Le comité de soutien de Mustapha Naïm organise une manifestation devant le consulat du Maroc à Lyon. Associations, mairie de Lyon, famille, amis, et connaissances s’activent pour que la justice apporte un éclaircissement à l'affaire du jeune franco-marocain. Arrêté pour avoir porté le nom d'une homme recherché, interrogé sur une affaire de trafic de drogue et de terrorisme il est finalement condamné à huit ans de prison ferme pour trafic de stupéfiants, au Maroc.
La mobilisation s'organise d'abord à propos des conditions de son arrestation : arrêté au port d’Algésiras en Espagne par des hommes en civil marocains, il est ramené incognito au Maroc. Il aurait ensuite été séquestré et torturé pendant 10 jours avant de réapparaitre. La police avait fait abstraction de cette période dans le PV rendu à la justice pour son procès.
Son avocat, François Heyraud, a porté plainte contre X pour enlèvement et séquestration et pour faux en écriture publique et usage de faux sur la base de ce PV et de l'absence de tampon des douanes lors de son entrée sur le territoire marocain. «A mon avis, le parquet va classer l’affaire sans suite. J’ai déposé plainte contre X, je me dis que ça va être difficile pour le parquet de mener l’enquête, puisqu’il faudra engager des démarches au Maroc, etc. Je ne les vois pas faire tout cela. Même quand les plaintes concernent des personnes déterminées, le parquet les classe très souvent sans suite, je pense que ce sera le cas. Cela me permettra de saisir le juge d’instruction qui sera plus à même de contacter les autorités marocaines», explique à Yabiladi Me Heyraud. La plainte ayant été déposée depuis trois mois environ, selon Me Heyraud, le parquet rendra son verdict dans un mois.
Les proches aussi dans le combat
Ses amis de longues dates et anciens camarades de classes ont formé un comité de soutien. «Il faut dire qu’on a été informé de la situation assez tardivement», déplore Vanessa T, responsable du comité de soutien à Mustapha, car l'affaire était tellement bancale que la mère de Mustapha avait toujours espoir que son fils sorte.
«On a écrit au consul, au ministre des Affaires étrangères pour dénoncer les conditions d’arrestation. On l’a d’abord arrêté à cause de son nom, après c’était pour trafic de drogue. Je me dis que s’ils avaient trouvé quelque chose dans la voiture, ça aurait été compréhensible, mais même dans ce cas, on arrête toutes les personnes qui s’y trouvent, pas une seule», indique-t-elle à Yabiladi.
Le comité organise des rencontres en présence de la famille de M. Naïm, de quelques associations comme l’Asdhom et le maire de Vaux en Velin. Leur dernière rencontre a eu lieu vendredi dernier. «Il y avait aussi une association franco-marocaine dont les membres ne veulent pas trop s’impliquer dans l’affaire. Apparemment ils sont en contact avec le consulat, s’ils ont des intérêts auprès du gouvernement, ça on ne sait pas», explique Vanessa T. Selon elle, le maire de Vaux en Velin fera prochainement un communiqué sur le sujet.
Comme Zakaria Moumni
Les amis de M. Naim veulent s’inspirer du cas de Zakaria Moumni pour mener leur combat. «Même si ce n’est pas la même affaire, c’était aussi des cas de fausses accusations et il a fini par être libéré. On essaie de contacter les personnes qui l’ont soutenu pour qu’ils nous donnent des contacts et nous expliquent comment ils ont réussi à mobiliser», indique Vanessa T.
Ils veulent aussi saisir cette période de campagne présidentielle pour faire entendre l’affaire de Mustapha. «On va écrire une lettre au président et aux autres candidats», déclare-t-elle. Selon le comité de soutien à Mustapha, le consulat ne communique pas. «La maman de Mustapha a dit qu’une journaliste l'avait contacté, mais ils n’ont pas voulu se prononcer sur le sujet», ajoute Vanessa T. Le comité prévoit «plusieurs actions concrètes dès demain mardi». Il fera une marche pacifique devant le consulat du Maroc à Lyon.
L’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH) aussi se penche sur le dossier. «Nous n’étions pas au courant de cette affaire, mais désormais, nous allons nous y intéresser», déclare à Yabiladi la présidente Khadija Riyadi, sa présidente.
En prison, Mustapha a le moral à plat. Son épouse ne peut pas le voir sans passer par les autorités françaises. «Ils m’ont dit que nous sommes mariés en France et pas au Maroc. Donc à chaque fois, je dois faire des démarches auprès des services sociaux du consulat de France à Casablanca pour aller le voir en prison» explique sa femme. Elle l’a vu pour la dernière fois en janvier dernier. «J’étais au Maroc du 12 au 21 janvier», précise-t-elle à Yabiladi. «Il a perdu beaucoup de poids, il est devenu très mince. Il déprime beaucoup là-bas [en prison, ndlr].»
Justice marocaine, toujours rien
Depuis vendredi dernier, Yabiladi essaye en vain de rentrer en contact avec les autorités marocaines compétentes. Au cabinet du ministre de la justice, le directeur des Affaires pénales reste injoignable.