«Ce que nous craignons le plus avec ce genre d'événement, c’est l’amalgame. A notre petit niveau nous communiquons pour montrer aux gens ce qu’est réellement le Maroc et nous espérons que les autorités mobiliseront suffisamment de moyens pour une plus grande communication à l’internationale, de sorte à véhiculer la vraie image du Maroc», déclare à Yabiladi Badr KaouKaoui, co-directeur de l’agence de Voyages My Morocco à Marrakech.
Un avis partagé par plusieurs acteurs du secteur. Et pour cause, tous s’attendent naturellement à un impact négatif suite à l’attentat survenu vendredi dernier à Sousse en Tunisie. D’ailleurs certaines autorités en Europe mettent en garde leurs ressortissants contre le tourisme en Afrique du Nord cet été. C’est le cas notamment de la Grande Bretagne qui a cité le Maroc parmi les pays à risque, même s’il elle a mis un accent sur le dispositif sécuritaire mis en place par les autorités chérifiennes.
Les prix promotionnels ne résoudront pas tout
Bien avant cet événement tragique, le secteur essuyait déjà une baisse de 46% des arrivées de touristes français sur les 5 premiers mois de l’année, comme révélé vendredi dernier par le Syndicat national des agences de voyages (SNAV). Et à en croire les professionnels, cette baisse est quelque peu généralisée, même si celle des Français est particulière marquée.
Pour faire face à la crise, les prix promotionnels représentent l’arme des opérateurs, et ce tous segments confondus. D’ailleurs, les «prix cassés» - comme qualifiés par les professionnels - font de Marrakech la 8ème ville la moins chère au monde cet été dans l’indice du voyage 2015 de Trip Advisor. Et plusieurs opérateurs prévoient des offres encore plus intéressantes dans les prochaines semaines.
C’est le cas de My Morocco par exemple, même si son co-directeur estime tout de même qu’il faut «des promotions réfléchies». «Il ne faut pas brader la destination, parce que même si les prix sont attractifs, les gens ne viendront pas s’ils ont peur», juge-t-il. «Une fois que les gens sont gagnés par la peur, c’est fini», appuie Halima Drouri, chef d’agence chez Tombouctour. Toutefois, elle garde espoir, car son agence a plusieurs arrivées prévues à partir de demain, mardi. «J’espère qu’il n’y aura pas d’annulations», lance-t-elle, se disant plus réceptive pour des reports.
«Il ne s’agit pas de faire prévaloir les intérêts économiques»
Pour plusieurs autres professionnels joints par Yabiladi, l’inévitable est d’observer un «ralentissement important du niveau des réservations pour séjour». D’après eux, c’est le moment pour les autorités de mettre les bouchées doubles dans la communication. C’est également la position de la Confédération nationale du tourisme (CNT), et ce bien avant l’attentat de Sousse.
Ici, le directeur général Saïd Tahiri se veut avant tout compatissant vis-à-vis du pays voisin. «Aujourd’hui, nous sommes en deuil, nous ne voulons pas faire prévaloir les intérêts économiques sur l’humain. Mais lors du dernier congrès de la CNT le 13 juin à Marrakech, nous avons appelé à une augmentation du budget de l’ONMT [Office nationale marocain du tourisme, ndlr] pour la promotion du Maroc», explique-t-il à Yabiladi, soulignant qu’il est impératif pour le Maroc depuis longtemps d’améliorer ses techniques de communication et qu’aujourd’hui, l’urgence se fait encore plus ressentir.
«Certains cherchent souvent à transporter les problèmes chez nous alors que le Maroc est connu pour sa stabilité. Il faut donc des actions de communication directe quand il y a une crise», ajoute-t-il, relevant que cela permettrait aux potentiels touristes d’être rassurés par les différentes mesures sécuritaires prises par les autorités.
Saïd Tahiri pense que Rabat est sensible à ces questions. Il annonce d’ailleurs des discussions –à ce propos- dans les prochains jours entre le CNT, le ministère du tourisme et l’ONMT. Interrogé par l’Economiste, le président de l’Office, Abderrafie Zouiten s’est montré plutôt optimiste. «La meilleure réponse à ces actes terroristes est de travailler et de continuer d’y croire», a-t-il déclaré. Les yeux des professionnels sont donc désormais braqués sur Rabat.