Des pensés qui traversent les routes du temps et s’accrochent aux arbres inanimés pour que le vent de la tempête venant du sud ne les éloigne pas plus qu’elles ne le sont déjà. La saison de migration vers le nord a épuisé le corps de cette terre fragile qui ne cesse de faire le deuil de ses enfants que les marchands de sables ont kidnappés une nuit d’hiver, les arrachant des bras de leurs collines, où ils étaient souverains. Pour les vendre dans les obscurités des terres du nord, les obligeant à mendier un semblant d’existence dans une terre manquant de chaleur et de soleil éclairant leurs rêves.
Les terres du nord dont la solitude est décelée derrière la densité du brouillard qui emprisonne ces âmes bohèmes, abandonnées par l’espoir et harcelées par la tombe d’un exil assassin.
Cette terre dont les adieux ont épuisé le corps, et dont la solitude a brisé l’existence. Dont les yeux sont devenus secs à force de pleurer le souvenir d’un enfant qui l’a quitté sans certitude d’un retour possible un jour. Une terre dont le cœur mourant danse sur les notes des chants tristes d’un oiseau qui se donnait au rituel annonçant l’approche d’un autre moment d’adieu et le périple d’une autre errance interminable.
Des souvenirs qui disparaissent avec le vent qui traverse les collines de cette terre, les emportant avec lui dans les obscurités d’un passé qui se donne la joie d’enterrer les êtres et leurs mémoires. Des noms et des visages qui sont obligés de parcourir les routes d’un destin de néant. Que la cruauté d’une existence pesante ne cesse de sacrifier en hommage à l’illusion d’un semblant de délivrance qui ne viendra jamais.
Des abondons qui se multiplient et des blessures qui s’ouvrent sans jamais se refermer. Où un enfant, qui crie le nom d’un père qui n’existe que dans son imaginaire, passant sa vie dans l’attente de ce père. Ou à défaut, l’heure du départ pour rejoindre le souvenir des autres dans les horizons de l’oubli. Laissant cette pauvre terre noyée dans ses larmes, essayant de s’accrocher à l’espoir d’un lendemain de retrouvailles, qui n’arrivera peut être jamais.
Une terre qui a pris cet enfant dans ses bras le premier jour de sa venue dans ce monde. Cette même terre qu’il l’a vu grandir, lui apprenant à sourire et à rêver. Cette même terre a été quittée par cet enfant, devenant adulte, un matin d’hiver sans même la regarder dans ses yeux pleins de larmes et d’abandon. Cette terre dont les appels et les gémissements de douleurs nous atteignent malgré les distances et les illusions de l’exil.
Cette terre à qui nos cœurs ne cessent de répéter pardon de t’avoir abandonné un jour où nous avons perdu notre raison de vivre entre tes bras. Un jour où le monde se satisfaisait à lui-même, nous obligeant à aller nous chercher une autre vie ailleurs, et surtout espérer retrouver de l’espoir. Ce sentiment qui a déserté nos vies depuis la nuit des temps. La cruauté du temps et des gens nous ont séparés, mais sache que notre amour pour toi est intemporel.