont il bénéficie, Abdelilah Benkirane a également abordé la question de la monarchie parlementaire.
«Je n’ai aucun doute sur les réclamants quant à ceux qui appellent à l’instauration d’une monarchie parlementaire, mais il faut m’expliquer ce que signifie le fait qu’un roi règne sans gouverner», a-t-il lancé aux jeunes de sa formation politique. «Qui gouvernera dans ce cas ?», s’est-il interrogé, avant de revenir sur son mandat en tant que chef du gouvernement.
«Lorsque j’étais chef du gouvernement, j’ai dit que je ne m’immiscerais pas dans les relations extérieures du Royaume et que je soutenais la position de Sa Majesté le Roi», a-t-il déclaré.
Abdelilah Benkirane a donné l’exemple du dossier du Sahara. «Devons-nous laisser chaque chef du gouvernement poursuivre sa politique ? Il est impossible qu’un chef du gouvernement puisse gérer cette question», a-t-il affirmé.
Après cette introduction générale, l’ancien secrétaire général du parti de la Lampe est passé à l’offensive, critiquant les Emirats arabes unis et les accusant de «harceler» le PJD. L’occasion de citer Dahi Khalfan, ex-chef de la police de Dubaï et Mohammed Dahlan, ex-dirigeant du mouvement palestinien Fatah.
«Quand ils (les Emirats arabes unis, ndlr) nous conviaient à des événements, je m’y rendais parce que je me disais que ça rentrait dans le cadre de la politique de Sa Majesté. J’aurais pu ne pas y aller et dire au Roi, s’il m’avait interrogé, que ces gens nous harcelaient. D’ailleurs, lorsque la marche d’Ould Zeroual (manifestation anti-PJD organisée le 18 septembre 2016 à Casablanca, ndlr) a eu lieu, leur télévision nationale s’est réjouie, comme s’ils étaient derrière cette manifestation.»
PJD-EAU : Je t’aime… moi non plus
Pour l’ancien secrétaire général du PJD, son «frère» Saâdeddine El Othmani agit avec les Emirats arabes unis de la même façon, «car c’est la politique de notre Roi à l’étranger». «Nous ne pouvons pas nous y opposer malgré leurs positions. Lorsque je rencontre leur émir, je le salue et lui présente mon respect. Telle est la politique de Sa Majesté», conclut-il.
Le désamour entre le PJD et les Emirats arabes unis est un secret de polichinelle. Déjà à la veille de la campagne électorale de 2016, le parti avait critiqué de manière virulente l’attention accordée par des médias émiratis à la marche anti-PJD. Des sources proches de la formation politique marocaine avaient alors accusé les Emirats de «s’immiscer dans les élections marocaines et d’inciter les gens à ne pas voter pour le PJD».
L’arrivée des islamistes au pouvoir dans plusieurs pays arabes suite au «Printemps arabe» avait déplu aux autorités d’Abou Dhabi. Celles-ci sont accusées d’avoir contribué à la chute du régime de Mohamed Morsi en Egypte et tenté de saper l’arrivée du parti Ennahda au pouvoir en Tunisie.
Les positions anti-Frères musulmans des EAU avaient également heurté les islamistes marocains à travers des déclarations anti-PJD du très controversé Dahi Khalfan, actuel numéro 2 de la police à Dubaï, qui avait même prédit en 2013 la chute du gouvernement Benkirane.
On attribue même le limogeage, en 2013, de Saâdeddine El Othmani, alors ministre PJDiste des Affaires étrangères, aux Emirats arabes unis, précisément à Mohamed Ben Zayed Al Nahyane, prince héritier et ministre de la Défense.