Dans l’univers de la presse marocaine, pluralisme et diversité ne font pas bon ménage. C’est l’une des conclusions de l’enquête réalisée par le Desk et l’organisation internationale Reporters sans frontières (RSF), dans le cadre du Media Ownership Monitor (MOM), «un projet global de recherche et de plaidoyer destiné à promouvoir la transparence et le pluralisme des médias à l’échelle mondiale».
«Pour la première fois, une cartographie globale de l’écosystème des médias marocains qui comptent est établie. Elle confirme la tendance inquiétante à la constitution d’un cartel d’intérêts communs au carrefour du politique et du monde des affaires, préjudiciable au pluralisme et donc à l’indépendance de la presse», a déclaré Ali Amar, directeur de publication du Desk, qui a supervisé la recherche, lors de la présentation des résultats de l’enquête, vendredi 17 novembre à Casablanca.
Au total, l’enquête s’est penchée sur 46 médias et les 36 entreprises qui se les partagent. A chaque type de support, son propriétaire. Ainsi, la télévision est la propriété de l’Etat, «aux côtés de la famille royale et de l’un des hommes d’affaires les plus fortunés». Le secteur de la radio, lui aussi dominé par l’Etat, est en revanche plus morcelé. Plusieurs petites entreprises émergeantes ces dernières années détiennent ce support.
«Un besoin de réforme»
«Le secteur de la presse est clairement divisé, entre une presse arabophone en plein essor - dont les propriétaires viennent en majorité du monde du journalisme - et une presse francophone qui connaît un franc déclin - dont les actionnaires principaux compte parmi les principaux visages de l’économie et des finances du pays», note le Desk. Enfin, la propriété des médias en ligne reste la plus fragmentée.
«Si les risques ne sont pas aussi grands pour le pluralisme des médias que pour d’autres pays, les résultats du MOM montrent toutefois un besoin de réforme», a relevé Michael Rediske, le directeur de RSF International. «La famille royale, des ministres ou d’autres puissants hommes d’affaires ne devraient pas être en mesure de contrôler certains secteurs clés des médias. Les médias marocains devraient pouvoir faire preuve de plus d’indépendance vis-à-vis du pouvoir politique et des intérêts économiques afin de jouer un meilleur rôle dans l’information de l’opinion publique», a-t-il recommandé.
Depuis 2015, le MOM a été réalisé en Colombie, au Cambodge, en Tunisie, en Turquie, en Ukraine, au Pérou, aux Philippines, en Mongolie, en Serbie, au Ghana et au Brésil. En plus du Maroc, le MOM sera également lancé cette année en Albanie et au Mexique.