En juillet 2019, Ernst & Young (EY) a été sommé par la justice de fournir plus de documents concernant un audit réalisé pour le compte du raffineur d’or Kaloti, accusé d’avoir importé de l’or du Maroc en le faisant passer pour de l’argent.
La semaine dernière, la justice britannique a fini par rendre son verdict dans cette affaire, condamnant, le cabinet d'audit financier et de conseil à verser une compensation de 11 millions de dollars. Ce montant doit ainsi être versé à l'ancien consultant d’EY à Dubaï et lanceur d’alerte Amjad Rihan, pour la perte de revenus passés et actuels.
Selon le média sud-africain Moneyweb, qui cite le jugement, la Haute cour de Londres a rejeté les arguments d'EY concernant Rihan, accusé par son ancienne firme d’avoir «menti» et d’être «un opportuniste ayant fabriqué une partie de son témoignage».
Le tribunal a également estimé que les preuves présentées par EY, concernant la question de l'or au Maroc, étaient «trompeuses» et que la firme aurait «déformé la vérité en dissimulant l'existence de preuves documentaires».
«Un employeur a le devoir de fournir un environnement de travail acceptable, notamment en fournissant un lieu de travail sûr, un système de travail sûr et un environnement de travail éthiquement acceptable - sans conduite criminelle et contraire à l'éthique», expliquent les juges de la Haute cour de Londres.
Des bijoux d'occasion transformés en blocs d'or raffiné
Et de préciser que «la confidentialité d'un auditeur est outrepassée par des considérations telles que l'obligation de dénoncer une éventuelle activité criminelle, y compris le financement du terrorisme ou le blanchiment d'argent». «Un auditeur doit se conformer au Code IFAC (Fédération internationale des comptables), même si le pays dans lequel il effectue un audit a des exigences moins contraignantes», estime-t-on.
En 2013, le groupe Kaloti, raffineur d’or et d’autres métaux précieux basé à Dubaï, avait engagé EY Dubai pour effectuer un audit afin de confirmer ses pratiques en matière d’approvisionnement responsable en or. Amjad Rihan, qui dirigeait l'équipe d'audit, avait par la suite révélé avoir découvert que Kaloti importait du Maroc plus de 200 millions de dollars d'or… recouvert d'argent, pour contourner les restrictions imposées par le royaume sur le métal jaune.
Selon le jugement rendu le 17 avril, le fournisseur de cet or au Maroc était «Renade International». Une entreprise «dirigée par deux frères qui ont ensuite fait l'objet d'une enquête de la police française et qui a abouti à des condamnations devant un tribunal français pour trafic de drogue et blanchiment d'argent».
EY avait assuré que son client avait deux autres fournisseurs d'or au Maroc, les trois s'activant dans l'achat de bijoux d'occasion. «Il ne s'agissait pas d'or extrait (...) Les 3 fournisseurs faisaient fondre les bijoux et expédier les blocs d'or à [Kaloti] pour raffinage».