Le ministre des Affaires étrangères est rentré d'une tournée effectuée dans la majorité des pays du Conseil de Coopération des Etats du Golfe (CCG), sans faire escale dans la capitale des Emirats arabes unis, autrefois, «alliés traditionnels» du Maroc dans la région. Ce vendredi, Nasser Bourita a en effet repris ses activités à Rabat. Il a d’ailleurs reçu l’Espagnol Miguel Angel Moratinos en sa qualité de Haut-représentant de l’Alliance des civilisations des Nations unies.
L’absence de l’étape Abou Dhabi est un signe révélateur de la zone de turbulence que traversent les relations maroco-émiraties, depuis plusieurs mois, bien avant l’interview qu’a accordée, le 23 janvier dernier, le chef de la diplomatie à la chaîne Al Jazzera. Dans celle-ci, il a annoncé que «le Maroc a changé sa participation» au sein de la coalition arabo-islamique, sous commandement de l’Arabie saoudite, qui mène depuis le 26 mars 2015 la guerre au Yémen contre les Houthies chiites.
Quand Rabat mettait ses avions F-16 à la disposition des Emirats
«Cela a commencé avec la dernière visite, fin août 2018, du souverain effectuée dans ce pays. Des médias marocains l’avait placée sous le sceau de "travail et d’amitié". Finalement, elle s’est révélée très courte», nous confie une source. «Les entretiens entre Mohammed VI et le prince héritier Mohamed Ben Zayed n’ont eu lieu qu’après le retour du roi à Abou Dhabi. C’était le 10 septembre et ils furent brefs». L’épisode du «rappel pour consultation de l’ambassadeur» marocain aux Emirats n’a fait qu’ajouter de l’huile sur le feu, ajoute notre source.
Cette tension évidente entre les «alliés» d’hier tranche avec un passé encore récent où le royaume n’hésitait pas à mettre ses avions F-16 et l’expérience de ses pilotes au service des Emirats, justifiant son engagement dans la guerre internationale, sous commandement des Etats-Unis, contre Daesh par la présence d’Abou Dhabi.
«Le Maroc est engagé (dans cette guerre) sous la houlette des Emirats arabes unis», avait déclaré en février 2015, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Salaheddine Mezouar, devant une commission conjointe des deux Chambres du Parlement. L’ex-chef de la diplomatie avait réaffirmé lors de cette réunion que Rabat était «aux côtés d’Abou Dhabi et soutiendrait toutes ses décisions». Depuis, les choses ont évolué. Le fossé séparant les deux pays ne cesse de se creuser.