Les dirigeants des pays membres de l’Union européenne ont adopté une série de mesure, hier soir, jeudi 23 avril, au terme d’une réunion extraordinaire du Conseil européen, pour rechercher le moyen d’éviter un nouveau drame semblable à celui du 19 avril. Le nom du Maroc n’est mentionné nulle part.
Contrairement aux années 2005, le royaume n’est plus aujourd’hui au centre du mouvement migratoire qui atteint les côtes européennes. Les migrations transméditerranéennes se sont déplacées sur la Libye, la Tunisie, l’Italie, mais aussi la Grèce, via la Turquie. Le Conseil européen a ainsi décidé de mener une opération militaire en Libye pour démanteler les réseaux de passeurs et détruire leurs embarcations si elle obtient le mandat des Nations Unies.
Si le Maroc n’est plus au cœur des préoccupations migratoire de l’UE, il n’a jamais cessé d’être un pays de départ. Depuis 2010, le nombre de migrants irréguliers qui atteignent encore les côtes espagnoles chaque année par des embarcations de fortune via Gibraltar, tourne autour de 3000 personnes et quelques centaines via les Canaries. Le 12 août 2014, plus de 900 personnes ont été secourues en mer par la Guardia civil et ramenées vers le port de Tarifa. A la même période, en quelques jours, 1 200 individus étaient interceptés en mer sur des pateras.
Triton et Poseidon, pas Indalo et Hera
La principale décision des Etats membres - la plus médiatique du moins - a été de «renforcer rapidement les opérations Triton et Poséidon menées par l'UE en triplant au moins les ressources financières à cette fin en 2015 et 2016 et en augmentant les moyens disponibles, ce qui permettra de renforcer les possibilités de recherche et de sauvetage dans le cadre du mandat de Frontex», indique la déclaration commune du Conseil européen.
L’opération Triton de contrôle et de surveillance dotée d’un budget de 18,2 millions d’euros pour l’année 2015 ne concerne que les eaux territoriales de l'Italie ainsi que des parties des zones de recherche et sauvetage (SAR) de l'Italie et Malte. L’opération Poséidon débutée dans les îles grecques de la mer Egée le 1er février 2015 durera jusqu'en septembre et dispose d'un budget de 5,26 millions d'euros. Elles sont toutes les deux concentrées sur la Méditerranée orientale.
De fait, le lancement de l’opération Triton a mis un terme à toutes les autres opérations du même ordre opérées par Frontex. Pour la zone Maroc-Espagne, il a signifié la fin des opérations Minerva, Indalo et Hera, à l’automne dernier. Aujourd’hui, les opérations de surveillances et de sauvetages en mer relèvent toute de la Guardia Civil, du Salvamento Marítimo et plus rarement de la Marine royale marocaine. Un changement mineur toutefois, car même à l’époque des trois opérations de Frontex, l’essentielle de la surveillance, du contrôle et des sauvetages étaient réalisés par les Espagnols.
Développement et accord de réadmission
Les autres décisions du Conseil européen relèvent de la traditionnelle politique d’externalisation de l’Union européenne qui cherche à mobiliser les pays au sud de la Méditerranée, mais aussi la Turquie, dans sa lutte contre l’immigration irrégulière et pour les réadmissions. Pendant positif de cette politique, des «programmes régionaux de développement et de protection» en Afrique du nord et dans la corne de l’Afrique devront être lancés.
Le Maroc est au cœur -et sans doute le meilleur exemple- de cette politique depuis de longues années. Selon le rapport 2014 «Evaluation des opérations d’appui budgétaire au Maroc», le Maroc a reçu 1,1 milliards d’euros d’aides budgétaires entre 2005 et 2012 de l’Union européenne pour soutenir son développement. Les deux partenaires entretiennent sur les questions migratoires un dialogue constant fait de coopération, de compromis et de résistance.
En jeu, aujourd’hui, pour lui l’accord de réadmission, inclus dans le Partenariat pour la mobilité, signé en juin 2013. La mention, dans le communiqué du Conseil européen des «accords nationaux de réadmission avec les pays tiers, pour favoriser la réadmission des migrants économiques en situation irrégulière dans les pays d'origine et de transit, en étroite coopération avec l'Organisation internationale pour les migrations», laisse à penser que la pression de l’Union européenne sur le Maroc pour obtenir sa signature ira en augmentant.