Le 20 juin 1981 est une date sombre dans ce qui est appelé communément les «années de plomb». La grève générale lancée par la CDT, une scission de l’UMT en 1978, avait tourné au drame, causant des centaines de morts parmi les habitants de Casablanca souvent tombés sous les balles des différents corps des forces de l’ordre (police, Forces auxiliaires et armée)». Une intervention brutale qui n’est pas sans rappeler l’autre grande manifestation du 23 mars 1965, réprimée dans le sang.
A l’origine de la grève générale de 1981, la décision de la CDT, à l’époque une émanation de l’USFP, de protester contre les hausses des prix de produits de consommation courante, décrétées le 28 mai par le gouvernement Maâti Bouabid I (27 mars 1979 au 5 octobre 1981) : la farine (40%), le sucre (50%), le beurre (76%), l’huile (28%) et le lait (14%). Des augmentations qui s’ajoutaient à celles opérées en 1979 et 1980, sensées renflouer les caisses de l’Etat largement affectés par la baisse des cours des phosphates sur le marché mondial.
Des familles de disparus veulent connaître les tombes de leurs proches
Plusieurs décennies après ces événements, il est toujours difficile d’établir un bilan exhaustif de l’intervention des forces. La version officielle des autorités marocaines avançaient le chiffre de 66 morts dans les rangs des «casseurs». L’ancien ministre de l'Intérieur, Driss Basri, les avait traités de «martyrs de la Koumira» (martyrs de la baguette de pain) à la Chambre des représentants.
En revanche, la CDT et l’USFP ont estimé le nombre des tués à plus de 600 personnes, enterrées dans des fosses communes. En témoigne la découverte en décembre 2005 à Casablanca de trois charniers dans une caserne de la protection civile contenant 77 corps.
Les recherches menées par l’Instance Equité et Réconciliation avaient permis l’identification des victimes. Mais depuis l’expiration du mandat de l’IER (le 30 novembre 2005), le CCDH et son successeur le CNDH, mandatés pour poursuivre la mission de l'instance, n’ont annoncé aucune avancée sur le sort des autres disparus. A chaque triste anniversaire de la grève générale de 1981, les familles des disparus réclament la vérité sur le sort de leurs proches.