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Grand Angle

Les exportations de phosphates ne représentent plus le pétrole du Maroc

L’optimisme affiché en début d’année par l’OCP et les autorités marocaines quant aux ventes de phosphates et dérivées semble avoir du mal  à faire face à la réalité des chiffres. Et pour cause, ce secteur est désormais dépassé par ceux de l'automobile et de l'agriculture notamment, selon les chiffres de l'office des changes pour le 1er semestre. Simple mauvaise passe conjoncturelle ou transition profonde de l'économie marocaine ?

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Les exportations de phosphates ne sont plus la locomotive des échanges extérieurs marocains. C’est en tout cas ce que porte à croire les statistiques du commerce extérieur au titre de premier semestre 2014 fraîchement publié par l’Office des Changes.

-12,7% Phosphates VS +35,6% Automobile

Il est vrai qu’au cours des six premiers mois de l’année, les ventes marocaines à l’étranger ont globalement progressé de 7,4%. Mais contrairement aux années antérieures, les exportations de phosphates ne sont pas à la base de cette progression, car elles ont chuté de 12% à 17,56 millions de dirhams contre 19,984 millions à la même période l’an dernier. Et le fait est d’autant plus flagrant que hors phosphates et dérivés, les exportations affichent une hausse de 12,7%. «Cette évolution est [plutôt] imputable à la performance des exportations des nouveaux secteurs et à la reprise des ventes des autres secteurs, notamment le secteur textile et cuir», explique l’Office.

En effet, les ventes du secteur automobile ont surperformé en augmentant de 35,6% à plus de 21 milliards de dirhams, grâce à la progression des expéditions de la production automobile (+87,4%) et celles du segment câblage. A noter que la production dans ce secteur a été largement boostée par le lancement de la seconde ligne de l’usine Renault à Tanger. Et vu les ambitions affichées par le constructeur français, il faudra s'attendre à de meilleures performances encore dans les années à venir.

La baisse des phosphates poursuit la tendance de 2013

Par ailleurs, la première moitié de l’année a été marquée par la reprise du textile et cuir (+4%). Sans parler de l’agriculture et l’agro-alimentaire qui ont grimpé de 2,7%, principalement grâce aux exportations d’agrumes et primeurs.

Bref, tous les secteurs sont en hausse, sauf les phosphates. L’Office des changes n’a pas livré de détails sur les raisons d’une telle contre-performance, certainement parce qu’elles sont connues. Car cette année, les ventes à l’étranger de ces produits, dont le Maroc est le premier producteur au monde, ne font que suivre la tendance de l’an dernier. Déjà 2012 annonçait la couleur, avec une baisse 0,1% des exportations de phosphates. A ce moment, le fait était encore négligeable. Mais en 2013, ces ventes ont dégringolé de 22,9%, en raison de la chute des cours sur le marché international. Il est vrai qu’en début d’année les cours sont légèrement repartis à la hausse, mais la courbe s’est à nouveau inclinée à partir de fin mai dernier.

De plus, le Maroc doit dorénavant faire face à la concurrence saoudienne, laquelle n’est pas à prendre à la légère, car le pays pétrolier nourrit de grosses ambitions. Ils ont d’ailleurs un avantage non négligeable : les ressources naturelles en gaz, l’un des entrants les plus importants de l’industrie phosphatée, quand le Maroc dépend des importations. Déjà, la livraison de 22 000 tonnes d’engrais au Kenya (un client historique de l’OCP) en janvier dernier et la proximité de l’Arabie saoudite avec l’Inde (premier marché de consommation des phosphates) suscitaient des inquiétudes.

2014, confirmation du «détrônage» des phosphates ?

Après avoir essuyé de grosses pertes l’an dernier, l’Office chérifien des phosphates (OCP) s’attendait à une hausse de la demande mondiale à partir de 2014, en raison notamment de l’augmentation des superficies des plantations dans plusieurs régions du monde, notamment en Amérique latine. Ce qui devrait augmenter la demande en engrais. Mais il semble que les choses prennent plus de temps que prévu. Entre temps, le poids du secteur dans l’économie est de plus en plus allégé. En 2010, les phosphates et dérivées représentaient 3,5% du PIB, avec les contre-performances qui s’enchaînent, cette part a diminué en 2013 et pourrait encore diminuer cette année.

Pourtant, même Bank Al Maghrib avait basé ses prévisions de croissance pour 2014, entre autres, sur l’évolution des ventes de phosphates. Mais à l’allure où vont les choses, il faudra plutôt compter sur l’automobile et les autres secteurs. A moins que l’on assiste à une reprise spectaculaire des activités internationales de l’OCP.

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