En 2017, la société de gestion déléguée des stationnements Somagec a mis en place des espaces souterrains à Tanger. Par la suite Somagec parking a généralisé le stationnement payant à d'autres lieux publics. Cette extension de la zone soumise à horodateur a provoqué l’ire des riverains. Ils reprochent notamment au délégataire de recourir «illégalement» au sabot de voiture (amende de 50 DH) pour contraindre les automobilistes à payers 3,50 DH l’heure.
De son côté, la société gestionnaire se défend de tout usage illégal. Contacté par Yabiladi, Mehdi Bouhriz, directeur des opérations à Somagec, affirme que «ce n’est pas la société qui recourt à l’utilisation du sabot mais le conseil de la ville». Pour se défendre, le responsable présente ce projet comme étant «unique au Maroc». «Il s’agit d’un investissement de 600 millions de dirhams et de la création de parkings souterrains avec une capacité cumulée de 3 000 places», renchérit-il.
Un projet présenté comme novateur
Ces places souterraines sont bordées d’une zone de protection sur un périmètre de 150 mètres, où l’on retrouve ainsi les stationnements payants en place publique. «C’est une toute partie partie de Tanger», se défend encore le directeur des opérations.
«L’article 200 de la loi organique des communes donne au maire toutes les prérogatives pour définir les zones de stationnement payant. Quiconque se trouvant dans la zone d’horodateur doit donc se plier à ses règles.»
Le responsable rajoute que «la création d’une police administrative constituée de fonctionnaires communaux, a pour mission de relever les infractions passible de la pose du sabot».
Si Mehdi Bouhriz souligne que Somagec «n’a fait que formaliser le principe de payer le stationnement, autrefois versé au gardien de voitures», les riverains, eux, pointent du doigt des mesures «illogiques», les obligeant à payer 3,50 DH par heure, même pour stationner en bas de leur domicile. «On leur propose un abonnement à 200 DH par mois qui ouvre le stationnement à tout le périmètre de Somagec», décrit cette fois-ci par le responsable comme étant «très grand».
Les citoyens s’organisent en collectif
Sur fond de polémique, le projet ne connaît pas un franc succès auprès des habitants, parmi lesquels 700 seulement sont abonnés. En effet, la résistance a commencé sur un groupe Facebook qui compte actuellement près de 39 000 membres, où chacun fait part de ses mésaventures.
Omar Benajiba, avocat au barreau de Tanger, en fait partie. Il nous explique que cette mobilisation a évolué pour se structurer en association, sous le nom de Citoyenneté responsable. Mais «n'ayant pas obtenu de récipissé de la préfécture, nous avons dû ester en justice», nous précise-t-il.
«L’utilisation du sabot est anticonstitutionnelle. Les tribunaux administratifs, de première instance, la cour d’appel et même la haute cour ainsi que la Cour des comptes ont tranché là-dessus. Si c’est une décision de justice, elle doit couvrir tout le territoire marocain et pas uniquement celui de la ville où elle a été rendue.»
Poursuivis pour avoir protesté
Si la justice a tranché sur l’illégalité de l’usage du sabot toujours en vigueur à Tanger, des bénévoles du collectif ont trouvé une solution. «Des volontaires sur notre page Facebook peuvent intervenir pour prêter main forte aux automobilistes et retirer le sabot», nous explique Omar Benajiba. Cependant, le parquet vient de poursuivre six d'entre-eux pour «dégradation des biens publics». Des poursuites sont également en cours pour possession et usage d’objets tranchants.
«Ce sont les poseurs de sabots qui ont durci le dispositif. Lorsqu’ils ont vu que les gens utilisaient des clés, ils ont eu recours aux chaînes et au serrures d’acier. Donc, certains automobilistes ont utilisé une cisaille pour retirer le tout. Ils ne la brandissent pas dans la rue en attaquant les passants et c’est là toute la différence.»
Omar Benajiba fait partie des avocats s’étant portés volontaires pour défendre les prévenus et se saisir des irrégularités entachant la gestion des stationnements dans la ville du Détroit. «Nous assistons quotidiennement à des bagarres entre les gens qui veulent retirer les sabots et ceux qui les en empêchent. N'attendons pas le jour où un malheur arrive pour enfin prendre conscience du problème», prévient-il.