La pandémie du coronavirus a indéniablement marqué de son empreinte le discours du trône de cette année. L’allocution royale a été consacrée exclusivement à la crise sanitaire, aux mesures prises pour faire face à sa propagation, à ses répercussions sur les ménages et l’économie nationale et des moyens pour se préparer à la seconde vague de la Covid-19.
D’emblée, le roi Mohammed VI a reconnu dans son discours que contrecarrer la pandémie a exigé la prise d'une série de décisions difficiles et sévères. «Ce n’est pas de gaieté de cœur que Nous avons choisi d’adopter une combinaison de résolutions difficiles, voire rudes parfois. Nous avons été guidés en cela par une double priorité : protéger les citoyens et agir dans l’intérêt supérieur de la Nation», a-t-il souligné.
Une politique à laquelle les Marocains ont adhérée massivement. Ce qui constitue «un sujet particulier de fierté» pour le souverain. «Je salue aussi les citoyennes et les citoyens pour l’esprit solidaire et l’engagement responsable dont ils ont fait preuve pendant la période de confinement, tant sur le plan individuel que collectif et Je félicite notamment les acteurs de la société civile qui ont su prendre de louables initiatives», a indiqué le monarque.
120 milliards de dirhams seront injectés dans l’économie nationale
La crise sanitaire a eu de «fâcheuses retombées sanitaires, mais aussi économiques et sociales (…) C’est pourquoi Nous avons créé un Fonds spécial pour faire face aux répercussions sanitaires, économiques et sociales de la pandémie. Nous nous sommes d’ailleurs réjouis de l’enthousiasme spontané et de l’esprit constant de solidarité avec lesquels cette initiative a été accueillie», a précisé le roi.
«Une telle ferveur a permis la mobilisation de 33 milliards 700 millions de dirhams. Le total des dépenses engagées jusqu’à présent se monte à 24 milliards 650 millions de dirhams. Cette somme a permis le financement des mesures d’appui social et l’achat du matériel médical nécessaire. Par ailleurs, 5 milliards de dirhams seront affectés à la Caisse Centrale de Garantie, dans le cadre de la relance économique.»
Malgré toutes ces mesures «et en dépit de nos efforts pour atténuer l’acuité de cette crise sanitaire, Je le dis en toute sincérité, les incidences seront rudes», a reconnu Mohammed VI. La pandémie a «mis en évidence un certain nombre d’insuffisances qui touchent plus particulièrement le domaine social : comme la dépendance de certains secteurs aux aléas extérieurs, la taille du secteur informel et la faiblesse des réseaux de protection sociale, notamment à l’égard des franges de la population en situation de grande précarité».
Un constat à partir duquel le souverain appelle à «redéfinir l’ordre des priorités, asseoir les bases d’une économie forte et compétitive et construire un modèle social plus inclusif». Le roi ordonne ainsi le lancement d’ «un plan ambitieux de relance économique pour permettre aux secteurs de production de se remettre d’aplomb, d’accroître leur capacité à créer des emplois et à préserver les sources de revenu». Et comme tout plan nécessite un financement, le chef de l'Etat annonce qu’ «environ 120 milliards de dirhams seront injectés dans l’économie nationale, soit l’équivalent de 11% du PIB». Ainsi, «ce taux inscrit le Maroc parmi les pays les plus audacieux en matière de politique de relance économique post-crise», ajoute-t-il.
Objectif : généraliser la couverture sociale dans un délai de cinq ans
Cet effort financier sera épaulé par la création d’un Fonds d’investissement stratégique ayant pour mission d’appuyer «les activités de production, d’accompagnement et de financement des grands projets d’investissement public-privé, dans une diversité de domaines».
La mise en place du Plan de la relance économique sera également accompagnée par «une réforme profonde du secteur public» afin de «corriger les dysfonctionnements structurels des établissements et des entreprises publics, garantir une complémentarité et une cohérence optimales entre leurs missions respectives et, in fine, rehausser leur efficience économique et sociale».
La feuille de route présentée ce mercredi par Mohammed VI comprend également la constitution d’une «Agence nationale dont la mission consistera à assurer la gestion stratégique des participations de l’Etat et à suivre la performance des établissements publics».
Cet ambitieux Plan accorde une place capitale à «l’instauration de la justice sociale et spatiale. Notre aspiration prioritaire est d’assurer la protection sociale à tous les Marocains».
«Aussi, Nous considérons que le moment est venu de lancer, au cours des cinq prochaines années, le processus de généralisation de la couverture sociale au profit de tous les Marocains. Nous préconisons le déploiement progressif de cette opération à partir du mois de janvier 2021, selon un programme d’action précis. Celui-ci devra porter, en premier lieu, sur la généralisation de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO) et des allocations familiales. Il sera ensuite étendu aux autres couvertures sociales que sont la retraite et l’indemnité pour perte d’emploi. Pour qu’il profite directement et pleinement aux bénéficiaires, ce projet requiert une réforme rigoureuse des systèmes et programmes sociaux déjà en place, notamment à travers l’opérationnalisation du Registre social unifié (RSU).»
Cette généralisation de la coucerture sociale vise à «devenir un levier essentiel d’insertion du secteur informel dans le tissu économique national». Le gouvernement est ainsi invité à parachever, en concertation avec les partenaires sociaux, l’élaboration d’ «vision pragmatique globale [incluant] le planning, le cadre légal ainsi que les options de financement». Mais le roi met en garde contre «toute instrumentalisation de ce noble projet sociétal à des fins politiques».