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Grand Angle

Maroc : L'île de Mogador sert de garde-manger aux faucons d’Eléonore

L’ile de Mogador ou quand les faucons d’Eléonore trouvent des lieux sûrs pour conserver leur nourriture. Et celle-ci n’est autre que des oiseaux capturés et depuis peu gardés vivants jusqu’à leur consommation. Une découverte qui éblouit les chercheurs au Maroc et ailleurs. 

Publié
© Niall Corbet
Temps de lecture: 2'

Le faucon d’Eléonore est une espèce de rapace essentiellement migrateur. Il hiverne à Madagascar, mais entre avril et octobre, ces rapaces remontent vers le Maroc, plus précisément sur l’île de Mogador, où ils viennent se reproduire.

Pendant leur migration, les faucons d’Eléonore s’alimentent d’insectes. Mais une fois sur l’ile marocaine, ils entament la préparation de leur reproduction et sont de plus en plus à la recherche d’aliments solides. «Ils ont besoin de plus d’énergie. Ils commencent alors à chasser des oiseaux, que ce soient les passereaux, les martinets ou autres», explique à Yabiladi Abdeljebbar Qninba, enseignant à l’Université Mohammed V - Agdal qui dirige le groupe de scientifiques qui travaillent sur l’évolution des faucons d’Eléonore sur l’île de Mogador et dont les travaux ont déjà été publiés dans la revue française spécialisée Alauda.

En règle générale, ils capturent les oiseaux et les mettent près de leurs conjoints. «Des fois, on trouvait des oiseaux morts abandonnés sur l’île. Les faucons ne les consommaient plus parce qu’ils avaient trop séchés», affirme le scientifique.

Des proes gardées vivantes, une première

Mais afin d’éviter de perdre ainsi leurs proies, les faucons d’Eléonore sur l’île de Mogador ont récemment adopté une nouvelle pratique. «On a remarqué, certains faucons essayent de garder leurs proies vivantes le plus longtemps possible. Ils leurs arrachent les ailes ou les mettent entières dans des trous exigus pour qu’ils ne puissent pas s’enfuir», détaille M. Qninba. «Une telle chose n’a jamais été observée auparavant dans le monde, poursuit-il. On sait que les oiseaux gardent leurs proies mortes, mais jusque-là, jamais on n’avait vu des oiseaux conserver leurs proies vivantes».

Le groupe de chercheurs marocains est régulièrement contacté par leurs homologues européens, tout comme eux subjugués par la découverte. «C’est tellement inhabituel qu’ils veulent en parler dans leurs cercles de chercheurs», souligne M. Qninba dont les travaux sont menés dans le cadre de l’initiative Petites îles de Méditerranée (PIM) lancé par le Conservatoire du littoral français et qui a découlé sur un partenariat avec le Haut-Commissariat aux eaux et forêts pour la lutte contre la désertification. «Bien que l’île de Mogador ne soit pas dans la Méditerranée, je l’ai intégrée dans le projet parce qu’elle abrite deux espèces d’oiseaux méditerranéens, à savoir le faucon d’Eléonore et le goéland», explique le scientifique.

En 2014, la population de faucons d’Eléonore au Maroc comptait un peu plus de 900 couples. Ils ont franchi la barre des 1000 en 2015, selon le dernier recensement du groupe de chercheurs dirigé par Abdeljebbar Qninba. Il tient d’ailleurs à prévenir : «ce sont des chiffres à minima, car parfois, quelques oiseaux peuvent nous échapper. Toutefois, nous prenons toujours de précautions pour effectuer ce recensement à une période de l’année où la population de faucons est la plus stable».

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