L’alerte a été donnée cette semaine par une bénévole de l’association «La Tribu des Quat'pattes», basée à Rabat. Dimanche au Chellah, cinq chiens pourtant vaccinés contre la rage ont été empoisonnés et leurs cadavres transportés par une société chargée de la collecte des déchets dans la capitale.
«Deux amis m’ont contacté dimanche pour m’informer qu’ils ont vu un employé de cette société en train de traîner un chien par les pattes. De loin, ils ne savaient pas que le chien était mort et ne découvrent cela qu’une fois proches du lieu», confie ce lundi à Yabiladi cette bénévole, indignée et remontée.
La Tribu des Quat'pattes s’occupe, en effet, des chats errants à l’intérieur du Chellah et a mené, en début d'année, une campagne visant à vacciner les chiens de cette zone contre la rage. «C’était en février et en mars. Nous avions payé un vétérinaire qui s’était rendu sur place pour effectuer cette opération pour ces chiens, dont certains sont sur place depuis deux ans», rappelle-t-elle.
«Mort-aux-rats» pour se débarrasser des chiens pourtant vaccinés
Celle-ci soupçonne que des responsables des autorités locales : «Je pense qu’ils ont utilisé le mort-aux-rats puisque les chiens n’étaient pas morts sur le champ mais ont agonisé pendant 24h. Ces chiens sont morts d’une façon atroce.»
Cette militante pour les droits des animaux s’indigne aussi face à cette campagne menée dans un lieu public, «fréquenté par les habitants qui viennent avec leurs enfants se promener ou faire des pique-niques». «Ces chiens auraient pu transporter la nourriture empoisonnée sur la pelouse, ce qui met en danger aussi la santé des humains», dénonce-t-elle.
«Hier soir, j’ai appris qu’un autre chien est mort, donc le poison a été posé à nouveau. Un autre animal était déjà malade. Je pense que nous l’emmènerons voir un vétérinaire. Et ce n’est malheureusement pas une première.»
En effet, notre source indique avoir appris les autorités locales auraient procédé de la même sorte à proximité du marché de gros à Akkari. «Nous avons contacté le Bureau communal d'hygiène de Rabat, dont les responsables affirment ne pas être au courant et qu’ils n’ont plus le droit de procéder de la sorte. A mon avis, les autorités de chaque arrondissement auraient pris le dossier en main et en plus de l’atrocité de la mesure, ce ne sont pas des personnes habilitées», rapporte-t-elle.
Stériliser au lien d’abattre ou empoisonner
Cette situation rend «difficile» la mission de cette ONG qui opère à Rabat depuis quelques années. «Nous ne savons plus à qui s’adresser pour que les autorités arrêtent de précéder ainsi. Nous n’arrivons pas à trouver d’interlocuteur», dénonce notre interlocutrice.
«Nous travaillons avec des citoyens sur la sensibilisation et parfois ce sont les habitants qui vaccinent, stérilisent et prennent soin de ces chiens. Seulement, il suffit qu’une seule personne déclare être dérangée par ces animaux pour qu’on vienne les tuer.»
L’activiste reconnait un nombre important de chiens errants dans la capitale. «Il y en a tellement que même si on tue un, trois autres viendront à sa place. Nous en sommes conscients et nous en avons 250 dans notre refuge qui ne peut en accueillir plus», ajoute-t-elle. Et d’appeler à «travailler quartier par quartier pour stériliser, vacciner et prendre soin de ces chiens». «Une fois ces chiens stérilisés, leur nombre baissera car l'espérance de vie d’un chiant errant est limité. D’ici trois ans, le nombre diminuera forcément», recommande-t-elle.
«L’empoisonnement des animaux n’est ni interdit ni accepté, nous n’avons pas de loi et nous ne pouvons déposer de plaintes selon nos avocats qui considèrent qu’aucun juge n’acceptera des requêtes pour maltraitance sans disposer de textes sur lesquels il peut s’appuyer», conclut-elle avec amertume.
Rabat n’est pas la seule ville touchée par ce fléau. L'été 2019, des campagnes d’abattages de chiens errants avaient scandalisé les ONG de protection animale. Les autorités, elles, brandissent encore leur volonté de diminuer les cas de rage pour expliquer ces campagnes.