YOUCEF HADJI UN COMPATRIOTE MAROCAIN A LA POINTE DU COMBAT DE SOLIDARITE AVEC LE PEUPLE PALESTINIEN ----------------------------------------------------------------------------------------------------
EN DIRECT DE DARNA NAPLOUSE : « TOUS LES MATINS J’AI L’IMPRESSION DE VIVRE UN CAUCHEMAR ÉVEILLÉ » PAR YOUSSEF HAJI Publié le 9-04-2006
Youssef Haji, fondateur de la maison des Associations, Darna, à Naplouse nous envoie une nouvelle chronique, qui montre à quel point la situation s’aggrave actuellement pour les Palestiniens. La solidarité financière doit certes s’amplifier, mais plus que jamais elle doit s’accompagner d’une mobilisation politique afin de briser le silence et la complicité qui entourent cet étranglement du peuple palestinien. Cette mobilisation n’est pas toujours au rendez-vous en France malheureusement. Un sursaut est nécessaire. Si les directions sont défaillantes, les militants doivent prendre le relais.
« Ici tous les matins, j’ai l’impression de vivre un cauchemar éveillé : avant-hier, des tirs à l’arme lourde, ceux des Israéliens, et des ripostes très faibles, celles des Palestiniens. Dans le quartier Al Karioun de la vielle ville, à quelques mètres de la savonnerie d’Abou Rouss, les Jeeps se sont engouffrées pour arrêter à domicile deux jeunes filles à peine âgées de 17 ans. Motif : des informations sur une éventuelle préparation d’attentat.
Hier, à Ras El Amoud, de minuit jusqu’à 10 heures du matin, l‘armée a encerclé tout le quartier. Je n’arrive pas à partir au travail à Darna, alors qu’en face, des êtres humains se font bombarder. Je rage contre mon impuissance et celle de tous ces Naboulssi qui continuent, comme si rien ne se passait, de vaquer à leurs occupations. Est-ce là le prix à payer pour ne pas disparaître ?
Aujourd’hui 6 avril, à 3 heures du matin, la rue où se trouve mon logement, pas loin de la faculté de formation des professeurs des écoles, se retrouve éclairée comme en plein jour par les projecteurs. Un haut-parleur, dans un arabe estropié, hurle aux habitants de l’immeuble voisin de sortir. Puis c’est le bruit des grenades assourdissantes pour réveiller ceux qui dormiraient encore. Je jette un œil par la fenêtre, pour voir une rue noire de Jeeps et de soldats israéliens. Comme un gamin excité, le haut-parleur continue de cracher « J’ai dit tout le monde dehors, femmes comprises ». La brute sait qu’elle n’a pas besoin de préciser que l’ordre s’adresse aussi aux enfants, car ces derniers, affolés et éblouis par la lumière artificielle, s’accrochent spontanément aux robes de leurs mères. Tout le monde est maintenant en bas, en rangs dans la rue. A 6 heures, les tirs à l’arme lourde s’intensifient, rien ne leur répond, le puissant poursuit son monologue de mort. Les vitres de l’appartement vibrent, un bulldozer blindé arrive juste en face de chez moi, je crains le pire. A 8h30, il repart. Les enfants des immeubles voisins échappent à la vigilance des parents, et poursuivent le bulldozer à coups de pierre. A 9h, ils sont toujours là. Il faut bien que je me décide à partir pour Darna, alors je sors. Une équipe d’ambulanciers est là, à quelques mètres des Jeeps. Je ne sais s’il y a des morts et des blessés, ni combien. Je passe devant les soldats à l’abri dans leurs véhicules blindés, et descend sur le boulevard pour trouver un taxi collectif. Des gamins de 12 à 16 ans envoient des pierres sur une Jeep à l’arrêt. J’hésite un peu, quand un des enfants me fait signe de passer ; les pierres cessent de pleuvoir, je passe, et monte dans le premier taxi qui s’arrête. Je me rends compte que je suis réellement devenu un citoyen de Naplouse, impassible ou presque face au silence du monde et au vacarme des brutes.
Tayssir, l’informaticien de Darna, est revenu de son voyage avorté à Ramallah pour une formation. La raison en est simple : malgré sa cravate, son costume impeccable et sa coiffure de gentleman de la City de Londres, le soldat l’a refoulé car il a moins de 30 ans.
Les jeunes de moins de 30 ans sont interdits de sortie de Naplouse depuis 3 semaines.
"Même les jeunes avec autorisation, on les humilie. J’ai vu une jeune femme conduisant une voiture de la délégation de l‘Union Européenne longuement bloquée par une soldate et l’un de ses comparses. Ils rigolaient en la faisant attendre. La soldate fait tomber le papier d’autorisation dans une flaque de boue et d’eau ; elle rigole encore aux éclats puis rend le papier devenu chiffon à la conductrice qui pouvait repartir. Mais elle va certainement être arrêtée un kilomètre plus loin au check-point mobile de Bourin. Et il lui faudra utiliser toutes les langues de la création pour expliquer aux soldats pourquoi elle a osé salir le précieux laissez-passer émis par l’Etat d’Israël pour se déplacer dans son propre pays ».
Abou Jamil du camp d’Al Faraa, responsable de la vie associative du camp, est un enseignant comme ceux de ces images d’Epinal qui représentaient l’instit’ des campagnes françaises il y a un siècle. Il me téléphone pour m’informer qu’il ne peut plus faire les 15 km Al Faraa-Naplouse : trop d’humiliations, et la route a été fermée au passage des automobiles depuis deux semaines. Les villageois et les habitants de Tobas, Jenine, Badan, Assira,... doivent descendre de leurs voitures, escalader un tas de gravats et reprendre d’autres voitures sous l’oeil narquois des voyous israéliens. Comme réconfort, je l’assure que je viendrai à Al Faraa apporter les 50 uniformes offerts par Darna pour sa troupe de scouts.
Abou Jamil me déclare " Et au milieu de tout çà, on entend encore des gens qui discutent pour savoir si le sionisme est un équivalent de l’apartheid. Moi, je dis qu’il est un peu plus comme Kadima au centre de l’échiquier, c’est-à-dire entre l’apartheid et un nazisme relooké".
Voici le quotidien d’une ville prison nommée Naplouse. Raiid, jeune de Darna, me reprend : « Non Youssef, ce n’est pas une prison, mais une nouvelle forme de prison, où le geôlier n’assure ni alimentation, ni gestion quotidienne de l’institution. L’Autorité palestinienne, elle-même prisonnière, essaye d’assurer le quotidien (santé, éducation, travail, ...) et le geôlier fait ses entrées et sorties pour tabasser, humilier ou faire passer des citoyens d’une prison informelle à d’autres plus formelles. A mon avis, Abou Mazen aurait dû dissoudre l’Autorité quand on a vu, répercutées sur les télévisions, ces images de policiers en slip quittant la petite prison dans la prison de Jericho, mais sans sa démission nous savons au quotidien que notre statut est celui d’un prisonnier, trimant pour payer ses frais de détention".
Maher, père de 4 enfants dont un syndicaliste étudiant, me raconte : « A Naplouse, nous avons des rêves bizarres : faire naître des enfants ayant 30 ans dès l’accouchement, pour pouvoir passer le check-point, ou apprendre la détention de son fils activiste plutôt que de le récupérer mort ou paralysé après une incursion. Voilà, être en prison pour un jeune est mille fois mieux pour ses parents, car on sait au moins qu il est vivant. C’est absurde, mais réellement, c’est cela nos rêves.
Et en plus, il pleut aujourd’hui.
Femmes alignées par les soldats pendant leur incursion
*** Je répercute ici les nouvelles des actions de solidarité menées à l’étranger, pour dire aux Palestiniens qu’ils ne sont malgré tout pas seuls : le savon que les gens achètent malgré les petits problèmes de fabrication qu’il a récemment rencontrés ; le succès d’une opération vide-grenier dans un quartier populaire de Paris qui a permis de collecter 1.500 € pour les étudiants de Naplouse, les 350 euros de Marie-Jeanne et Sadiaa pour un étudiant et une jeune mère étudiante, les préparatifs pour le départ des jeunes participants à l’atelier écriture musicale à un concert à l’Opéra de Lille, et cette extraordinaire bouffée d’oxygène de savoir qu’une des principales fondations humanitaires françaises est intéressée par Darna, ou encore le projet de création d’une maison d’hébergement pour étudiants nécessiteux...
I. LES ASSOCIATIONS MEMBRES DE DARNA
Civil committee of Nablus, Palestinian Youth Union, Project Hope, Palestinian Vision, Tamer institute for community education, Local committee for rehabilitation/Askar, Sport clubs union of Nablus, Palestinian Woman Club, Asira Ashmalia Children Club, Multipurpose community resources centre, Sheikh Amr Arfat foundation, Boreen sport club, Madama sport club, Ourif sport club, Tell youth sport club, Kariuot woman Society, Nablus youth couucil, General union for the disabled, Burqa sport club, Asanabel woman culturel centre, Bothoor for development and cultur, Charitable society for development / Salem, Youth development society, International human support group, Young leaders forum, Palestinian group for free resources, Sarra sport club, Nablus youth club, Youth journalist forum, Youth counseling centre, Ktakit- children theater, Happy Childhood Club of Balata, NAHR ALOJA CHARITABALE ASSOCIATION, The Palestinian Society for Regional Studies, Masrahna, Al quadessyia Boy scouts group, National centre for music.
Nouvelles adhesions
Yafa Cultural center (Balata) Thalassemia Patients Friends Society Balat Women Program’s Center The social Forum Democracy Development and family affairs
Nombre d’associations membres de DARNA au 2 avil 2006 : 41
II. LES ACTIVITES DE DARNA
1.Projecteur sur des actions DARNA :
Kariout retrouve son sourire
Plusieurs jeunes du village, étudiants à l’université et membres de Darna, ont pris l’initiative d’organiser une journée de sensibilisation à l’amélioration du cadre de vie de ce village. 150 arbustes ont été plantés tout au long des rues du village et le petit cimitière a été néttoyé par les jeunes. Une centaine d’enfants ont participé à cette journée cloturée par un goûter géant. Kariout est ce village martyr enclavé entre colonies et routes de contournement.
Exposition des créations de l’atelier photos primitif.
Le Stynope est l’ancêtre des appareils photos. Patrick- Galais, photographe, a animé des ateliers avec les enfants du camp d’Al Faraa à l’invitation du Centre culturel français de Naplouse. A Darna nous avons exposé ses oeuvres. Les enfants ont pu acquérir un nouveau langage universel, celui de la photo. Avec patience, ils ont pu fabriquer leur propre appareil, une simple boite noire avec un trou... Parents et enfants étaient ravis de cette découverte, et Darna s’est ornée de dizaines de photos de nature, postures et lieux de vie ...une belle évasion de la réalite du camp de refugiés.
La ligne DARNA ECONOMIE SOLIDAIRE
Nous avons travaillé en début d’année sur la deuxième production de savon de DARNA. La livraison parvenue en France au début avril est composée de 20.000 savonnettes de 113g entièrement naturelles. Elles comprennent 72 % d’huile d’olive palestinienne et aucun produit pharmaceutique. A ce jour, le réseau Amis de Darna France assure la distribution de ce savon, nous avons plus que jamais besoin de votre aide pour acheter cette production 100 % palestinienne au profit des artisans palestiniens et des associations de Naplouse. Contacts commandes France : [email protected]
CENTRE NATIONAL DE LA MUSIQUE DE NAPLOUSE en tournée en France en juin / juillet 2006.
En 2003, alors que les chars israéliens défoncent rues, trottoirs et détruisent les monuments historiques de notre ville, un groupe de professeurs de musique et de musiciens a eu l’idée irréaliste de lever des barricades de sons, de notes de solfège, d’instruments de musique comme rempart devant la folie meurtrière de l’occupation.
Nous avons concrétisé ce rêve avec l’ouverture, dans des locaux exigus, du Centre National de la Musique de Naplouse (CNMP). Soixante élèves de six à dix huit ans s’inscrivent chaque année à nos cycles d’apprentissage musical. Le groupe qui viendra en France à l’invitation des Amis d’Al ROWWAD est un groupe de jeunes musiciens de Naplouse, sous la direction de Hassan DERIDI, l’un des fondateurs du centre et son directeur. Hassan DERIDI est aussi enseignant de la pratique du luth et de l’usage des musiques sur support numérique.
Les enfants de Naplouse seront à l’honneur à l’opéra de Lille : A Darna, on les appelle les filles. Elles sont 3 : Sarah, Fabienne et Cécile. Elles maîtrisent chant, flûte traversière, accordéon, contrebasse, violon. Elles sont les hôtes de Naplouse. Elles partagent leur temps entre les cours de musique à l’université et le centre national de musique, ainsi que des interventions dans l’annexe de DARNA avec des adolescents des camps de Askar, Balata et de la vielle ville. Le projet qu’elles portent est motivant :
Une création musicale et théâtrale pour l’Opéra de Lille. Les enfants accrochent et les adultes aussi. De Paris, le grand compositeur français d’origine grecque Georges Aperghis* accompagne cette création et lui donne une dimension universelle. Son oeuvre est ainsi résumée par Georges Aperghis lui-même : « faire musique de tout ».
* voir œuvres et biographie dans les moteurs de recherche.
2. Café net
Ce service s’améliore. L’arrivée de l’animateur internet fait du café net de Darna un lieu de formation apprécié par les associations de Naplouse.
*Une moyenne de 20 usagers par jour (étudiants, chercheurs, militants associatifs, ...).
* 12 cycles d’initiation à l’usage de l’ordinateur et du réseau net.
*1 cycle de formation au langage HTML
*1cycle de formation Photoshop.
*Récapitulatif usagers mois de février et mars : 800 Cycles formation : 142
3. Cuisine restaurant associatif
*Cuisine libre service : 1000
* Restaurant associatif : 85 repas
4. Service photocopies :
Les photocopies servent essentiellement aux travaux des associations et des étudiants, et secondairement à l’administration de DARNA.
5. Prêt d’ordinateurs portables (doctorants, professeur et responsables associatifs) : 6 ordinateurs. Durée moyenne du prêt : de 3 à 6 semaines.
III. Entraide
A) Projet en cours de réalisation grâce à votre soutien DARNA et BALATA WOMENPROGRAMS CENTER (BWC) Grâce au collectif Normandie Palestine qui a apporté 2.000 euros d’aide, le projet d’école pour 20 jeunes mères désireuses de passer le baccalauréat en candidates libres a pu se concrétiser avec un doublement des effectifs prévus. (voir nos précédents rapports). Nous cherchons encore un cofinancement solidaire pour cette action.
Cycles de formation professionnelle et soutien scolaire du MCRC : Ces actions du Centre Multiservice de Naplouse vielle ville (membre de DARNA) sont financées à hauteur de 10.000 euros par le Comité de Bienfaisance et de Secours aux Palestiniens.
Troupe de musique, chorale et danse du Centre l’Enfance Joyeuse et Darna : Un projet ambitieux sur un an qui va aboutir à la mise en place de cycles d’animations musicales et artistiques dans le camp de Balata, et à la création d’un spectacle autour des poèmes de Mahmoud Darwish et Fadoui Toukan. L’AFPS St Etienne se propose, après un séjour de la présidente de l’association à Balata, de soutenir ce projet à hauteur de 6.000 euros. La première tranche du financement de 2500 euros a été versée. Cela a permis le démarrage du projet, nous avons aussi reçu la deuxième tranche de 1.500 euros. Grâce a votre aide, plus de 40 enfants assistent a ces ateliers. Clubs sportifs : Nous avons plusieurs demandes de clubs sportifs : participation à des compétitions, recherche de donateurs (ballons, tenues, ...), accueil de sportifs et entraîneurs dans presque toutes les disciplines.
Scouts d’ALKADISSIYA : Cette troupe de scouts du camp de réfugiés d Al Faraa est réellement une école de citoyenneté, nombreux sont les jeunes Naboulssis filles et garçons qui ont pu s initier au travail associatifs grâce a cette troupe. Nous cherchons une association ou mouvement de scoutisme pour parrainer les scouts d’AL KADISSIYA , dans l immédiat nous cherchons la somme de 1.000 euros pour renouveler l’uniforme des scouts les plus nécessiteux.
Parrainage d’étudiants :
L’entraide se fait sur la base des besoins de l’étudiant et en contrepartie ce dernier assure des actions de volontariat pour la communauté (soutien scolaire, animation d’ateliers, ...) ; les besoins sont les suivants : Frais de scolarisation annuels par étudiant : 900 euros, frais de restauration annuels par étudiant : 288 euros (que nous intégrons dans les produits restaurant social). Chaque donateur recevra un rapport sur la scolarisation de son filleul et des correspondances relatant la vie au quotidien de l’étudiant.
A ce jour le don de Paola de 1000 euros permet la prise en charge de la deuxième tranche de l’inscription à l’université (360 euros) du jeune Etudiant ZAHER et de ses frais de transport de son village à l’université (75 euros) par mois. Vue la fermeture de la route d AL BADAN , nous avons décidé avec Zaher et son père de prendre une collocation a Naplouse .
Le deuxième don de 200 euros de Sadiaa a servi à payer le solde des frais de scolarité de Oukab (360 euro).
Les 150 euros de Marie-Jeanne ont servi à l’aide aux frais de scolarité d une mère étudiante dans le jeune mari travaille dans le service de la voirie de la ville de Naplouse .
Nous avons reçu la somme de 1.500 euro de l’association ARBP suite à une opération vide grenier dans le 13ème arrondissemnt de Paris. Cette somme, à la demande de cette association parisienne, sera consacrée à l’aide aux étudiants.