«Nul n’est prophète dans son pays», a-t-on l’habitude de dire. L’OCP en sait quelque chose. L’office créé en 1920 est le leader incontesté des exportations mondiales de phosphates et produits dérivés. Mais la première entreprise industrielle du Maroc s'est attiré les foudres des riverains dans certaines régions abritant ses sites d’exploitation.
Les récents affrontements à Safi entre de jeunes manifestants et les forces de l’ordre en sont la dernière illustration. A l’origine de ces accrochages qui ont dégénéré et fait des dizaines de blessés, une intervention policière pour mettre fin au blocus de la circulation des trains par des enfants de retraités et d’anciens salariés de l’OCP aujourd’hui décédés. Ces accrochages qui ont plongé certains quartiers de cette ville côtière dans une violence inouïe rejoignent ceux qui avaient précédemment secoué Khouribga.
Cette ville minière est sous tension depuis le début de l’année en raison des fréquents rassemblements que tiennent des riverains des installations de l’OCP. Le 15 mars, la police était violemment intervenue là aussi pour mettre fin à un campement de protestataires. Ces derniers avaient érigé des tentes pendant plus d’un mois devant le siège de l’OCP de Khouribga. Ils fustigeaient, entre autres, l’incorporation au sein de l’Office de nouvelles recrues non originaires de cette région, au détriment des jeunes locaux. Ces échauffourées avaient fait plusieurs blessés, mais sans décourager les protestataires. Le lundi 6 juin dernier, même scénario, toujours à Khouribga. Plus d’une centaine de blessés sont signalés lors d’une manifestation de demandeurs d’emploi à l’OCP.
Offres OCP
Pour calmer le jeu, l’Office dirigé par Mostafa Terrab a tenté de proposer des solutions, tout en reconnaissant qu’il «ne peut pas employer ou fournir des indemnités de formation à tous, au risque de compromettre ses équilibres économiques et financiers, et de mettre en péril sa compétitivité sur le marché international».
C’est dans ce cadre que l’entreprise a lancé le programme «OCP Skills» pour créer 5 800 nouveaux emplois à ajouter à son effectif de plus de 20 000 employés, en donnant bien sûr la priorité à ses «riverains protestataires» et enfants de ses anciens salariés. Ce programme prévoit également 15 000 formations qualifiantes, en partenariat avec l'Office de la formation professionnelle et de la promotion du travail (OFPPT). L’OCP, qui a enregistré une hausse de plus de 44% de ses exportations au premier semestre de l’année en cours (soit 22,8 milliards de dirhams, contre 15,8 à fin juin 2010) promet également d’appuyer financièrement et techniquement les porteurs de projets créateurs d’emplois.
Ces efforts permettront-ils pour autant de maitriser la situation ? Rien n’est moins sûr. La partie n’est pas encore gagnée. Les derniers événements de Safi viennent de le rappeler.