Le Maroc a-t-il commencé la construction d’une nouvelle route pour relier Es-Smara à la Mauritanie ? Ce projet a été révélé, pour la première fois en septembre 2018, par l’ancien ministre de l’Equipement et des transports, Abdelkader Amara, dans des déclarations à la presse lors d’une visite à la région de Laâyoune-Sakia El Hamra. Une annonce faite, pour rappel, quelques semaines après l’ouverture du passage frontalier Tindouf-Zouerate, par les ministres de l’Intérieur de l’Algérie et de la Mauritanie.
Contactée par Yabiladi, une source proche du dossier confirme le début des travaux. «La route doit relier Amgala à la Mauritanie. Les pelleteuses des Forces armées royales (FAR) ont commencé les opérations de ratissage du lieu pour préparer la prochaine phase du projet», précise-t-elle.
La réalisation du nouveau tronçon routier était au menu de la réunion du 15 février, entre le général de corps d’armée, inspecteur général des FAR et commandant la Zone Sud et le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies et chef de la MINURSO, Alexander Ivanko. «Le lieu de la route accueille, en effet, un Team-Site de la MINURSO. La partie marocaine souhaite que ce point d’observation des casques bleus soit déplacé», précise notre interlocuteur.
Réduire la zone tampon
Cette route, une fois réalisée, marquera un tournant dans l’Histoire du différend régional. Elle permettra au Maroc de réduire l’étendue de la zone tampon et de limiter, ainsi, les attaques du Polisario. Au lendemain de la conclusion du cessez-le-feu, le 26 septembre 1991, le roi Hassan II avait laissé à la surveillance de la MINURSO des terres situées à l’Est du Mur des Sables.
Néanmoins, la mission onusienne a prouvé son incapacité à imposer sa loi sur le terrain. Le Polisario avait fait de toute la zone cédée des «territoires libérés», où il organisait, au grand dam du Maroc, des parades militaires et recevait des délégations étrangères dans la localité de Bir Lahlou, considérée comme sa capitale administrative. Un ordre qui a longtemps prévalu jusqu’à la libération du passage d’El Guerguerate par les FAR, le 13 novembre 2020, et l'entrée en jeu des drônes pour repousser les attaques du Polisario.
Cette nouvelle route ne pourrait voir le jour qu’avec l’approbation des plus hautes autorités de Nouakchott, d’autant qu’elle engage la Mauritanie à assurer la sécurité de ses usagers. Ceci mettrait le voisin du sud dans une situation embarrassante face au Polisario et à l’Algérie, surtout que la politique du président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani est basée sur le maintien d’un équilibre fragile entre Rabat et Alger.
La semaine dernière, le ministre mauritanien de l’Equipement, Mohamed Aly Ould Sidi Mohamed, a abordé à Rabat, avec son homologue marocain, Nizar Baraka, le dossier des routes entre les deux pays.
Pour l’heure, le Polisario n’a pas encore saisi l’ONU au sujet de ce projet. De son côté, l’Algérie n’a pas porté le dossier au Conseil de sécurité. Pour rappel, en janvier, Brahim Ghali avait alerté sur des «comportements imprudents et de mesures aux conséquences incalculables de l’ennemi marocain».
Le représentant permanent du royaume auprès des Nations unies, l’ambassadeur Omar Hilale, avait pour sa part exprimé, en octobre 2022, la disposition du Maroc «à revenir à la situation antérieure juridique, spatiale et sur le terrain» qui prévalait avant le cessez-le feu de 1991. Un accord que le Polisario avait violé, le 13 novembre 2020, en lançant sa «guerre» contre le Maroc.