Alors que la France et le Maroc viennent de renouer leur coopération diplomatique et judiciaire, les autorités marocaines sont à nouveau dans le viseur de près d’une dizaine d’ONG, notamment l'ACAT, qui déplorent leur attitude face aux allégations de tortures. Neuf organisations de défense des droits de l’homme accusent les responsables marocains d’être derrière les poursuites pénales qui visent ceux qui ont déposé des plaintes contre des agents de sécurité marocains, indique HRW.
Ces réactions surviennent après l’assignation en justice de l'organisation française ACAT (Action des Chrétiens pour l’abolition de la torture). Pour rappel, l’ACAT avait reçu, le 23 janvier dernier, une convocation de la justice marocaine, dans le cadre d’une plainte pour «diffamation, outrage envers les corps constitués, utilisation de manœuvre et de fraude pour inciter à faire de faux témoignages, complicité et injure publique». Cette convocation faisait suite aux multiples plaintes pour torture que l'organisation avait déposées en France contre des agents publics marocains.
Hammouchi toujours dans le collimateur de l’ACAT
Alors que la France et le Maroc repartent sur de bons pieds après une année de brouille diplomatique, l’ACAT et les ONG visent principalement dans leurs plaintes le responsable de Direction générale de la surveillance du territoire marocain Abdellatif Hammouchi. En mai 2013, l’organisation et un ressortissant franco-marocain Adil Lamtalsi avait déposé une plainte pour «complicité de torture» contre le chef de DGST. En février 2014, la remise par la police française d’une convocation à Hammouchi, sur demande d’une juge d’instruction, avait même été à l’origine de la crise franco-marocaine qui vient de prendre fin.
Outre les accusations contre Hammouhci, l’ACAT avait aussi déposé une plainte pour le compte de Naâma Asfari, un sahraoui emprisonné au Maroc. Mais l'organisation était dans le viseur de l'Intérieur qui l'accusait d'être «une association française connue pour son parti-pris flagrant et actif contre l’intégrité territoriale du Maroc». En effet, Naâma Asfari est un proche du Polisario condamné en février 2013 à 30 ans de prison par le tribunal militaire de Rabat pour sa participation aux événements de Gdim Izik.
Selon les organisations plaignantes, les plaintes déposées par les autorités marocaines contre les accusateurs (Asfari et Lamtalsi) «visent clairement à intimider non seulement les plaignants sus-cités mais aussi toute personne qui envisagerait de porter plainte pour torture et les ONG qui voudraient les assister dans cette démarche». Ces ONG affirment également que les mesures prises par le Maroc, alors que la justice a omis de mener des enquêtes impartiales bien que ces personnes disent avoir affirmé à plusieurs reprises devant des magistrats avoir été torturées, pourraient constituer des violations des obligations du royaume en tant qu’État partie à la Convention de l’ONU contre la torture. Elles pointent plus précisément du doigt la violation de l’article 13 de ladite Convention.