Le Huanglongbing ou HBL, encore méconnu par le grand public et même par certains «spécialistes», fait allusion à une maladie causée par une espèce de puceron. Elle fait ravage depuis de nombreuses années en Floride (Etats-Unis) et au Brésil. Les effets de cette maladie «incurable» ont coûté des milliers de dollars aux géants de l’industrie agrumicole dans les deux pays.
Cette maladie, aussi appelée «greening», se manifeste tout d’abord par un changement de couleur du fruit, qui devient verdâtre. Elle affecte principalement l’orange, absorbe sa sève et ses nutriments. Par conséquent, la récolte a un goût amer et tombe de l’arbre avant maturation.
En 2013 déjà, Greg Carlton du département de l’Agriculture de la Floride, avait expliqué à l’AFP que cette maladie pouvait «rester dormante pendant cinq ans, avant de se manifester quand il est trop tard».
Maladie du dragon jaune./Ph.DR
Un problème plus économique que sanitaire
Pour ne prendre que l’exemple de la Floride, l’industrie des citriques générait plus de 9 milliards de dollars, étant l’un des principaux moteurs de l’économie fédérale. En 2013, les pertes se traduisaient par un déficit de 4, 5 milliards de dollars et par la destruction de plus de 8 200 emplois, selon Michael Sparks, président de Florida Citrus Mutual (FCM).
Si on analyse les données recueillies entre 2005 et 2017 en Floride, on s’apercevra que «la production d’oranges a chuté de près de 60%. Le prix de gros du jus d’orange concentré a plus que doublé, arrivant ainsi à 2 500 dollars la tonne, car les coûts de production se sont envolés», rapporte AFP.
Bien que dramatique au niveau des pertes économiques, cette maladie des agrumes n’aurait pas d’impact sur la santé des consommateurs. En effet, Info Rural affirme que le dragon jaune ne serait pas nocif pour l’humain.
La méditerranée est déjà touchée par le HBL
Jusqu’à dernièrement, les champs d’agrumes du pourtour méditerranéen était prémuni de cette maladie. Cependant, «la région n’est pas à l’abri», affirme Eric Imbert, chercheur au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) à Montpellier.
Le chercheur dit ne pas vouloir affoler, mais «si nous ne faisons rien en terme de prévention, nous pourrions assister à une catastrophe majeure, avec des prix qui doublent ou triplent». Par ailleurs, l’agence de presse française rapporte que le psylle à l’origine de cette maladie «a été détecté au nord de l’Espagne, et au Portugal, où des arrachages ont déjà eu lieu».
Depuis 2015, les associations d’agriculteurs et plus particulièrement des agrumiculteurs espagnols tentent de faire réagir leur gouvernement, en l’avertissant de l’existence du «dragon jaune», susceptible de se répandre et détruire toute leur plantation. Pour l’instant, selon Hortitec News, un cas a été détecté dans la province de Galice (nord de l’Espagne), mais «la situation serait limitée et contrôlée».
Comme le dénonce l’Association des agriculteurs de Valence, des cas de psylle africain ont été détectés sur des livraisons de plantes de curry en provenance de Malaisie et du Vietnam. Depuis, les associations demandent l’intervention des pouvoirs publics en Europe afin de ne pas vivre le même scénario que celui de la Floride.
Pour une maladie dite incurable, des solutions seraient envisageables
La toute première des solutions n’est autre que la prévention, rappelle Eric Imbert. Les solutions les plus radicales et malheureusement plus efficaces ont été d’arracher toutes les plantations et de tout reprendre, en utilisant des pesticides. En revanche, dans le pourtour méditerranéen, cette solution n’est pas envisageable : les plantations sont trop proches de lieux habités, précise ConsoGlobe.
De nos jours, des chercheurs du monde entier se penchent sur le sujet, qui semble être encore tabou. Les pistes sont multiples. D’un côté, les recherches s’orientent vers le développement de variétés d’oranges résistantes à la maladie. En Floride, une autre expérimentation a été menée, consistant à lâcher des guêpes tueuses de psylle, mais les effets escomptés tardent à se faire jour.
Récemment, le spécialiste mexicain Pedro Yamamoto a déclaré qu’il est possible de vaincre le dragon jaune. Mais pour ca faire, il faut «attaquer fort et tôt, quand les premiers symptômes sa manifestent». La solution du professeur Yamamoto peut se résumer en quatre points. D’abord surveiller, puis identifier les premières plantes qui présentent des symptômes, ensuite, faire une PCR, procédure pour détecter les bactéries et les vecteurs avant la maladie. Enfin, il faut impérativement former les producteurs et le personnel.
Qu’en est-il du Maroc ?
Selon la revue FruitTrop, citée par l’AFP, le Maroc, l’Egypte, le Portugal, la Turquie, l’Italie et la Grèce s’accaparent 70% des exportations mondiales d’agrumes. Ainsi, 21% des oranges clémentines et de citrons consommés dans le monde viennent de cette région.
Si le site ConsoGlobe affirme que «l’insecte vecteur a été aperçu au nord de l’Afrique», il n’ajoute aucune précision géographique. Nous avons tenté de joindre plusieurs acteurs du secteur mais le sujet semble dérangeant.