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Grand Angle

Maroc : La mobilisation contre la destruction des dunes de Mohammedia désormais internationale

Les habitants du quartier la Siesta de Mohammedia et les écologistes marocains ne sont plus les seuls à demander l’arrêt de la destruction des dernières dunes de sable de cette ville côtière, située près de Casablanca. D’Europe, d’Amérique et même d’Asie, les amoureux du Maroc en appellent aux autorités. Mais de leur côté, la commune de Mohammedia ainsi que le promoteur invoquent, chacun, le respect de la loi.

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Qu'ils viennent de France, d’Allemagne, de la Chine, de la Malaisie ou même des Etats-Unis, de nombreux messages de soutien aux habitants du quartier la Siesta de Mohammedia sont publiés sur Facebook depuis hier, dimanche 18 avril. Aux côtés du coprs médical et du corps enseignant à Casablanca, tous appellent à «sauver les dunes de Mohammedia».

Ils viennent ainsi en renfort à l’appel lancé au roi Mohammed VI, vendredi dernier, par l’Association des résidents de la Siesta et les écologistes marocains pour stopper la destruction des dernières dunes de sables de la plage de la ville. En effet, des travaux de lotissements engagés par un promoteur immobilier il y a quelques mois ont déjà commencé à détruire les dunes. Ce qui inquiète les habitants de la côte, en raison du rôle protecteur des dunes face à la montée des eaux de la mer qui expose d'autant plus le littoral marocain face aux changements climatiques.

Le combat continue pour les habitants

Le promoteur, la société La Siesta, a prévu de construire un mur de soutènement pour protéger les habitations. Mais selon certains experts, ce mur ne pourrait jamais faire le travail des dunes. Alors que les plaintes des habitants avaient eu de l’écho auprès des autorités de la ville qui avaient ordonné l’arrêt des travaux de lotissement entrepris sur la plage, ils ont constaté un redémarrage la semaine dernière. Hier, lundi après-midi, l’Association des résidents de la Siesta a pu obtenir une «rencontre officieuse» avec des responsables de la commune de Mohammedia.

«La rencontre a duré 2h30. Ils nous ont dit que la mise à jour du domaine maritime n’a pas été faite depuis 1992 et les différentes commissions qui se sont rendues sur le chantier l’ont déclaré hors domaine maritime», explique à Yabiladi, Nadia Hmaity, présidente de l’association. «Mais nous dénonçons l’attribution d’une autorisation après l’entrée en vigueur de la loi sur le littoral», clame-t-elle, rappelant que la loi a été publiée au Bulletin officiel en août 2015, et l’autorisation de construire a été attribuée au promoteur en septembre 2015. «Nous dénonçons le non-respect de l’article 55», martèle la responsable associative. Rappelons déjà, que selon l’article 15, la partie adjacente au littoral d'une largeur de 100 m, calculée à partir de la limite terrestre de ce littoral est déclarée «zone non constructible». Et l’article 55 stipule, à son tour, qu’«à compter de la date de publication de la présente loi, ne peut être autorisée, à l'intérieur de la zone visée à l'article 15 ci-dessus, l'extension ou la modification substantielle de constructions et installations existantes avant l'entrée en vigueur de cette loi, à l'exception des travaux d'entretien et de restauration desdites constructions et installations».

Respect de la loi selon les autorités et le promoteur

Depuis la médiatisation de cette situation, les autorités ont très peu ou pas du tout communiqué sur le sujet. Joint par nos soins, le vice-président de la commune de Mohammedia chargé de l’urbanisme, Mohamed Farid Ouldhmia, s’est plutôt montré réceptif. «Les terrains ne relèvent pas du domaine maritime. Une lettre de la direction régionale de l’équipement l’atteste», déclare-t-il. «Nous avons réagi en tant que commune par rapport aux doléances des habitants. Nous avons mandaté une commission qui a confirmé qu’il ne s’agit pas du domaine maritime», ajouté le responsable communal préférant recevoir par courriel les questions détaillées. Pour l’instant, nous n’avons pas encore pu obtenir un entretien avec la direction régionale de l’Equipement et du transport.

De son côté, le promoteur dit respecter la loi. «Nous sommes en train de travailler conformément aux normes. On a suivi la loi à la lettre», déclare à Yabiladi Chouaib El Mouchtari, représentant de société La Siesta. «Les dunes n’ont pas été rasées. Nous sommes plutôt en train de ramasser le sable qui était tombé sur nos terrains», ajoute-t-il. Les habitants avaient également dénoncé la destruction de la végétation des dunes, mais le promoteur assure la «replanter pour faire quelque chose de fleuri, de beau…». «De plus, le mur de soutènement va protéger les dunes des fortes vagues et c’est nous qui l’avons proposé pour le bien et la sécurité de tous», explique M. El Mouchtari, soulignant que la réalisation de ce mur nécessitera «trois à quatre millions de dirhams».

D’après lui, la reprise du chantier a été autorisée après une nouvelle étude menée à la demande de la commune et prenant en compte les changements climatiques y compris les phénomènes rares. Selon M. El Mouchtari, la moitié des terrains gérés par La Siesta appartient à la société, tandis que l’autre moitié appartient à «des personnes qui vivent en France» et les acquisitions les plus récentes date des années 90. «On n’a pas construit parce que nous avions des problèmes d'héritage après la mort d'un des associés… Sinon l’autorisation du lotissement date de 1978», assure-t-il. Pour lui, l’Association des habitants de la Siesta veut «déformer la loi». «L’article qu’ils brandissent n’est pas applicable aux zones urbaines», dit-il.

«Les présidents de commune doivent savoir qu’ils peuvent désormais être poursuivis»

Mais du côté des écologistes, les arguments de la société sont loin de convaincre. «La loi relative au littoral est claire, toute la zone de 100 m à partir du domaine public maritime est déclarée non constructible. Et depuis l’entrée en vigueur de cette loi les présidents de commune doivent savoir qu’ils n’ont plus le droit d’autoriser des constructions sur le littoral maritime, même s’il s’agit de terrains hérités», défend Mohamed Benata, président de l’association Espace de Solidarité et de Coopération de l’Oriental (ESCO) qui milite depuis de années entre autre pour la protection du littoral dans la région.

A Saïdia, il y a quelques années de cela son combat a été peut porteur en raison des lacunes juridiques. «Je ne trouvais pas un instrument juridique très fort pour arrêter les chantiers. Il y avait la loi de mise en valeur et de protection de l’environnement, mais elle ne permettait pas aux juges de statuer convenablement», explique l’écologiste qui se réjouit de l’existence de la nouvelle loi sur le littoral. «Malgré ses failles, c’est un puissant instrument juridique, poursuit-il. Et les présidents de commune doivent savoir qu’ils peuvent désormais faire l’objet de poursuites pour avoir attribué des autorisations de constructions sur le littoral».

En attendant l’issue de cette affaire, les messages de soutien à la cause écologique se multiplient. Les derniers émis au moment où nous publions cet article viennent de Suisse et du Koweït.

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