Tahera Ahmad, 31 ans, n’oubliera certainement jamais cette journée du 29 mai 2015. Aumônière à l'Université Northwestern de Chicago, elle voyageait à bord d’un vol de United Airlines pour participer - à Washington - à une conférence pour la promotion du dialogue entre les jeunes Israéliens et Palestiniens. Tout se passait bien, jusqu’à ce qu’arrive l’heure du brunch.
Discrimination
Chaque passager commandant à son goût, Mme Ahmad demande une canette de Coca Light. L’hôtesse se déplace et lui ramène une canette déjà ouverte, mais la jeune femme en demandera une fermée. «Eh bien, je suis désolé, je ne peux pas vous donner une canette non ouverte, donc pas de Coka Light pour vous», répond l’hôtesse, d’après le récit de la jeune musulmane sur sa page Facebook.
Chose curieuse, Mme Ahmad semble être la seule concernée par cette «règle». En effet, au moment où elle est privée de sa boisson, l’homme assis à côté d’elle reçoit une canette de bière fermée. C’est alors que la conférencière interroge à nouveau sur les raisons du traitement qui lui est réservé. «L’hôtesse m’a répondu: "nous ne sommes pas autorisés à donner des canettes non ouvertes aux gens parce qu'ils peuvent les utiliser comme une arme dans l'avion"», rapporte la jeune femme, soulignant qu’elle a immédiatement signifié à l’hôtesse que c’est un acte discriminatoire de lui refuser une canette fermée et d’en donner une à son voisin.
Sur le champ, l’hôtesse prend la canette de bière du passager, l’ouvre et lance : «c’est ouvert, vous ne pourrez pas l’utiliser comme une arme». Mme Ahmad regarde alors autour d’elle et appelle à témoin les autres passagers de la discrimination dont l’hôtesse a fait preuve. Mais il aurait été préférable qu’elle ne pose jamais cette question parce que la jeune femme recevra une réponse virulente.
«Musulmane, vous devez vous taire»
«L'homme assis près du couloir en face de moi m’a hurlé : "vous êtes musulmanes, vous devez la f*****"», confie-t-elle. Choquée, elle a demandé des explications. «Il s’est alors penché au-dessus de son siège. Me regardant droit dans les yeux, il a dit : "Oui, vous savez que vous souhaitez l’utiliser comme une arme, alors f*****-la"», raconte la jeune femme soulignant qu’elle sentait «la haine dans sa voix et dans son regard enragé». Face à l’insensibilité des passagers, Mme Ahmad a fondu en larmes.
La jeune femme a dénoncé une «islamophobie réelle» au pays de l’Oncle Sam, suscitant très vite les réactions des internautes qui allaient quasiment tous dans le même sens, appelant au boycott de la compagnie. Le hashtag #unitedfortahera a été lancé sur Twitter et la nouvelle s'est propagée en quelques instants.
Pour tenter de calmer la situation, l’hôtesse s’est verbalement excusée, avouant que les propos de l’autre passager avaient été «inappropriés». Comme pour gommer l’incident, le porte-parole de United Airlines a déclaré aux médias que la compagnie «soutient fermement la diversité et l’inclusion», rapporte CNN. Dans un communiqué de presse officiel, la direction a simplement évoqué un «malentendu», d'après la même source.
Déception
Tahera Ahmad s’est dit «déçue» que la compagnie ne reconnaisse pas la discrimination dont elle a été victime, surtout que des mésaventures du genre sont courantes pour elle depuis plusieurs années. «Depuis septembre 2011, je suis souvent victime de discrimination», affirme la jeune femme, ajoutant qu’on lui a craché dessus, arraché son hijab, … «Le problème ne vient pas de la canette de soda, mais plutôt d’un environnement qui encourage les gens à être humiliants et blessants», estime la jeune musulmane.
L’islamophobie aux Etats-Unis devient de plus en plus un véritable phénomène de société. Et les femmes sont souvent de grandes victimes et généralement tout part de faits assez banals. En avril dernier, une marocaine était accusée à tort de tentative d’attentat dans une pizzeria.