Quelques heures après l’annonce du verdict de la Chambre criminelle près la cour d’appel de Salé, l’ONG Amnesty International a réagi à la condamnation de 23 Marocains originaires du Sahara, impliqués dans les affrontements du démantèlement du camp de Gdim Izik en 2011. Un procès qui a échoué à écarter des preuves et des allégations de torture exprimées par les détenus tout au long du procès, commente la section maghrébine d’Amnesty International.
«Au cours du procès, la plupart des accusés ont déclaré à la Cour qu'ils ont été torturés pour ‘se confesser’, ‘s’auto-incriminer’ ou incriminer d'autres personnes. Si le tribunal était sérieux dans l’assurance de leur offrir un procès équitable, il aurait mené des enquêtes appropriées sur ces allégations de torture ou exclu les preuves douteuses au cours des audiences», a déclaré Heba Morayef, directrice de recherche pour l’Afrique du Nord à Amnesty International.
«L'échec des autorités judiciaires, sur plus de six ans, à enquêter adéquatement sur les allégations de torture est une tâche qui assombrit le verdict d'aujourd'hui.»
Les rapports médicaux sept ans après les faits présumés
Rappelant que le tribunal «n'a pas encore rendu publique sa décision écrite détaillant et justifiant les peines prononcées ce matin», l’ONG estime que malgré les récentes réformes judiciaires, les tribunaux marocains ont «condamné à plusieurs reprises des détenus sur la base de leurs déclarations à la police lors d'un interrogatoire, sans enquêter adéquatement sur les allégations de torture».
Lundi, l’ONG a considéré que «le Maroc a pris une mesure positive en ordonnant un nouveau procès devant une instance civile», mais qu’«il devrait encore veiller à ce que nul ne soit déclaré coupable sur la base de preuves extorquées sous la torture». Amnesty International a rappelé que «des médecins ont examiné les accusés (du procès de Gdim Izik, ndlr) en février et en mars, près de sept ans après les faits présumés de torture».
«Les rapports médicaux (…) notent des formes de torture et de mauvais traitements que chacun des accusés affirme avoir subis. Ils affirment notamment avoir été roués de coups, parfois alors qu'ils étaient suspendus par les poignets et les genoux, et avoir subi des sévices sexuels (y compris des viols à l'aide d'un objet)», poursuit l’ONG. Des rapports qui, toutefois, se terminent par la même phrase, à quelques variations près : «Les symptômes qu'il présente actuellement et les éléments que nous avons constatés au cours de l'examen ne sont pas spécifiques aux méthodes précises de torture dénoncées», poursuit-elle.
Les peines incriminant certains responsables des événements de Gdim Izik sont tombées à l’aube ce mercredi 19 juillet. Elles varient de deux ans de prison ferme à la perpétuité. Les peines ont été prononcées par la Chambre criminelle près la cour d’appel de Salé, indique l’agence MAP.