Le bloc des Etats africains pro-Polisario a fini par rompre le silence au lendemain de l’adhésion du Maroc à l’Union africaine, dont le retour a été annoncé en marge du 28e Sommet de l’organisation panafricaine tenu à Addis-Abeba les 30 et 31 janvier. Ce mardi, le Congrès national africain (ANC), principale formation politique en Afrique du Sud a qualifié de «regrettable» la décision prise par l’Union africaine de réadmettre le Maroc en tant que membre.
Le Maroc, «l'un des derniers colonisateurs sur le continent»
«Cette décision représente un revers important pour la cause du peuple sahraoui et sa quête de l'autodétermination et de l'indépendance au Sahara occidental», a déclaré le président du sous-comité des relations internationales de l'ANC, Edna Molewa, dans un communiqué relayé par le média sud-africain News 24.
Le responsable du parti historique de Nelson Mandela a rappelé que l'ANC, «allié de longue date du Sahara occidental», avait soutenu le peuple sahraoui «dans sa lutte pour la libération contre le Maroc, l'un des derniers colonisateurs sur le continent». «L'ANC, tout en respectant la décision de l'UA, espère que dans les prochains mois, l'organisation panafricaine ne permettra pas que la question de l'indépendance du Sahara occidental soit balayée sous le tapis de l'opportunité politique», a-t-il conclut.
Le média sud-africain rappelle que des pays dirigés par d'«anciens mouvements de libération sur le continent», dont l'Afrique du Sud, le Zimbabwe, la Namibie, le Mozambique, le Botswana et l'Algérie s'étaient opposés à l’adhésion du Royaume du Maroc avant que l’UA puisse trancher lundi après-midi.
Citant Herald, journal étatique du Zimbabwe, la même source avance que le président Robert Mugabe avait été «ferme» au cours des décennies sur le soutien de son gouvernement à l'indépendance du Sahara occidental. Le média ne manque pas de rappeler les liens «forts» entre l’Afrique du Sud et la «RASD», notant que Brahim Ghali était l’invité spécial lors du 105ème anniversaire de l'ANC au stade Orlando de Soweto au début de ce mois.
Le Polisario s’active parallèlement au retour du Maroc
De son côté, le site officiel du Front Polisario a fait état, mardi, de plusieurs rencontres menées par Brahim Ghali à Addis-Abeba en marge du 28e Sommet de l’Union africaine. Le chef du Polisario aurait rencontré le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, le président tanzanien John Magufuli et le président zambien Edgar Lungu. Des pays qui ont voté pour le retour du Maroc à l’UA.
Brahim Ghali a également rencontré quelques chefs d’Etat qui ont voté contre le retour du Maroc et notamment le président namibien Hage Geingob, le président sud-africain Jacob Zuma, le président du Zimbabwe, Robert Mugabe ainsi que le Premier ministre algérien Abdelmalek Sellal, rapporte la même source. L'Algérie a cependant adopté une stratégie différente des pays d'Afrique australe. Plutôt que de ruminer la défaite, les responsables algériens évoquent une grande victoire.
Abdelmalek Sellal, cité par Radio Algérie, a déclaré aujourd'hui que l’adhésion du Maroc à l’Union africaine est une «grande victoire pour l’affaire du Sahara occidental». «Il y a des conditions pour les pays souhaitant adhérer. La Charte de l’UA est assez claire. Le Maroc doit adhérer à cet acte. Son adhésion s’est faite selon les conditions et les termes de l’Union africaine», a-t-il souligné. La radio algérienne donne aussi la parole à Mohamed Salem Ould Salek, «ministre des Affaires étrangères de la RASD», selon qui «l’adhésion du Maroc à l’UA est une victoire pour la RASD et le Front demeure disposé à négocier avec le Maroc pour mettre fin à la colonisation des terres sahraouies».
L'Algérie et le Polisario ont donc tout fait ces derniers jours pour empêcher de remporter «une aussi belle victoire» qu'ils revendiquent aujourd'hui.