Présentateur vedette de BFMTV, le journaliste franco-marocain Rachid M’barki n’est plus apparu à l’écran, depuis mi-janvier. Jeudi 2 février, des médias français ont révélé que la chaîne l’avait mis en «dispense d’activité», à cause de la diffusion d’images et de propos dans le Journal de la nuit, sans validation habituelle. Une dizaine de contenus ont été épinglés dans des sujets liés au Maroc, mais aussi au Soudan, à la Russie et au Qatar, selon Politico, citant des sources impliquées dans l’enquête.
En effet, BFMTV a lancé un audit interne pour identifier l’ensemble des contenus qui n’ont pas suivi les circuits de validation habituelle de la chaîne. La chaîne soupçonne même «une ou plusieurs opérations d’influence dont l’origine n’a pas été officiellement identifiée». «Des auditions ont notamment été lancées auprès des collègues du présentateur Rachid M’Barki», ajoute la même source. Des membres de la rédaction ont songé notamment à la diffusion d’un reportage à propos du Forum économique de Dakhla, ayant réuni des investisseurs espagnols en juin 2022.
L’expression «Sahara marocain» à l’antenne ne passe pas
Abordant le sujet pendant le Journal de la nuit, le présentateur s’est référé au «réchauffement des relations diplomatiques» entre le Maroc et l’Espagne, facilité par la «reconnaissance espagnole du Sahara marocain» (sic). En France, beaucoup de médias font référence à la région par l’expression «Sahara occidental». Ce passage a fait tiquer, surtout dans le contexte de la crise diplomatique entre le Maroc et l’Algérie, ou encore entre le Maroc et la France. L’été dernier, Paris a d’ailleurs été appelée par Rabat à sortir de sa position mi-figue, mi-raisin au sujet de la souveraineté marocaine sur le Sahara.
BFM TV: Forum Maroc-Espagne a La ville du Dakhla au sud du Royaume du Maroc. pic.twitter.com/CXa9ihvN09
— Naama MAOULAININE ?? النعمة ماء العينين (@NMalainin) June 22, 2022
Auprès du site Politico, Rachid M’barki a confirmé avoir «utilisé des infos qui [lui] venaient d’informateurs» et qui n’avaient «pas forcément suivi le cursus habituel de la rédaction». En revanche, il a nié le caractère intentionnel d’ingérence. Dans ce sens, il a soutenu que les informations «étaient toutes réelles et vérifiées». «Je fais mon métier (…) Je n’écarte rien, peut-être que je me suis fait avoir, je n’avais pas l’impression que c’était le cas ou que je participais à une opération de je ne sais quoi sinon je ne l’aurais pas fait», a-t-il déclaré au média. Le Parisien ajoute que ces informations ont semblé «intéressantes» à donner aux téléspectateurs, selon le journaliste.
Officiellement, la direction de BFMTV ne se prononce pas sur une éventuelle ingérence étrangère. Pour autant, elle envisage «toutes les mesures à la fois juridiques, judiciaires, individuelles et d’organisation si nécessaire, selon les résultats de cette enquête», selon Hervé Beroud, contacté par Politico. Pour l’heure, l’ambassade du Maroc en France n’a pas réagi aux hypothèses avancées par les médias français.
Le journaliste épinglé pour sa présence à la Fête du trône
En attendant, ces derniers suggèrent les possibilités les plus absurdes, remontant même à des entretiens donnés par Rachid M’barki à des médias marocains, en 2019. En juillet de cette année, le journaliste était invité à la Fête du trône au Maroc, célébrant le 20e anniversaire du règne de Mohammed VI.
L’animateur apparaît dans une interview sur Le360, auprès duquel il évoque son rapport à son pays d’origine. Sur son travail de rapprochement entre ses deux pays, dans le cadre associatif, Rachid M’barki a déclaré préférer rester dans la discrétion. «J’essaye d’agir à ma manière à mon petit niveau pour faire briller le Maroc», a-t-il indiqué.
Ces déclarations pourraient paraître anodines, venant de surcroît d’un journaliste, si son souci est de bien distinguer sa qualité professionnelle de son action au sein d’ONGs et de la société civile. Pour des médias français, cette déclaration pourrait être liée aux soupçons actuellement objet de l’audit interne à BFMTV.
Rachid M’Barki dément les accusation auprès du Parisien en les qualifiant de «fantasme». En interne, une de ses collègues, citées par le journal, lui reproche de s’être «pris un petit billet pour faire passer des infos». Ambiance.