La région de Marrakech foisonne de sites d’exception. Après Lalla Takerkoust, c’est au tour du site archéologique d’Aghmat d’être l'épisode de notre feuilleton hebdomadaire sur les sites touristiques. Situé à 30 kilomètres de la ville ocre, au pied du Haut-Atlas, dans la vallée de l’Ourika (Province d’Al Haouz), le lieu existait bien avant l’avènement de l’ère islamique au Maroc. Il représente un pan important de l’histoire Almoravide et Idrisside. Désormais, c’est un site d’archéologie médiévale important dans le royaume. Les vestiges du passé témoignent du rayonnement dont bénéficiait Aghmat.
Gorgé d’histoire du Moyen Age, le lieu s’étend sur une superficie de 3 ha. L’air est sec et vivifiant, un vent léger vient effleurer la peau de quelques touristes venus s’imprégner de l’histoire du royaume. La ville est l’une des plus anciennes du Maroc (fondée dans l’antiquité), pourtant elle est méconnue. Quelques vestiges subsistent, découverts grâce aux fouilles entamées en 2005 par Abdallah Fili, professeur de lettres à la faculté d’El Jadida et Ronald Messier, professeur de l’université Middle Tennessee State, dans le cadre d’une convention entre l’Institut national des sciences de l’archéologie et du patrimoine et l’Université Vanderbilt à Nashville (Tennessee).
Le hammam dans le site archéologique d'Aghmat. / Ph. Flickr
Une salle de repos avec une vasque octogonale, un palais (datant du 14ème siècle) qui ressemble à l’Alhambra de Grenade (pourtant construit bien avant) mais aussi une mosquée dont la salle de prière fait 500 mètres carrés ont été mis en relief grâce aux fouilles. Le hammam datant du Xème siècle, est le seul édifice de cette période resté debout. A ses côtés, le palais avec une salle d’apparat, deux corridors entourés de piliers et une grande cour trône au milieu. «Aghmat est au Moyen Age ce que Volubilis est à l’Antiquité», déclarait Abdallah Fili à Yabiladi lors d’une interview en 2014.
Carrefour puis capitale
La cité était un carrefour pour les régions alentours lors du Xème siècle. Les caravanes passaient par là, débordantes de victuailles. L’économie battait son plein. Les savants et érudits faisaient un arrêt à Aghmat, cité faisant office de melting pot culturel et économique. Un siècle plus tard, les Almoravides détiennent le pouvoir. Ils font d’Aghmat leur capitale en 1057, avant de construire Marrakech, puis d’y établir leur capitale en 1070.
Le mausolée de Mouatamid Ibn Abbad, dernier émir abbabide qui régnait à Séville se trouve sur le site. Connu pour sa poésie, il se rapproche de Youssef Ibn Tachfine (fondateur de Marrakech à la tête de l'empire Almoravide). Les choses s’enveniment quand les émirs andalous doivent combattre les Almoravides pour empêcher Séville d’être prise. Finalement les Almoravides emportent la ville espagnole et Mouatamid est fait prisonnier, puis installé à Aghmat. Le prince-poète meurt en 1095. Depuis son corps repose dans un mausolée dans la ville située à 30 kilomètres de Marrakech.
Une vue du palais au sein du site d'Aghmat. / Ph. DR
L’endroit a encore pleins de secrets à révéler, il dispose d’un potentiel indéniable en matière touristique et archéologique. Abdallah Fili en charge des fouilles sur le site s'enthousiasme :
«Nous pourrions construire une maison des chercheurs pour accueillir les doctorants, les étudiants. Nous pourrions aménager le site pour le rendre accessible aux touristes pour qu’il participe au développement local. Marrakech accueille des millions de touristes chaque année, le site d’Aghmat pourrait en accueillir 50 000 !»