Ses photos circulent actuellement sur les réseaux sociaux. Brahim Benchekroun a été tué le 2 avril lors des affrontements entre les rebelles et les partisans de Bachar Al Assad dans la région de Lattaquié en Syrie. Cet ancien détenu de Guantanamo dirigeait Sham-al-Islam, un groupe djihadiste composé principalement de combattants marocains affilié à Al-Qaida. Il a été tué dans la province où la secte alaouite du président Bashar Al Assad est dominante.
Depuis plus de deux semaines, l’armée syrienne affronte dans cette ville plusieurs autres groupes jihadistes opposés à Assad dans ce qu’ils appellent la «Bataille de la Guêtre», rapporte ABC. Les combats opposent la branche syrienne d’Al-Qaida, Al Nusra, à l’armée régulière syrienne.
Benchekroun est un homme au parcours atypique. Il avait été arrêté au Pakistan en 2001 après les attentats du 11 septembre 2001 contre le World trade center. Après avoir été emprisonné par les Etats-Unis à Bagram et Kandahar en Afghanistan, il a séjourné pendant deux ans et demi dans la prison américaine de Guantanamo avant d’être remis en août 2004 aux autorités marocaines. En mars 2005, Benchekroun bénéficiera de la liberté conditionnelle après une rencontre tenue à Casablanca. Mais en novembre de la même année, il sera à nouveau emprisonné pour avoir tenté de créer une cellule jihadiste au Maroc.
De Guantanamo au jihad en Syrie
Celui qui avait voyagé dans plusieurs pays notamment la Mauritanie, l’Arabie Saoudite, le Pakistan avait clamé son innocence lors des séjours passés dans les trois prisons – Bagram, Kandahar et Guantanamo. «…jamais, les Américains n'ont dit de façon précise ce qui m'était reproché», expliquai-t-il sur LeMonde. Même s’il jugeait que la prison de Guantanamo «était plus dans le temps», il estimait par contre que les prisons afghanes ont été «bien pires».
Le détenteur du matricule 587 à Guatanamo ne pardonnait pas également aux Américains d’avoir profané le Saint Coran. Selon le désormais ex-chef de Sham-al-Islam, les soldats américains profanaient le livre saint pour humilier les prisonniers musulmans. «On nous empêchait de prier. Ils prenaient le Coran et le jetaient dans les toilettes», avait-t-il déclaré sur ABC. «Nous leur avions expliqué que ce livre sacré n’était pas celui des terroristes mais appartient à tous les musulmans», se plaignait-il.
L’homme va rejoindre la Syrie quelques années après sa libération au Maroc pour combattre aux côtés des opposants de Bachar Al Assad. Il a été tué aux côtés du chef militaire du groupe jihadiste, l’égyptien Abu Safiya al Masri. Ses photos ont été partagées par le salafiste marocain Mohammed Kettani sur sa page Facebook en guise de condoléances. Plusieurs vidéos de Benchekroun ont également circulé sur Youtube ces derniers mois. Le jihadiste avait même été filmé au front en septembre dernier le jour où l’ancien chef militaire de Sham-al-Islam, Abu Hamza al Maghribi, avait été tué. L’homme dirigeait l’enterrement et lisait le sermon devant ses frères jihadistes.
Même sort pour Anas Alaoui
Selon EFE, l’ancien porte-parole du mouvement de défense des prisonniers salafistes marocain, Anas Halaoui, a également trouvé la mort aux environs de Lattaquié dans ces affrontements entre l’armée syrienne et les djihadistes opposés à Bachar Al Assad. Ce djihadiste, marié et père de deux enfants, avait rejoint le terrain en décembre dernier. Il avait également passé trois ans en prison, de 2004 à 2007 avant de devenir le porte-parole du mouvement salafiste le plus connu au Maroc.
Mohamed Mazouz prend le relais de Sham-al-Islam
Selon Alyoum24, le groupe Sham-al-Islam est actuellement dirigé par l’ami et ancien compagnon de Benchekroun en prison Mohamed Mazouz. Ce dernier avait été arrêté après les attentats de septembre 2001 avant d’être remis aux autorités marocaines en 2004. Il avait apparu dans une vidéo en guise de réponse à certains chefs salafistes qui demandaient aux jeunes Marocains de ne pas aller combattre en Syrie.
Même s’il est difficile d’avoir des chiffres exacts, les médias parlent de 200 combattants marocains qui ont rejoint la Syrie. Ce chiffre pourrait être trois voire quatre fois plus important si l’on prend en compte les combattants marocains qui rejoignent la Syrie depuis l’Europe. Selon Vish Sakthivel, chercheur à l'Institut de Washington pour la politique au Proche-Orient, plus de 700 marocains ont rejoint la Syrie pour les combats. Rabat envisagerait même de voter un projet de loi pour criminaliser «le voyager à l'étranger pour participer à des conflits armés», faisant allusion au jihad en Syrie.