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Grand Angle

Au Maroc, la richesse augmente au détriment de l’emploi

La croissance marocaine est tirée sur les gains de productivité. Mais ceux-ci détruisent des emplois qui ne sont pas recréés ailleurs, comme l’indique le HCP dans sa dernière étude. Le taux d’inactivité augmente continuellement et tire la croissance vers le bas.

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Les gains de productivité qui détruisent des emplois sont liés à la robotisation, mais également au contexte des affaires, aux investissements... / Ph. DR.
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«Entre 2001 et 2015, la croissance moyenne du Maroc a été de 4,3%. Avec une croissance démographique de 1,1%, nous avons enregistré une hausse du niveau de vie de 3,2% : ce n’est pas beaucoup», concède Ayach Khellaf, directeur de la prévision et de la prospective au HCP. Il présentait mercredi des études sur les sources de la création de la richesse au Maroc et sa répartition.

Les déterminants de la croissance – les facteurs qui concourent à l’augmentation de la richesse au niveau d’un pays – peuvent être abordés de bien des façons. Le HCP, lui, estime l’augmentation de la richesse demande une population importante en nombre (croissance démographique). Cette dernière travaille (taux d’emploi) et le fait efficacement (gains de productivité). C’est ainsi qu’elle crée la richesse, mesurée par la croissance du PIB.

«La transition démographique offre actuellement au Maroc une fenêtre d’opportunité qu’il faut savoir saisir : la population active augmente depuis plusieurs années, commente Ayach Khellaf, directeur de la prévision et de la prospective au HCP,le facteur démographique est donc très positif. Pourtant la croissance est assez faible,insuffisante pour nous permettre de converger vers le niveau de vie des pays développés, alors où est le problème?»

Croissance tirée par les gains de productivité

En effet, la croissance est tirée à 92% par les gains de productivité du travail. C’est-à-dire, par l’augmentation de l’efficacité des travailleurs. Ils produisent de plus en plus, en moins en moins de temps. Logiquement, ce phénomène entraine des destructions d’emploi – il faut de moins en moins de personnes pour faire un même travail –. Mais au Maroc, ces nouveaux chômeurs ne retrouvent plus de travail ailleurs.

«Il est normal que les gains de productivité entrainent des destructions d’emplois. Mais les travailleurs qui perdent leur emploi devraient logiquement en trouver un autre: de l’agriculture, ils passeraient dans l’industrie; dans l’industrie, ils changeraient de sous-secteur. Ce qui n’est pas normal, c’est que cette mobilité est extrêmement faible», souligne Ahmed Lahlimi Alami, Haut-commissaire au Plan.

L’agriculture emploie près de 40% de la population active. Entre 2001 et 2015, la productivité du travail a contribué à hauteur de 25% à la croissance du secteur, ce qui a entraîné une destruction d’emplois. Le taux d’emploi dans l’agriculture a baissé de 1,3%. Idem, dans l’industrie non-extractive, la productivité a contribué de 15% à la croissance du secteur : le taux d’emploi a baissé de 1,1%.

Seul le BTP et le commerce créent de l’emploi au Maroc. «On a constaté un basculement en 2008. Avant la crise financière mondiale, l’emploi contribuait de 5,4% à la croissance du PIB par habitant. Depuis 2008, sa contribution est négative : il tire la croissance vers le bas de 35,3% !», souligne le directeur de la Prévision et de la Prospective.

En somme, les activités économiques au Maroc sont de plus en plus performantes, mais elles créent peu d’emploi de sorte qu’elles mettent au chômage tous ceux dont elles n’ont plus besoin. Pire, ce phénomène, depuis 2008, a tendance à s’accentuer.

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