Le Programme des Nations unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) a publié cette semaine son nouveau rapport. Intitulé «Saisir le moment, lutter contre les inégalités enracinées pour mettre fin aux épidémies», le document fait le point sur cette épidémie mondiale presque éclipsée par le nouveau coronavirus.
Pour l’objectif 90-90-90 (90% des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut sérologique, 90% de toutes les personnes infectées par le VIH dépistées reçoivent un traitement anti rétroviral durable et 90% des personnes recevant un traitement antirétroviral ont une charge virale durablement supprimée), le nouveau rapport cite le Maroc parmi les pays qui sont sur la bonne voie.
De ce fait, le royaume a réussi à atteindre les deux parties de cet objectif : celui des personnes vivant avec le VIH qui connaissent leur statut et suivent un traitement et celui des personnes sous traitement et dont la charge virale a été supprimée. Selon le tableau de bord 90-90-90 du Maroc de l’ONUSIDA, ce sont 77% Marocaines et Marocains vivant avec le VIH et qui connaissent leur statut en 2019. Ce pourcentage varie entre 87% pour les femmes et 68% seulement pour les hommes.
Quant à la deuxième partie de l’objectif, en lien avec le traitement, 91% des personnes testées positives (90% de femmes et 89% d'hommes) reçoivent un traitement antirétroviral. 92% de personnes recevant ce traitement ont une charge virale durablement supprimée (92% de femmes et 92% d’hommes).
Toutefois, pour le pourcentage de personnes vivant avec le VIH dont la charge virale est supprimée, le taux baisse à 64% pour tout âge confondu. Il varie entre 73% pour les femmes et 55% seulement pour les hommes, poursuit le rapport. En tout, 8 900 femmes et 12 000 hommes vivent avec le VIH au Maroc.
Un accès aux services de dépistage et de traitement qui s’améliore au Maroc
L’ONUSIDA précise que «la connaissance du statut VIH, l'accès au traitement et la suppression virale varie entre les hommes et les femmes vivant avec le VIH dans la région MENA». «L'accès aux services de dépistage et de traitement s'améliore dans certains pays, comme l'Algérie et le Maroc», reconnait-on, tout en déplorant qu’«en raison de la faible couverture des services dans plusieurs autres pays, seulement 38% [25–63%] des personnes vivant avec le VIH dans la région avaient accès à un traitement antirétroviral en 2019».
Toujours pour le cas du royaume, la même source rappelle que plus de 50% des hommes gays et hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, considérés comme l’une des populations clés du programme, ont déclaré avoir reçu au moins deux services de prévention au cours des trois derniers mois.
De plus, pour les usagers de drogue injectable, l’ONUSIDA évoque une couverture des aiguilles et des seringues distribuées individuellement, via le programmes aiguille-seringue, qui reste toutefois «moyenne» au Maroc.
S’agissant des lois et politiques, le programme onusien rappelle que le royaume «ne criminalise pas les personnes transgenres», contrairement aux travailleurs du sexe, aux actes sexuels entre personnes du même sexe et aux usagers de drogue.
Le même tableau de bord fait état aussi de l’absence de lois criminalisant la transmission ou l'exposition au VIH et de l’imposition d’un dépistage obligatoire du VIH pour les actes de mariage, les contrats de travail ou les titres de séjour ou pour certains groupes.
Le travail associatif mis à l’honneur à l'ère du coronavirus
Alors que le monde fait face à la pandémie du nouveau coronavirus, l’ONUSIDA met à l’honneur le travail de l'Association marocaine de planification familiale et ses services anti-VIH pour venir en aide aux femmes vivant avec ce virus. «Les mesures du confinement à Rabat, au Maroc, aplanissent la courbe COVID-19, mais elles rendent également plus difficile l'accès des femmes aux services de santé sexuelle et génésique», estime le programme.
Ainsi, des membres de l’association marocaine et ceux de communauté des personnes vivant avec le VIH ont été mobilisés pour orienter et assister des femmes vivant avec le VIH. «Ce soutien comprend également des contraceptifs gratuits, le dépistage des IST et d'autres services de santé sexuelle et reproductive», ajoute-t-on.
«Une des principales préoccupations pendant le confinement a été de s'assurer que les personnes vivant avec le VIH ont toujours accès aux médicaments antirétroviraux et que les femmes enceintes vivant avec le VIH peuvent accoucher en toute sécurité sans risque pour leur propre santé (y compris l'exposition au COVID-19) et sans risque de la transmission du VIH à leurs nouveau-nés.»
Pour Fadoua Bakhadda, directrice exécutive de l'Association marocaine de planification familiale, «les préoccupations des femmes vivant avec le VIH au cours de cette crise concernaient davantage la violence sexiste et la santé et la sécurité de leurs enfants». «Elles s'inquiètent davantage de garder leurs bébés à l'abri du VIH et du COVID-19 plutôt que d'eux-mêmes», a-t-elle ajouté, en mettant en avant l’importance aussi des services psychologiques pour cette frange de la société.