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Grand Angle

Les musulmans de France premières victimes de l'Etat d'urgence

Perquisitions «abusives», assignations à résidence, l’Etat d’urgence ratisse large en France suite aux attentats du 13 novembre à Paris, suscitant l’incompréhension au sein de la communauté musulmane. Explications.

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«On s'est battu pour avoir ce qu'on a, on travaille, et aujourd'hui on nous tombe dessus. Pourquoi ? Parce qu'on est des musulmans, mais on ne va pas se cacher parce qu'on est musulman», déclare en larmes à l’AFP l’épouse de Karim, un parisien de 37 ans assigné à résidence, car «considéré comme très radical» par la police et accusé de s’être «publiquement félicité» des attentats de janvier.

Cependant l’homme assure n’avoir aucunement le profil d’un radical. «Un radical pour moi il ne fait pas la bise aux femmes, n'a pas la télé chez lui, il empêche sa femme de partir seule en vacances, il ne fête pas Noël ou Halloween et il s'en fout de la vie», estime-t-il. Son assignation à résidence, il la vit tel un «cauchemar» : «Vous êtes emprisonné, mais chez vous».

Le sentiment est le même chez Rachid Bouaziz. Ce bagagiste à Roissy dénonce une assignation à résidence abusive. Comme tous les autres assignés, il doit se rendre quatre fois par jour à la gendarmerie et ne pourra reprendre le travail qu’une fois l’assignation levée. L’homme est pourtant décrit comme ayant un «style de vie laic». Son casier judiciaire est vierge et il n’est aucunement fiché S.

«Perquisitions abusives» : Domiciles, resto, lieux de cultes…

Voilà donc le quotidien de nombreux musulmans en France depuis les attentats du 13 novembre, avec le décret instaurant l’Etat d’urgence. Ces assignations à résidence sont les résultats de nombreuses perquisitions réalisées par les forces de l’ordre, lesquelles ne sont pas limitées aux domiciles de citoyens musulmans, mais aussi aux commerces.

A Cannes en effet, le snack Must Kebab a été perquisitionné la semaine dernière, sans que le motif ne soit précisé. Dans le Val d’Oise, la presse parle de la «perquisition musclée» d’un restaurant halal, Perper Grill, en pleine ouverture. Les convives ont été empêchées de sortir, les portes défoncées…

En Rhône Alpes, une fausse alerte dans un hôtel après des doutes sur un véhicule immatriculé en Belgique a donné lieu à la descente d’une centaine de policiers. Estimant sa réputation salie, le gérant entend «réagir». A Nice, une fillette de 6 ans a été blessée au cou par des éclats lors d’une intervention de la police qui s’étaient en plus trompés d’appartement. Pour ne citer que ceux-là.

Un Maire adjoint «scandalisé»

Même les lieux de culte n’y échappent pas. A Aubervilliers, la perquisition d’une mosquée laisse perplexe l’association gestionnaire, l’AMA (Association des musulmans d’Aubervilliers). Des plafonds détruits, des portes défoncées alors que le responsable présent en avait les clés. Pourtant, «les prêches des imams sont enregistrés et à disposition de la justice. Il n’y a aucun souci. C’est une mosquée connue et reconnue. Nous sommes cleans et impliqués localement dans la vie culturelle et politique», assure au Parisien le président Chiheb Harar.

Sur Facebook, le Maire adjoint, Sofienne Karroumi, s’est dit «scandalisé par l’état des lieux après la perquisition», précisant qu’il ne conteste pas la perquisition, mais «ne comprend pas la façon dont elle s’est passée». Et c’est surtout cela qui dérange les Français musulmans qui expriment en masse leur colère, inquiétude et consternation sur les réseaux sociaux.

Les ONG se mobilisent

Pour aider les musulmans à faire face à la situation actuelle, les associations se mobilisent. Le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) a lancé, ce jeudi, un guide pratique explicatif de la mission des forces de sécurité et des droits des citoyens en cas d’abus. BarakaCity dont les locaux ont été perquisitionnés ce matin «en toute politesse», selon l’ONG, se dit solidaire de toutes les victimes d’abus.

La Quadrature du Net (abrégé LQDN), quant à elle, fait actuellement le «recensement des joies (ou pas) de l'état d'urgence en France», dans l’objectif de les utiliser notamment lors de la modification constitutionnelle annoncée par le gouvernement pour une extension / pérennisation de l'état d'urgence.

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