De prime abord, le textile ne soulève peut-être pas grand enthousiasme. A contrario des énergies vertes, de l’automobile, l’aéronautique ou encore l’agriculture, celui-ci ne semble pas avoir la folie des grandeurs. On ne peut pas non plus dire qu’il ait la cote dans les médias : les ambitions portées par les acteurs économiques et industriels du royaume pour ces secteurs lui feraient presque de l’ombre.
Pourtant, certains chiffrent changent la donne et insufflent à la filière un nouvel élan. A l’export, le textile pèse 3 milliards d’euros, selon l’Usine nouvelle. «A fin avril 2016, nous avions atteint 5 % de croissance sur l’année», s’était réjoui Mohamed Tazi, directeur général de l’Association marocaine des industries du textile et de l’habillement (Amith). Celui-ci était d’ailleurs de bon augure : «Les perspectives sont bonnes pour le reste de l’année. Les carnets de commandes sont pleins jusqu’à fin août, ce qui n’est pas coutumier par rapport aux années précédentes».
Des prouesses et des couleurs
Six mois plus tard, l’horizon semble encore plus dégagé, sinon prometteur. Trois nouveaux écosystèmes textiles pour les filières «maille», «textile de maison» et «textile à usage technique» ont été lancés jeudi 6 octobre, à l’issue de la signature de trois accords entre le ministère de l’Industrie, du commerce, de l’investissement et de l’économie numérique et l’Amith. Les objectifs sont prometteurs : créer 16 763 emplois et 20 projets d’investissements impulsés grâce à des locomotives et réaliser un chiffre d’affaires additionnel de 8,4 milliards de dirhams.
Ces trois écosystèmes permettront d’«[apporter] des réponses concrètes aux défis auxquelles elles sont toujours confrontées, à savoir, notamment, l’amélioration de la compétitivité de l’offre Maroc, le développement de l’amont des filières et de l’innovation pour mieux se positionner sur le marché local et capter sa croissance (…) ainsi que l’intégration des opérateurs informels», prévoit-on au sein du département de Moulay Hafid Elalamy.
Sur le premier semestre 2016, le Maroc enregistre 11,3 % de croissance sur les exportations textiles à destination de l’Union européenne par rapport à la même période en 2015, d’après Eurostat. «C’est la troisième meilleure performance mondiale sur le marché européen», précise Mohamed Tazi, joint par Yabiladi. Le secteur «a fait preuve de résilience par rapport à ses concurrents», après une mauvaise passe entre 2009 et 2011 à cause de la crise économique. De lointains souvenirs, estime aujourd’hui le président de l’Amith : «On peut désormais parler de véritables prouesses. Depuis 2012, on a constaté une progression de 33 % des exportations à destination du marché européen. C’est à partir de cette année là qu’on a décelé les premiers changements de paradigmes à l’échelle internationale. Le secteur a pris de réelles couleurs».
37 conventions et 33 000 nouveaux emplois
Les clés du succès ? Mohamed Tazi est un observateur perspicace. Philosophe, il dit : «Il n’est pas de bon vent pour qui ne connaît pas son port», empruntant la citation à Sénèque. Traduction : les objectifs doivent avant tout être clairement définis. De là découle la mise au point d’une stratégie : «On a réorganisé le secteur à travers des écosystèmes, poussé les entreprises à travailler dans une même chaîne de valeur, mis en synergie nos forces pour qu’elles portent mieux». Et loin. D’ici à 2020, le textile doit parvenir à 5 milliards de dirhams sur le front des exportations et générer 90 000 emplois.
A l’heure actuelle, 37 conventions d’investissement ont été signées entre l’Amith et le ministère de l’Industrie, qui ont accouché de 33 000 nouveaux emplois - « le tiers de l’objectif initial», abonde Mohamed Tazi. Sans compter près d’un milliard de dirhams d’investissement depuis fin février 2016, date de la signature des premières conventions.
Pour drainer les investissements, l’Amith tape aussi à la porte des investisseurs. L’association s’est dotée d’une cellule d’animation pour accompagner les entrepreneurs, des premières ébauches du projet jusqu’à son aboutissement. «TPE, PME, provinciaux, nationaux, étrangers, en amont ou en aval ; nous avons des offres pour chaque catégorie d’acteurs».