I_ La violation du Dahir portant loi n° 1.77.216 du 4 octobre 1977, instituant un Régime Collectif d’Allocation de Retraite pour les organismes publics ou semi-publics (RCAR). Rappelons que le RCAR, régime de retraite de base, à caractère obligatoire, s’applique impérativement à tous les organismes semi-publics y compris la CNCA. A partir de son entré en vigueur le 14 janvier 1978 la CNCA était devenue, par force de loi, assujettie à ce régime. Le Crédit Agricole est le seul établissement public, qui n’a pas affilié son personnel à ce régime en toute violation de la loi. Le RCAR, qui est constitué également d’un régime complémentaire pour les salaires dépassant le plafond annuellement fixé, assure un taux de couverture minimum de 90% du salaire. Pour éviter la contribution patronale de 12%, et le règlement de la validation des années de service antérieures exigée par ce régime, le Crédit agricole a dupé son personnel par une adhésion à la CIMR qui est un régime de retraite complémentaire conçu pour accompagner les régimes obligatoires de base. NB : Le Crédit Agricole a constitué une provision sous dénomination pécule (نظام القنوة), constitué de 1961 à 1985, correspond aux charges sociales, part patronale et salariale, destinée à faire adhérer le personnel à un régime de retraite de bas. Une partie importante de cette provision augmentée des produits de son placement a été détournée par le crédit agricole II_ La violation du Dahir portant loi n° 1-72-184 du 27 juillet 1972 relatif au régime de la CNSS tel que modifié et complété Rappelons les vérités qui sont à l’origine de notre exclusion de l’adhésion à la CNSS: • L’immatriculation à la CNSS de tout salarié quelque soit son âge, en tant que responsabilité et obligation légale, s’impose aussi bien au Crédit Agricole qu’à la CNSS. • La limite d’âge à l’immatriculation est réglementée par le Dahir n°1.81.314 du 11rajeb 1402 (6mai1982) qui précise, lorsque la durée restante de cotisation est insuffisante la limite d’âge de soixante ans, et non pas 49 ans et 6 mois est différée pour permettre au salarié d’atteindre les 3240 jours exigés pour bénéficier de la pension CNSS. (on peut ainsi continuer son activité au CAM ou ailleurs ou créer son entreprise). D'ailleurs, l'article 526 du code de commerce vient confirmer cette disposition. • L’adhésion partielle est désignée par les dispositions régissant la CNSS une Sous-déclaration, est considérée comme une fraude punie par la loi. • Le Président du gouvernement, conformément à la nouvelle constitution est à la fois Président du Conseil d’Administration de la CNSS et Président du Conseil de Surveillance du Crédit Agricole. De ce fait tout rejet de demande d’immatriculation doit être soumis à son arbitrage. Là encore le Crédit agricole n’a pas hésité d’utiliser les procédés insidieux par la conclusion d’une convention secrète datée du17 juin 2004 signée avec la CNSS, à notre insu, afin de garantir l’exclusion illégale de la couverture de la CNSS d’un millier de salariés. Cette convention n’a été découverte qu’en 2011. Au delà du caractère discriminatoire et anticonstitutionnel cette convention justifie et impute fallacieusement l’exclusion du personnel âgé de plus de 49 ans et 6 mois (à la date d’adhésion à la CNSS) à l’application de l’article 9 de la loi 15-99 portant réforme du Crédit Agricole. Loi dont toutes les dispositions contredisent de la manière la plus évidente cette fausse et trompeuse assertion. Et aucun paragraphe de ladite loi ne fait la moindre allusion à l’exclusion du personnel âgé de 50ans. (Il suffit de comparer les deux textes) : Article 2 de la convention : « Le crédit agricole, en application du dernier paragraphe de l’article 9 de la loi 15-99, fait immatriculer l’ensemble de ses salariés âgés de moins de 50 ans auprès de la CNSS et ce pour leur garantir le droit aux prestations prévues par le dahir n°1-72-184 du 27 juillet 1972 …..» L’article 9 de la loi 15-99 portant reforme du Crédit Agricole dit textuellement : « Le personnel en fonction à la Caisse nationale de crédit agricole, à la date d'entrée en vigueur de la loi, est transféré à la société Crédit agricole du Maroc. La situation conférée par le statut particulier de la société Crédit agricole du Maroc au personnel transféré ne saurait en aucun cas être moins favorable que celle détenue par les intéressés à la date de leur transfert. Les services effectués par ledit personnel à la Caisse nationale de crédit agricole sont considérés comme ayant été effectués au sein du Crédit agricole du Maroc. Nonobstant toutes dispositions contraires, le personnel transféré au Crédit agricole du Maroc continue à être affilié au régime des pensions et aux caisses (1) auxquelles il cotisait à la date d'entrée en vigueur de la présente loi. » Il est plus qu’évident que l’article 9 de la loi 15-99 ne vise qu’à préserver les acquis, et protège le personnel contre toute forme de discrimination. D’ailleurs les dispositions de l’article 79 du dahir portant loi n°1.72.184 garantissent le maintien des acquis dès lorsque le cumule des pensions avec celle prévue par la CNSS ne dépasse pas le salaire perçu par l’employé. III_ la violation du Dahir n° 1-03-221 du 11 novembres 2 003 portant promulgation de la loi n° 15-99 portant réforme du Crédit Agricole. En plus d’avoir travesti la loi 15-99 le Crédit agricole et la CNSS ont totalement ignoré le 2ème alinéa qui stipule que les services effectués à la CNCA sont considérés comme ayant été effectués au sein du Crédit agricole du Maroc. En vertu de cette loi le CAM et la CNSS étaient tenus de prendre en considération les années d’activité antérieures des employés âgés de plus de 49 ans, et de chercher à leur appliquer des dispositions particulières, eu égard à la spécificité de leur situation ,en soumettant le dossier au pouvoirs publics pour leur faire bénéficier de la validation forfaitaire de 2592 jours à l’instar des secteurs qui n’étaient pas soumis à la CNSS. (Le cas des agriculteurs et des salariés agricoles est un exemple éloquent) Le personnel de la CNCA était par ailleurs dépourvu de la retraite de base du RCAR que le législateur a prévue dans le cadre de la coordination entre les régimes de retraite en cas de changement de statut. Ce qui renforçait le dossier de personnel et arguait en sa faveur. La condition de 3240j est préconisée par le législateur pour les entreprises nouvelles. Or le Crédit Agricole en 2004 ainsi que ses employés étaient en activité depuis plusieurs dizaines d’années. Malheureusement les responsables du CAM étaient animés par le mépris envers les employés de l’ex- CNCA et par la volonté de les acculer au départ volontaire, au lieu de se préoccuper, au préalable, du respect de la réglementation en vigueur régissant les aspects sociaux des employés.
La CNCA était créée en 1961 en sa qualité d’institution financière spécialisée dont l’intervention était vouée exclusivement à l’accompagnement du monde rural en matière de financement. Son rôle était axé principalement sur la modernisation du secteur agricole et le relèvement de l’itinéraire technique des agriculteurs. L’activité bancaire était reléguée au second plan.
Cet objectif s’est traduit tout au long de son existence par une distribution des crédits adossés principalement à la production de garanties immobilières couvrant les risques engagés ou, à la limite, sécurisés par des cautions solidaires solvables. Les justificatifs de propriété constituaient un soubassement fiable à ces engagements jusqu’à la décennie 1980 où les déclarations de propriété furent admises en tant que patrimoine non justifié finançable notamment en faveur des usagers des Caisses Locales. Cet allégement des procédures visait l’intégration des petites exploitations dans le circuit du financement.
Le recouvrement des créances exigibles était assuré par les CRCA et CLCA en vertu du Dahir de 1935 relatif au recouvrement des créances publiques.
Les dépenses budgétaires étaient soumises au préalable au visa du CED du ministère des finances.
Les recrutements du personnel et l’évolution des carrières s’effectuaient conformément aux dispositions des statuts en vigueur à l’époque.
Le premier quinquennat de la décennie 90 s’est accompagné par une volonté manifeste de bancarisation de cette institution et par l’encouragement du financement de l’Agro-alimentaire. C’est cette période qui a connu des dépassements au niveau de certains dossiers soumis en son temps à la justice. Ce dérapage avait entaché l’intervention de cette institution et ce, sous l’effet d’une politique de recrutement par le haut et donc de la constitution d’un lobby monopolisant horizontalement les postes managériaux sensibles et incompatibles.
Un assainissement en profondeur fut engagé sous l’ère Ibrahimi où la rigueur, la mobilisation et les sacrifices consentis par le personnel avaient constitué un levier extra ordinaire pour le redressement de la situation.
En 2003, cette institution a été transformée en société anonyme avec un bouleversement de l’ensemble des outils de sa gestion et ce à tous les niveaux de la Banque.
Préparatifs préalables au changement en S.A:
Dès 2002, les motivations du changement imminent commençaient à prendre forme. Il a fallu casser le syndicalisme par le recours à des abus de pouvoir et diverses pressions perpétrés à l’encontre des syndicalistes (Intimidation, mutations abusives,…etc.). Parallèlement, on a assisté à la nomination par l’administration des représentants dits du personnel via des pratiques électorales falsifiées à tous les niveaux en transgression des règles les plus élémentaires en la matière. Ces « représentants » avaient pour prérogatives d’adhérer au nouveau règlement intérieur, de contrecarrer tout mouvement de protestation, bref, d’appliquer les instructions de l’administration. Le slogan adopté était axé sur la nécessité du redressement et de la « paix sociale » donc de la nécessité d’un sacrifice à consentir par le personnel. La contre partie c’est l’extraordinaire évolution de carrière de ces soit disant représentants et les avantages qui leur sont servis. En outre, un climat d’épouvante et de phobie fut injecté à tous les niveaux du CAM à travers des procédés administratifs variés qui a laissé la porte ouverte à la naissance d’un comportement au niveau du personnel caractérisé par au mutisme absolu vis-à-vis de la dilapidation des deniers de cette institution et des dépassements enregistrés.
Passage au statut de S.A :
A partir de 2003, le parlement a voté deux lois dont les répercussions sont graves et incalculables. D’abord la loi portant sur la transformation de la CNCA en S.A sous appellation CAM et par la suite l’adoption du code de recouvrement de ses créances. Par ce biais, le CAM a perdu tous les privilèges, y compris fiscaux, dont il avait toujours jouit et son personnel anciens a été projeté dans la sphère de la misère suite aux abus dont il était victime notamment par l’exclusion de 750 employés du bénéfice d’un régime de retraite de base.
Les limites inhérentes à ce changement :
Malheureusement, du fat même que les deniers de cette institution demeurent toujours publics, le nouveau statut du Crédit Agricole ne c’est pas accompagné de la mise en place de verrous de sécurité et des outils de contrôle de gestion nécessaires. Ainsi, les dépenses budgétaires ne sont engagées que sur le bon vouloir des dirigeants, les crédits sont accordés au niveau de commissions internes et les recouvrements mis en veilleuse depuis l’exclusion des CRCA et CLCA de l’exécution des tâches de poursuites. Dans les faits, depuis 2003, le CAM échappe à tout contrôle Etatique. Aucune intervention d’Audit n’a été enregistrée ni par l’IGF ni par la cour des comptes.
Par ailleurs, le statut de S.A se traduit ipso facto par un transfert en matière de juridictions compétentes puisque les actes de dépassements, de détournements et autres jadis relevant de la Cour Spéciale de Justice sont désormais de simples actes commerciaux. D’un autre côté, la gestion des ressources humaines est complètement désaxée. Les recrutements ne sont soumis à aucun barème. L’absence de normes concerne principalement les recrutements dits négociés, les contractuels et les recrutements par le haut. L’évolution des carrières, l’octroi de primes et avantages suit la même logique. C’est le haut de la pyramide et ses valets qui écrèment l’institution et ses humbles serviteurs. L’évolution des carrières est en arrêt depuis 2004 en défaveur principalement des employés dits anciens y compris ceux mis à la retraite sans régularisation de leurs situations administratives à la veille de leur mise à la retraite. Se sont ceux là, par leur sens d’appartenance au CAM, qui s’opposent à l’irrégularité et qui mettent leur expertise au profit du développement durable de la banque. Le règlement intérieur de 2004 a été élaboré dans le sens de tout permettre en fonction de la volonté du l’homme qui a la charge de l’institution.
Sources du risque :
Cette situation a généré une extraordinaire extension des frontières des zones à risque allant de pair avec l’absence de transparence caractérisant les actes de gestion dans un contexte prédominé par :
- Déficience de normalisation des dépenses. - Manque des instruments de contrôle en matière du déploiement des fonds. - Dilapidation des deniers de l’institution dans un paysage d’impunité absolu. - Détournements de fonds, directs ou déguisés, hors compétence de la Cour Spéciale de Justice. - Gestion des ressources humaines au gré des humeurs. - Octroi de Crédits et Recouvrement des créances impayées prédominés par le clientélisme. - Opacité totale au niveau de la passation des marchés, des achats, des frais généraux etc. - Absence du contrôle mutuel et hiérarchique en haut de la pyramide du fait du cumul des fonctions incompatibles aux mains du même lobby (crée et entretenu par les recrutements par le haut). - Insouciance de l’incidence des actes négatifs de gestion sur le résultat d’exploitation.
Démarche et dilemmes
A partir de 2003, le principal levier pour la stratégie adoptée est le démantèlement des anciennes structure de la banque y compris au niveau des ressources humaines. Pour se faire, des plans d’action successifs se sont articulés autour des axes suivants : - La nomination d’acteurs dits représentant du personnel qui ont pour prérogative de naviguer dans le sillage de la présidence et d’être créatif pour faire appliquer la politique du patronat (cf. supra). Par souci de compréhension, nous sommes amenés à souligner la vidange des anciens de la CNCA ayant acquis une expertise dans les domaines agricole et bancaire, soit disant par souci de compression des charges selon:
• L’adoption du départ volontaire qui a ciblé les actifs rentables et efficaces, • La marginalisation du reste des anciens dont les carrières étaient soumises à des règles de gestion pénalisantes et sans évolution. • L’exclusion de plus de 750 personnes, cumulant une antériorité de service moyenne de 30 ans, du bénéfice d’une retraite de base qui constitue statutairement une obligation faite à l’employeur.
A noter que le prétexte de la compression des charges salariales n’a pas fonctionné puisque les recrutements ultérieurs se sont traduits par une augmentation de la masse salariale et ce, compte tenu du niveau des émoluments et avantages distribués aux nouveaux arrivés.
- Le deuxième axe consistait à placer l’argent de la banque, au gré des dirigeants, en dehors de toute analyse du risque digne de ce nom. L’octroi des crédits est devenu « négociable », sans couverture du risque, dans des créneaux à tout venant, à des taux privilégiant le « clientélisme » et selon des règles en marge de toute déontologie bancaire. - Le troisième axe est la suppression des services de recouvrement et poursuites au niveau des agences sous prétexte que cette activité est prédominée par les tâches administratives et devra donc être centralisée, oubliant ou faisant oublier qu’il s’agit là d’un centre d’activité à forte production du PNB.
- Le quatrième axe de progrès est la mise en place d’un artifice comptable destiné à faire dégager des résultats d’exploitations colossaux et donc à faire briller artificiellement l’image des managers. Les procédés adoptés sont cumulatifs. Il s’agit de: 1/ Faire revivre les créances douteuses par le biais de rééchelonnement et consolidations sur consolidations. 2/ Renégocier le portefeuille contentieux via des abandons partiels et consolidation des reliquats avec paiement ou non d’acomptes. 3/ Accorder massivement de nouveaux Crédits adossés ou non à des garanties réelles à des conditions arrêtées selon la tête du client. 4/ Renouveler les crédits de fonctionnement y compris parfois les spots dans des conditions anormales de fonctionnement des comptes. 5/ Faire fi des règles prudentielles édictées par Banque Al Maghrib notamment en matière de classification des créances. 6/ Centraliser les recouvrements et poursuites en vue d’avoir la main sur la négociation des créances en souffrance et par là même sur les facilités de paiement, les placements, les recouvrements et la délivrance des mains levées. 7/ Plus grave encore, à l’échéance, les agios générés sont imputés directement au compte produit que l’exigible soit ou non recouvré. Ce procédé constitue le pilier de l’artifice comptable adopté.
Le cumul de ces « axes » a pour résultat l’existence, en situation normale, d’un portefeuille de créances non saines dépassant amplement les 80%.
En la circonstance, les abandons entrepris en 2005 se sont déroulés au niveau central d’une manière administrative sans aucune logique puisque des clients solvables et présentant des garanties réelles ont pu bénéficier de l’abandon de leurs créances au moment où les petits agriculteurs dont la paupérisation est absolu suite aux aléas climatiques successifs et les sommes monumentales décomptées au titre des agios y ont été exclus.
En résumé, nous assistons à une fuite en avant destinée à projeter une situation d’opulence fictive qui permettra de justifier l’ouverture de larges horizons en matière d’engagement des dépenses. Ce volet, où chacun trouve son compte, s’étend depuis l’acquisition ou la location de voitures y compris de luxe, l’octroi de salaires et primes colossaux en faveur du Staff dirigeant, l’acquisition de locaux et leur aménagement (le local de la CRCA de FES a été acquit plus de dix fois le prix du marché et à l’état semi fini), les systèmes d’information successifs qui ont coûté la prune des yeux, l’achat du matériel informatique, jusqu’au réunions d’exploitation qui se tiennent sous la nouvelle ère dans des Hôtels de luxe au frais de la princesse …..Etc.
Dans ce cadre, il s’avère que toutes les niches pouvant être monnayées ont été soumises à une exploration fonctionnelle y compris le tronçonnage des droits de 750 employés à une retraite de base.
Dans ces conditions, en vulgarisant, nous pouvons dire que le CAM d’aujourd’hui présente les symptômes d’une tumeur cancérogène qui le ronge de l’intérieur et dont la médication est tributaire des doses d’irradiation que les pouvoirs publics sont disposés à lui administrer.