Dans la commune de Khlalfa (province de Taounate), l’huilerie Al Baraka est en activité depuis plus de sept ans, dans la plus grande illégalité. En effet, la société fait l’objet d’un ordre de fermeture depuis le 23 décembre 2011, par décision du ministère de l’Intérieur.
La firme appartient à Mohamed El Bouzaidi El Idrissi, et est gérée par ses fils Rachid et Abdallah. Ce dernier, dit «Berradane», est député PPS de la circonscription de Taounate-Tissa. Ironie du sort, Abdallah El Bouzaidi est également membre de la Commission de justice, de législation et des droits de l’Homme.
Les riverains pollués
L'activité de l'huilerie n'a jamais cessé. Une impunité qui viendrait de l'influence de cette famille de notables dans la région, selon le voisinage. Pire encore, elle ne respecte pas les processus de production imposé par la loi depuis de nombreuses années.
En effet, deux types de résidus résultant de la trituration doivent être soigneusement entreposés et emmagasinés, pour éviter qu’ils soient directement rejetés dans la nature. Il s’agit des grignons et des margines, qui «engendrent des problèmes environnementaux inquiétants, en particuliers pour les margines (pollutions des cours d’eau, nappe phréatique…)». A ciel ouvert et au contact direct des riverains, l’huilerie Al Baraka entrepose ces résidus dans des bassins non-étanches.
Dans le village, on crie au scandale écologique et sanitaire : l’eau des puits est infectée et donc inutilisable. Dans les images reçues par Yabiladi, on voit clairement les tonnes de grignons déposés à ciel ouvert près des maisons. Il est également possible de voir le sol complétement noyé de margines.
Une famille de MRE monte au front
Depuis l’ordre de fermeture de l’huilerie Al Baraka en 2011, aucun suivi ne semble avoir été effectué. Ce n'est que six ans après qu'une famille de Marocains résidant à l'étranger initiera le combat administratif et judiciaire. Le représentant de la famille est Yahya Ettouby travaillant comme technicien supérieur du développement durable, au sein du ministère français de l’Environnement, de l’énergie et de la mer.
Depuis début janvier 2017, avec une première plainte déposée auprès de la préfecture de Taounate, la famille mène une bataille acharnée contre l’huilerie. Photos à l’appui, plusieurs lettres ont été envoyés au Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), à la Fondation Mohammed VI pour la protection de l’environnement et à l’Association marocaine pour l’environnement et le développement durable (AMEDD). Après plusieurs mois de silence, Yahya enverra même une lettre au ministère marocain des Affaires étrangères.
A ce jour, la seule réponse que Yahya a reçue est celle du CNDH. La première date du 24 avril 2017 et la deuxième du 8 mai dernier. Ainsi, le conseil dit avoir «pris contact avec les autorités administratives compétentes (dans la province de Taounate)» et serait dans l’attente depuis plus d’un an d’une réponse, afin d’avoir de plus amples informations sur cette affaire. «Mais à ce jour nous n’a toujours pas reçu de réponse de leur part», indique l’institution à Yahya.
Le père de la famille plaignante réside au Maroc les trois quarts de l’année. Il fait d’interminables va-et-vient auprès des autorités locales. La semaine dernière, la préfecture lui a proposé de porter plainte auprès de la Gendarmerie de Fès. Mais sur place, on lui indique qu’il ne s’agit pas d’une affaire criminelle et qu’il vaudrait mieux déposer une plainte auprès du procureur du roi. Le pot de terre contre le pot de fer.