Le Maroc et le gouvernement de Pedro Sanchez négocient un accord pour le partage des ressources naturelles des eaux du Sahara, révèle le site El Español. Ce dialogue en catimini pourrait affecter la relation entre le PSOE et son allié au sein du gouvernement, Podemos.
Les camarades de Pablo Iglesias maintenus à l'écart, ont toujours qualifié la présence du Maroc dans les eaux du Sahara occidental d’ «occupation» et plaident pour une reconnaissance de la «RASD» par Madrid. Dans les rangs de l’opposition, la formation d’extrême gauche avait protesté, en février 2018, contre les autorisations de prospection pétrolières accordées par le Maroc à la compagnie italienne ENI dans les eaux situées entre Tan-Tan et Sidi Ifni, estimant qu’elles font partie de la «zone usurpée au peuple sahraoui».
Désormais au gouvernement, Podemos n'a pas changé ses positions. Le parti vient d’apporter une nouvelle preuve de sa proximité avec le Polisario. Le secrétaire d’État chargé des Droits sociaux, Nacho Alvarez, s’est réuni le vendredi 21 février au siège de son département, avec une délégation du Front conduite par la «ministre des Affaires sociales et de la promotion de la femme», Souilma Birouk.
C’est dire qu’un éventuel accord sur le partage entre Rabat et Madrid des ressources naturelles des eaux du Sahara risque de se heurter frontalement avec la ligne politique observée par ce parti depuis sa création il y a presque cinq ans.
Des enjeux géostratégiques
En revanche un dialogue entre les deux pays sur cette question serait la solution idoine à continuer sur la voie de initiée auprès des Nations unies, en 2014 pour l'Espagne, et 2015 pour le Maroc, sans résultat jusqu'ici. La lenteur de l'examen des demandes au niveau de l'ONU risque de priver le Maroc et l'Espagne des précieuses richesses de ces eaux, d’autant qu’«il y a du pétrole, du gaz naturel et une nouvelle ressource : les hydrates de méthane», affirme à El Español, José Mangas, professeur de ressources minérales marines à l'Université de Las Palmas de Gran Canaria.
Dès l’adoption, le 16 décembre par la Commission des Affaires étrangères à la Chambre des représentants des projets de loi 37.16 et 38.16, Nasser Bourita a immédiatement exprimé la disposition du Maroc à ouvrir le dialogue avec l’Espagne et la Mauritanie. Une proposition marocaine à laquelle adhère l’universitaire espagnol Nicolas Navarro, professeur de droit international public à l'Université de Las Palmas de Gran Canaria. «Le Maroc et l'Espagne s'orientent vers un accord d'exploitation conjoint du plateau continental pour le partage des richesses minières. Ils peuvent également exploiter les fonds à travers la création de sociétés à capital mixte», analyse-t-il auprès d'El Español.
Plus précisément, Rabat propose au gouvernement de Pedro Sánchez que des entreprises espagnoles exploitent cette zone conjointement avec la société britannique Energy. Une offre que «l’ONU acceptera pour des raisons de sécurité», soulignent des sources marocaines à la publication en ligne. Et ces mêmes sources d’affirmer qu’au final «l'Espagne cédera parce que le Maroc a réussi à manœuvrer avec les Anglais, les Américains et les Français».
Par ailleurs, la présence du Royaume-Uni dans le projet d’exploitation du plateau continental, est considérée par Rabat et Madrid comme une police d'assurance contre les mouvements de la Russie en Afrique. Les entreprises britanniques connaissent d'ailleurs bien ces eaux : en 2014, elles avaient réalisé des prospections pétrolières avec la société espagnole Repsol, au large des Iles Canaries.
Pour rappel, en octobre 2019, Londres a déjà conclu un accord d’association avec le Maroc, intégrant dans sa compétence les eaux et les produits du Sahara.