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Grand Angle

Maroc : L’Etat a-t-il suffisamment indemnisé les mineurs de Jerada ?

Devant le parlement, le ministre de l’Energie, des mines et du développement durable, Aziz Rabbah, a présenté hier quelques chiffres sur les investissements dans la province de Jerada. Yabiladi revient sur ces données, dans un contexte où les acteurs locaux dénoncent la mise à mort de l’activité économique dans leur région.

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Aziz Rabbah, ministre de l’Energie, des mines et du développement durable / Ph. DR
Temps de lecture: 4'

Répondant hier à une question orale devant la Chambres des conseillers, Aziz Rabbah a donné quelques chiffres concernant les investissements engagés dans la province de Jerada, entre 2003 et 2017. Un bilan à relire sur la base de la version des anciens investisseurs étatiques de la mine de Jerada, ainsi que celle des acteurs locaux au sein de la société civile.

Sur quatorze ans, le total de ces investissements a atteint 12,3 milliards de dirhams, avance le ministre. Ce dernier ajoute que ces financements ont concerné les infrastructures, avec «224 projets programmés, pour une enveloppe globale d’environ 1,543 milliards de dirhams». Il indique également que 28 projets dans le secteur productif ont été appuyés à hauteur de 10 milliards de dirhams, «en particulier dans le domaine de l’énergie».

Sur le plan social, Aziz Rabbah estime que les investissements ont concerné «111 projets, pour une enveloppe de 380 millions de dirhams, en plus de 336 projets dans le cadre de l’INDH».

Combien ont touché les ouvriers de Charbonnage du Maroc ?

Dans sa réponse orale, le ministre actuel de l’Energie, des mines et du développement durable indique que le total des indemnités liées à la fermeture de la mine de Jerada en 1998 a atteint «2,2 milliards de dirhams», dont 1,3 sont répartis sur «4 647 employés». Toujours selon Aziz Rabbah, la cession des 1 621 logements de fonction moyenne 10% de leur coût et «de l’indemnité d’environ 25 000 DH allouée aux employés n’ayant pas bénéficié de ces habitations». Le règlement des sommes dues à la CNSS, lui, a atteint les 34 millions de dirhams.

Driss Benhima, directeur général de l’Office national de l’électricité (ONE) et ministre de l’Energie et des mines à l’époque de la mise en arrêt des activités minières à Jerada, avait précédemment indiqué à Medias24 que 3 milliards de dirhams ont été mobilisés pour la fermeture de la mine, «soit 600 000 dirhams de coût par personne». Selon l’ancien ministre, «1,3 milliard ont été alloués pour indemniser les 5000 employés, soit une indemnité moyenne de 260 000 DH». Par ailleurs, «1,7 milliards d’impayés aux caisses sociales» sont allés à la CNSS.

Les détails de la répartition des indemnités

Rachid Essaltani, membre du Collectif des anciens mineurs de Jerada victimes d’anthracose et de leurs familles, précise à Yabiladi que les indemnités perçues par les salariés de Charbonnage du Maroc varient d’un travailleur à l’autre. Selon lui, le montant moyen était de 20 000 DH, en plus du remboursement des frais médicaux pour les ouvriers souffrant d’anthracose.

«Ceux qui ont prouvé qu’ils ont été gravement affectés par l’anthracose ont perçu des sommes descentes, nous explique le jeune dont le père est décédé des suites de la maladie. Un diagnostic de l’état de santé des ouvriers était effectué dans un hôpital spécialisé ici à Jerada. Le problème est que cette maladie ne s’arrête pas aux simples premiers symptômes. La situation empire au fil des mois et des années, ce qui fait que le coût des soins augmentent de plus en plus et l’indemnité fixe n’accompagne plus ces besoins». En outre, Rachid Essaltani relève des cas de fraude :

«Lorsque ces mineurs ont été diagnostiqués pour déterminer les degrés de dommages causés par la maladie sur leurs corps, les résultats ont été changés de manière à sous-estimer plusieurs cas. Par conséquent, les concernés n’ont pas obtenu les indemnités nécessaires, en fonction de la gravité de leur situation réelle.»

Quand au logement, «seuls ceux qui voulaient acheter les maisons dans lesquelles ils résidaient lorsqu’ils travaillaient pour CdM payaient des frais mensuels. C’était optionnel», nous précise Rachid Essaltani. Cependant, la valeur des autres biens de la société devaient revenir à la caisse de la province, afin d’en faire bénéficier les ouvriers. Rachid Essaltani s’interroge sur ce qu’il en est advenu : «Le liquidateur a pris soin de vendre très cher des machines qui étaient utilisées par l’entreprise. Où sont ces retombées ?»

De son côté, Mustapha Selouani, membre de l’UMT à Jerada, relativise les montants avancés qui donne une moyenne élevée. Il explique à Yabiladi que «lorsque Charbonnage du Maroc a fermé en 1998, les ouvriers ont été indemnisés sur la base de leur statut et de leurs fonctions». Ces indemnités n’étaient pas réparties à parts égales, mais estimées sur la base de plusieurs critères, dont l’ancienneté ou la nature du poste (mineur, commis ou ingénieur…). «Certains employés ont reçu 60 000 DH, 80 000 et parfois 120 000, tandis que d’autres ont touché 1 200 000 DH», nous explique le syndicaliste.

Un bilan économique mitigé

«Le gouvernement parle de 12,3 milliards de dirhams allouées à l’investissement dans la province. Nous ne savons pas comment cet argent a été géré», s’indigne Mustapha Selouani. Concernant le budget alloué à l’infrastructure de la ville, le syndicaliste précise que deux grandes places ont été construites à Jerada. Il déplore le fait qu’elles aient «totalement détruit les aspects ouvriers et miniers de la ville». De plus, il s’agit d’«un espace complètement inutile», estime le militant.

«C’est comme s’il avait été créé pour que les jeunes chômeurs viennent passer leurs journées ici, dénonce-t-il. On construit cela au lieu d’initier des projets et de ramener des investissements qui profiteraient à la ville, en générant de l’emploi et des revenus, tout en aidant la ville à retrouver sa prospérité d’avant 1998. Si nos décideurs pensent que rénover un trottoir ou construire une place relancera l’activité économique de Jerada, ils ont tort».

Plus que des infrastructures viables, Mustapha Selouani insiste sur l’urgence de créer des emplois pour les habitants à Jerada. «Certains mineurs ont reçu une compensation qui leur a à peine permis de couvrir leurs besoins quotidiens et ceux de leurs familles à court terme, nous affirme le militant. D’autres ont pu acheter des maisons ou investir à court terme. Mais leurs projets se sont effondrés rapidement et ils ont fini par retomber dans la précarité». Même si les ouvriers ont touché des indemnités en 1998, ces dernières ne peuvent pas constituer des ressources durables, en l’absence d’emplois et de possibilités d’investissement.

Abderahman2018
Date : le 04 janvier 2018 à 17h32
«Le gouvernement parle de 12,3 milliards de dirhams allouées à l’investissement dans la province. Nous ne savons pas comment cet argent a été géré», s’indigne Mustapha Selouani. Concernant le budget alloué à l’infrastructure de la ville, le syndicaliste précise que deux grandes places ont été construites à Jerada. Il déplore le fait qu’elles aient «totalement détruit les aspects ouvriers et miniers de la ville». De plus, il s’agit d’«un espace complètement inutile», estime le militant. ...Suite : https://www.yabiladi.com/articles/details/60643/maroc-l-etat-a-t-il-suffisamment-indemnise.html salam aleykoum il a tous dit...
RIFI.DAHORI
Date : le 04 janvier 2018 à 11h24
Vive le Maroc pays où tout le monde rêverait d'y vivre . Quand je pense aux pauvres habitant de jerada ça me fait mal au coeur.
Dernière modification le 04/01/2018 17:32
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