A l’heure où Claude Guéant semble avoir remplacé le concept «races inférieures» par celui de «civilisations inférieures», les intellectuels de l’Hexagone ont décidé de rappeler que la majorité obtenue par la gauche au Sénat ne lui permet pas de stéréotyper la communauté musulmane et nord-africaine, voire de nourrir le racisme qui sévit de plus en plus en France. «Il y a à peine quelques années, le racisme avait une connotation biologique. Aujourd’hui, pour endoctriner les masses, les adeptes du Front national (FN) et de la Gauche en général ont décidé de lui attribuer une connotation culturelle», cette analyse est de Dounia Bouzar, sociologue et anthropologue du fait religieux au sein du cabinet Cultes et Cultures.
«On aurait pu croire que la gauche, après avoir obtenu la majorité au Sénat, s'emploierait à configurer ce qu'elle compte faire quand elle sera aux commandes de l'Etat, que les urgences politiques et sociales lui feraient examiner en priorité des propositions de lois de réformes structurelles touchant à l'impôt, au budget de l'Etat, aux conditions de la négociation sociale», ajoute t-elle.
En effet, la polémique est tout au moins vivace. Si les sénateurs de gauche n’ont rien trouvé de plus emblématique sur le thème de l’identité française que d’adopter, en janvier dernier, un projet de loi visant à interdire le port du foulard aux personnes chargées de l’accueil de la petite enfance (assistantes maternelles à domicile), le débat lancé par Marine Le Pen creuse encore plus la conjoncture d'altérité qui sévit autour de l'islam. «Le Front national ne reflète pas réellement les principes de la laïcité tant défendue en France. Il aurait été pertinent que la gauche adopte la base de la démocratie républicaine : les lois sont égales pour tous les citoyens, quelles que soient leurs opinions ou leur religion», sonde la sociologue. Toujours selon ses mots, le gouvernement français encourage «la peur de l’Islam» et entraîne des tas de lois d’exception qui violent les lois antidiscriminatoires, le code du travail et d’autres codes et lois encore en vigueur.
De même, une tribune écrite par plusieurs intellectuels français et publiée par le cabinet Cultes et Cultures interpelle la conscience des parlementaires français, en cette période pré-électorale. Laquelle tribune met en avant qu’aucun employeur n'a le droit de demander les convictions religieuses, philosophiques ou politiques d'un salarié. Et lorsque ce dernier est engagé, sa liberté de manifester sa conviction ne peut être réduite que si elle entrave certains critères stricts résultant du corpus législatif et de la jurisprudence.
«Par ces mesures islamophobes, le gouvernement français tient seulement à «récupérer» les adeptes du FN faisant fi de la gravité du mélange politique et religion, qui en plus d’être anticonstitutionnel, risque de remonter les citoyens français les uns contre les autres, ce qui entraverait le sacro-saint principe de la fraternité», conclue Dounia Bouzar.