L'heure serait venue de «jeter à la poubelle la constitution» et d'entamer une «authentique campagne de nettoyage des réseaux de népotisme pour rendre à la population ses biens spoliés», affirmait Nadia Yassine dans une interview accordée au quotidien espagnol El País et publiée mercredi 9 février. Elle vient ainsi corroborer les déclarations faites par Al Adl Wal Ihssane lundi dernier sur l'imminence d'un changement politique profond au Maroc.
Le fait qu'à ce jour, il n'y ait pas eu de grands soulèvements comparables à ceux en Tunisie ou en Egypte ne voudrait rien dire, selon elle. C'est «le calme qui précède la tempête», estime la fille du cheikh Abdessalam Yassine, leader historique du mouvement Justice et Bienfaisance qui serait la première force d'opposition (non-légale) au Maroc avec quelques 200 000 militants.
Celle qui est à la tête de la branche féminine d'Al Adl Wal Ihssane est revenue sur les différences mises en avant entre la Tunisie et l'Egypte d'une part, et le Maroc de l'autre. Selon elle, ces différences seraient plus une illusion. «On croit que le Maroc est différent parce-qu'il est régi par une institution royale centenaire, que son souverain est jeune» et qu'il aurait une «auréole de Roi des pauvres», explique Nadia Yassine. D'autre part, les observateurs penseraient que le Maroc ne soit pas prêt pour une démocratie à cause de l'analphabétisme encore très répandu dans le pays.
Mais d'après Nadia Yassine, certaines réalités contredisent la thèse de l'exception marocaine. Le chômage, qu'elle situe à 20% (10% de plus que les chiffres officiels), les conditions de plus en plus difficiles pour émigrer et chercher le salut ailleurs, et le népotisme qui donne lieu à une corruption effrénée seraient des problèmes que le Maroc partage avec d'autres pays du monde arabe. Tout comme des facteurs moins tangibles avec en premier lieu le sentiment de la «hogra» (injustice).
«Toute manifestation pacifique aura notre soutien»
Interrogée sur la participation du mouvement Al Adl Wal Ihssane aux manifestations prévues le 20 février au Maroc, Nadia Yassine tient à nuancer. Elle estime son mouvement «précurseur» dans l'organisation de «manifestations pacifiques», notamment durant les «années de plomb». Elle affirme ne pas savoir si les dirigeants du mouvement décideront de soutenir les manifestations ou pas, «mais je pense que toute manifestation pacifique, civilisée, organisée et où il est sûr qu'elle ne se transforme pas en mutinerie violente, pourra compter sur notre soutien».