Il y a moins d'une semaine c'était Sebta. Hier et quelques semaines plus tôt c'était Mellilia. Rien, ni la politique contre l'immigration clandestine, ni les accords avec l'Union Européenne , ni les balles ne peuvent faire reculer ces milliers de subsahariens qui prennent d'assaut les murailles entre le monde riche et le monde pauvre. L'horreur économique dand toute sa misérable splendeur. Après avoir fait des milliers de kilomètres dans des conditions inhumaines, après s'être cachés durant des semaines dans les forêts marocaines, attendus les signaux de la pire Camora de l'Histoire depuis la traîte des noirs, ces femmes et ces hommes semblent n'avoir plus rien à perdre. De ce côté -ci de la méditerranée ils sont de plus en plus nombreux à être reconduits aux frontières, de l'autre côté, ils sont parqués comme du bétail, lorsqu'on ne leur tire pas dessus.
Terribles les images de ces dernières semaines. Les victimes n'ont pas été emportés par la mer, mais tuées alors qu'elles tentaient de franchir par la force les fils barbelés qui séparent le Maroc et le préside occuppé par l'Espagne, Sebta. Ces cadavres, ces blessés sont ce que nous aurons vu de pire ces dernières années. Parce qu'ils nous rappellent que la misère est la pire des armes de destruction massive.
Rien ni personne ne pourra jamais empêcher un Homme de tenter de vivre mieux. Car c'est un droit de l'Homme. Aucune loi ne pourra non plus empêcher l'Homme de circuler librement parce qu'il s'agit d'un droit de l'Homme.
Les quotas, les accords bilatéraux, les charters, les fiches biométriques...tout cela paraît bien dérisoire par rapport à la force de "frappe" de la misère. Jusqu'il y a peu nous ne connaissions que notre propre misère au Maroc, celle d'une jeunesse prête à mourir en mer pour atteindre les côtes espagnoles. Mais, à côté de ces milliers de subsahariens venus d'une partie du monde encore touchée par les guerres civiles, ravagée par la sécheresse et les criquets pélerins, nos candidats à l'immigration clandestine, "ne pèsent pas lourd". Les détresses ne sont pas les mêmes: les subsahariens vivent dans une véritable souffrance humaine, économique et politique, les marocains souffrent de l'injustice sociale mais aussi de ce mythe de l'Ailleurs qui est "forcément" meilleur.
Depuis quelques années notre pays découvre une nouvelle misère, celle de son sud, encore plus pauvre. Habitués au tourisme du nord, donc, riche, les marocains ont semble-t-il encore du mal à accepter cette immigration "noire" plus pauvre encore. Dans les rues d'Oujda, mais aussi de Rabat et des villes proches de Sebta et Mellilia, des jeunes gens fatigués, au regard absent, tendent la main. Demandent parfois de l'argent, souvent plutôt de quoi manger. C'est à vous arracher le coeur. Ils ne font de mal à personne, sauf à eux-mêmes.
A Mellilia cette nuit, des centaines de subsahariens ont tenté de franchir la muraille de fil barbelés. Certains sont passés de l'autre côté. Les autres attendront la prochaine occasion...En attendant ils seront au Maroc et nous devons les respecter et non pas les mépriser comme cela aura été le cas dernièrement dans une certaine presse. Nous devons prouver au monde que même pauvres, nous sommes encore capables de donner, de partager, d'aimer ce prochain qui nous ressemble tant.
Misère Humaine Par Amina Talhimet, lundi 3 octobre 2005 à 09:59 // Maroc // #54 // rss
Modifié 1 fois. Dernière modification le 09/10/05 14:34 par jilali.
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