Un rapport condamne la politique d'immigration 'choisie'
Les quotas d'immigrés prônés par le gouvernement et Nicolas Sarkozy sont jugés "irréalisables et sans intérêt" dans un rapport officiel qu'une commission doit remettre vendredi au ministre de l'Immigration Brice Hortefeux, rapport salué par l'opposition socialiste. Ce document dévoilé dans Libération et le Figaro, rédigé par une commission présidée par Pierre Mazeaud, ex-président du Conseil constitutionnel et ex-élu RPR, souligne que les quotas d'immigration n'existent dans aucun pays européen, contrairement à ce qu'affirmait Nicolas Sarkozy en septembre 2007. Le quota, qualifié de "fixation unilatérale et opportuniste de contingents d'entrées", se heurte à d'incontournables obstacles juridiques, dit la commission, qui invite unanimement "les pouvoirs publics à ne pas s'engager dans cette voie". Le gouvernement n'a pas réagi dans l'immédiat. Le parti socialiste estime que le rapport montre qu'à "la vision défensive et répressive de la droite, il faut substituer une approche positive de la question autour de la notion d'immigration partagée". Le PS définit cette notion par la "responsabilité des immigrés, la fermeté accrue envers les filières et les employeurs de clandestins, la relance du co-développement". Le rapport Mazeaud avait été demandé le 30 janvier à un groupe de 13 "Sages" pour réfléchir au cadre de la politique voulue par Nicolas Sarkozy, qui dit vouloir instaurer un chiffre maximum d'immigrés admissibles annuellement en France, par profession et par région du monde. La commission rejette l'idée de quotas, mais aussi celle d'une réforme des juridictions et donc d'une révision de la Constitution. Le traitement du contentieux lié à l'immigration est actuellement partagé entre les juridictions administratives (pour la régularité des expulsions) et les instances judiciaires ordinaires (qui statuent sur le maintien en rétention). Leur regroupement est jugé couteux et inutile par la commission.
La commission conclut qu'"une politique de contingents migratoires limitatifs serait sans utilité réelle en matière d'immigration de travail, inefficace contre l'immigration irrégulière". Diminuer l'immigration au titre du regroupement familial est impossible légalement puisque le droit à vivre en famille est considéré comme absolu au niveau international, notamment dans la Convention européenne des droits de l'homme. Equilibrer, comme le souhaite le président Sarkozy, les flux en faveur de l'immigration économique, supposerait donc une hausse de l'immigration de travail dans des proportions inenvisageables, dit la commission. Par ailleurs, choisir selon les régions du monde est contraire au principe d'égalité devant la loi, souligne la commission. Les quotas risqueraient par ailleurs d'envoyer paradoxalement un message laissant penser que la France ouvre ses portes et donc avoir un "effet incitatif", estime-t-elle. Selon Libération, elle rappelle aussi que le problème est forcément européen - un visa Schengen permettant une libre circulation dans les pays de la zone - et suggère une politique alternative "inspirée par la transparence, la simplicité et la solidarité", plutôt que des remèdes "spectaculaires mais illusoires". Plusieurs centaines de milliers d'étrangers en situation irrégulière vivent en France, selon des estimations officielles, et le gouvernement actuel a mis en place des objectifs chiffrés d'expulsion (26.000 pour 2008), ainsi que des mesures controversées, dont la possibilité de recours à des tests ADN pour vérifier la filiation de candidats à l'immigration. Cependant, après une grève de sans-papiers salariés dans la restauration parisienne, soutenue par le patronat, les préfectures ont accepté récemment de régulariser, après des examens "au cas par cas", plusieurs centaines de personnes. Lundi 07 Juillet 2008