L’association tient à exprimer sa profonde déception à l’égard de la mesure de classement sans suite que le ministère public a réservée à la plainte qui lui a été adressée à ce sujet par le collectif constitué de plusieurs associations dont Transparency Maroc. En décidant de qualifier de légaux les actes administratifs par lesquels le ministre des finances et le trésorier général se sont attribué des primes sans fondement juridique clairement établi, le parquet s’est autorisé à empêcher les juges du siège de se prononcer sur la légalité de cette conduite et sa qualification subséquente de détournement de bien public, s’érigeant ainsi en obstacle au droit à un procès juste et équitable , à la reddition des comptes par les responsables du gouvernement et de l’administration, et à l’égalité de tous devant la loi.
L’association rappelle qu’elle a considéré dès l’éclatement de cette affaire, de concert avec de nombreuses autres associations, que la poursuite judiciaire engagée de manière confuse à l’encontre de deux cadres supérieurs de l’administration des finances pour violation du secret professionnel, n’avait aucun fondement légitime, dans la mesure où les faits qui leur étaient reprochés n’avaient pas été établis au terme de l’enquête administrative abusive dont ils ont fait l’objet et qu’en soi, la divulgation d’actes administratifs non couverts explicitement par la consigne de secret professionnel, ne constitue pas une violation de celui-ci, tel qu’il est défini et sanctionné par le code pénal. L’action publique engagée à leur encontre était d’autant plus inopportune que la notion même d’obligation de réserve du fonctionnaire est appelée à être repensée, depuis que la constitution proclame le droit d’accès à l’information et engage les pouvoirs publics à promouvoir la transparence et à garantir la reddition des comptes de la part des gestionnaires de la chose publique.
La lenteur avec laquelle ce procès a été conduit, alors que l’un des prévenus était frappé d’une mesure vengeresse de suspension administrative entraînant privation de salaire, est également de nature à conforter l’impression générale que le temps de la Justice est utilisé par les pouvoirs publics pour infliger à leurs victimes des préjudices indus et pour tergiverser jusqu’à la démobilisation de l’opinion publique.
Par ailleurs, le Conseil national constate avec préoccupation les atermoiements autour de la préparation du projet de loi sur l’accès à l’information et rappelle que l’exclusion de la société civile dans cette phase du processus va à l’encontre des dispositions de la constitution sur son rôle dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques.
Si elles venaient à se confirmer, les informations persistantes sur une formulation de la loi en net recul par rapport à l’article 27 de la constitution, signifieraient l’abandon pur et simple par les pouvoirs publics du principe du droit d’accès à l’information porté par le mouvement social et consacré par la loi fondamentale.