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Grand Angle

Diaspo #147 : Karim Amghar, une vie au service du combat contre les stéréotypes aux Pays-Bas

A 12 ans, Karim Amghar a traversé une expérience qui a changé le cours de sa vie. A l’école, il s’est senti différent des autres et cela s’est vu même dans son comportement. Aujourd’hui, il est animateur de télévision, enseignant et écrivain.

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Karim Amghar, animateur de télévision, enseignant et écrivain marocain né aux Pays-Bas / Ph. Suzan Alberts
Temps de lecture: 3'

Dans les années 1970, son père a immigré aux Pays-Bas pour une opportunité d’emploi. Plus tard, il amenera sa femme et ses enfants pour les avoir à ses côtés. Karim Amghar née quant à lui à Rotterdam, la ville où son père s’est installé lors de son arrivée en Europe. La famille a ensuite déménagé dans une petite ville appelée Bleiswijk. C’est là où Karim, scolarisé, vivra une expérience qui changera sa vie.

«J’ai grandi dans cette petite ville qui comptait beaucoup d’agriculteurs et j’y ai fréquenté beaucoup de Néerlandais à l’école», se souvient Karim. Dans son établissement, il a rapidement appris la langue et s’est senti entièrement intégré. Cependant, les choses ont commencé à prendre une autre tournure vers l'âge de 12 ans.

«J’ai dû choisir ce que je voulais faire ensuite et pour cela, tout le monde est censé passer un test et faire évaluer son niveau par un moniteur avant de rejoindre le secondaire», a-t-il expliqué.

Un traitement différencié

Karim a passé le test et a eu de bonnes notes, mais son instructeur aura un point de vue différent. «Un de mes frères est venu avec moi pour le rencontrer, parce que mes parents avaient des difficultés avec le néerlandais. Il nous a annoncé que même si j’avais bien passé mon examen, je devrais rester au niveau deux», se souvient-il .

Bien que ses performances auraient pu facilement lui accorder le plus haut niveau, Karim en a été empêché parce que ses parents ne pouvaient pas parler la langue et n’auraient pas pu l’aider dans le suivi scolaire à la maison. «Cela m’a beaucoup changé», a expliqué Karim qui s’est senti dévasté sur le coup.

«Je demandais constamment pourquoi ils m’avaient fait ça», se souvient-il, expliquant à quel point il se sentait blessé et déçu. «La seule chose qui m’est venue à l’esprit est que j’étais différent», nous a-t-il confié.

Cet épisode aura profondément changé Karim, son attitude et même ses objectifs de vie. Il est devenu un enfant difficile, à la recherche de son identité.

«Je croyais que parce que j’étais différent, ils me traitaient différemment et je devais agir différemment. Je voulais savoir qui j’étais. Et tout ce que j’ai trouvé, c’est le stéréotype du Maroco-néerlandais que la télévision montrait comme le 'méchant criminel' traînant de mauvais antécédents.»

Karim Amghar

Karim est devenu plus colérique et s’est aligné sur le comportement stéréotypé dans lequel on l'avait relégué. «Je suis passé d’un style d’habillement ordinaire à celui des jeunes de la rue, avec des baskets et une casquette. J’ai commencé à parler en argot, à employer des jurons ; j’ai fait tout ce que le stéréotype représentait», se souvient-il.

Vaincre le stéréotype

La famille de Karim a remarqué ces changements et a décidé d’agir. En effet, Karim est rentré un jour de l’école, en colère à cause d’un différend, et a annoncé à son frère qu’il allait quitter l’établissement pour commencer à travailler.

«Mon frère a mis sa main sur mon épaule et m’a convaincu de ne pas faire ça, car j’étais un enfant intelligent», se souvient-il. C'est ainsi que le jeune garçon trouvera le courage de terminer ses études et à aller à l’université. Un chemin loin d'être évident dans la tête de Karim, mais son frère le pousse à «aller à l’université pour au moins essayer».

Admis à l’université de Rotterdam, Karim y suivra de brillantes études. Il deviendra  enseignant, puis animateur de télévision et écrivain. «J’enseigne et j’ai écrit un livre sur la radicalisation et l’extrémisme», affirme-t-il avec un brin de fierté.

Le livre de Karim «Du radical à l’amical» explique comment une personne aux idées radicales et toxiques pour son entourage, à quelqu’un d’utile pour la société. Aujourd’hui, il travaille beaucoup sur cette question avec d’autres enseignants, le corps de la police et apporte ses conseils à différents acteurs de la société néerlandaise.

En plus de son livre, Karim Amghar a réalisé une série télévisée dans laquelle il raconte son enfance et de son expérience à l’école. Il a également fait des recherches sur le problème qu’il a traversé pendant son adolescence, rencontrant des jeunes qui vivent la même situation.

Pendant le Ramadan, Karim a animé un autre programme télévisé, mettant en lumière les initiatives positives de bénévoles. La lutte de Karim contre les stéréotypes l’a aidé à prendre le dessus sur une mauvaise expérience, qu’il a fini par transformer en catalyseur.

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