Le maillot bleu, «c’est mon histoire, ma vie», confie Abdelatif Benazzi dans une interview accordée à La Provence revenant sur son expérience avec l'équipe de France de rugby à XV. «Quinze ans d’une vie, ce n’est pas anodin. Ça fait partie intégrante de moi, ce maillot symbolise beaucoup de choses pour moi», a-t-il ajouté.
Pour mémoire, le rugbyman marocain a intégré l’équipe de France en 1990. Sa carrière a été couronnée par un poste de capitaine en 1997, trois participations aux coupes du monde en 1991, 1995 et 1999, avant qu’il ne prenne sa retraite en 1999. Ce qu’il retient de son passage à la sélection nationale, c’est l’accent mis sur «les valeurs humaines», lesquelles - dit-il - prévalent en rugby. «On ne pense pas à notre race ou à notre personnalité, on est rassemblés autour de certaines valeurs communes comme la victoire et le partage», explique l'ex-champion.
Aujourd’hui âgé de 46 ans, ce natif d’Oujda se souvient d’ailleurs qu’il a disputé son premier match avec les Bleus alors qu’il n’était pas encore naturalisé français. «Au bout de ma première année à Agen, on arrive en finale contre le Racing. Après le match, le grand Jacques Fouroux (alors sélectionneur) entre dans le vestiaire et me dit : "Abdelatif, prends des affaires, tu viens avec nous en Australie (pour la tournée estivale)". Or j’étais marocain !», explique-t-il.
«Ce n’était ni un déshonneur, ni une trahison envers le Maroc»
Interrogé sur la promptitude avec laquelle il a accepté de rejoindre les Tricolores, Benazzi affirme que pour lui «c’était une évidence». «J’aime le sport, j’étais porté par la passion», confie-t-il.
L’ancien athlète avait disputé quelques matchs amicaux sous les couleurs du Royaume chérifien le dernier datait d’ailleurs de quelques mois avant sa sélection. Mais il ne s’était pas posé de question. «Ce n’était ni un déshonneur, ni une trahison envers ma patrie d’origine, j’étais porté par ma passion. La France m’offrait la possibilité de progresser si je m’en donnais les moyens. Elle m’a ouvert une porte, je devais saisir ma chance», explique-t-il.
Quelques années plus tard, ce Marocain devenait le premier français d'origine étrangère à occuper le poste de capitaine de l’équipe de France. D’après lui, il s’est tellement «immergé» dans la culture française que beaucoup et lui-même parfois «oublient» qu’il est d’origine étrangère. Son brillant parcours avec les XV de France lui ont valu plusieurs distinctions. D’abord en mars 2000, quand il reçoit les insignes de chevalier de la Légion d’honneur des mains de la ministre de l’Emploi et la solidarité de l’époque, Martine Aubry. Puis une fonction au Haut Conseil à l’intégration.
Dans le cœur des Marocains, il reste comme l’une des figures, sinon la figure emblématique du rugby nationale, même si celui-ci peine à décoller. Dans un entretien avec Jeune Afrique en 2010, Abdelatif Bennazi disait que ce serait «avec grand plaisir» qu'il apporterait son aide à la Fédération marocaine si la possibilité lui était donnée un jour. Mais il semble depuis lors que celle-ci n’ait toujours pas fait appel à l’ancien champion.