Le 6 avril, le porte-parole de la Direction générale de sûreté nationale révélait que les renseignements marocains ont transmis aux Français des informations précises sur un projet d’opération terroriste visant une église à Montpellier. Une communication qui intervient seulement deux jours après que les autorités françaises aient interpellé cinq femmes à Béziers, dénotant ainsi une volonté du Maroc de rendre public son rôle dans l’avortement du projet terroriste. La Direction générale de la surveillance du territoire (DGST) n’a pas hésité à réagir face à l'invisibilisation des renseignements marocains par les Français dans l’arrestation du groupe de femmes radicalisées.
Cette réaction rapide des sécuritaires marocains, qui plus est par une voix officielle, ne surprend pas. Fin janvier, et après quelques jours de patience, le directeur général du Bureau central d’investigation judiciaire (BCIJ), était sorti de sa discrétion pour révéler que la DGST a fourni des informations précieuses ayant permis au FBI et à la CIA d’interpeller, le 19 janvier, un soldat américain, Cole James Bridges, converti à l’islam qui projetait de commettre un attentat au nom de Daesh.
Une rupture avec la ligne politique suivie auparavant
La sortie de Habboub Cherkaoui a eu l’effet escompté. Le 9 février, le FBI et la CIA remerciaient les services d’Abdellatif Hammouchi et saluaient «la coopération et l'important soutien apporté par la Direction générale de la surveillance du territoire, notamment les renseignements précis qui ont été fournis en temps opportun, et qui ont permis de contribuer à la neutralisation du dangereux terroriste».
Avec les Français, la reconnaissance et les remerciements officiels tardent à parvenir au bureau de Hammouchi. Ce jeudi 9 avril, une source proche de l’enquête a seulement souligné auprès de l’AFP la «coopération particulièrement dense et très confiante» avec le Maroc. Pour mémoire, l’ancien président François Hollande avait remercié le roi Mohammed VI, le 20 novembre 2015, pour l’ «assistance efficace» apportée par le Maroc dans la localisation du lieu de cachette du cerveau des attentats de Paris du 13 novembre 2015, Abdelhamid Abaaoud, dans un appartement à Saint-Denis.
Cette communication de la part du Maroc sur ses interventions hors de ses frontières marque en effet une rupture avec la ligne suivie auparavant par ses renseignements. En effet, ce n’est qu’en octobre 2014 à l’occasion d’une conférence organisée au siège du Conseil de sécurité sur l'expérience marocaine pour combattre le terrorisme, que le chef de la Direction générale des études et de la documentation (DGED), Yassine Mansouri, révélait que ses services avaient permis, en janvier 2010, à la police danoise de déjouer un complot, orchestré par Al Qaida, visant à assassiner le caricaturiste Kurt Westergaard, auteur en 2005 des controversées caricatures du prophète Mohammed.
La lutte contre les groupes terroristes est désormais une carte entre les mains du royaume pour défendre ses intérêts et arracher des concessions de la part des puissances mondiales, sachant qu’aucun Etat n’est à l’abri de la menace terroriste.